La France d’avant
21 décembre, 2008Autrefois, lorsqu’il se trouvait enrhumé, le citoyen pouvait sortir de son pantalon informe un long mouchoir de tissu joliment décoré de motifs à l’allure douteuse, le triturer longuement en cherchant un endroit encore inutilisé, tout en faisant profiter son entourage de l’intérêt de son intimité nasale, puis s’y moucher longuement dans une sonorité élégante et discrète au terme de laquelle il marmonnait une excuse inutile en reniflant virilement.
Le mouchoir jetable a condamné cette scène pittoresque. Ce ne fut que le début de la fin de la France d’avant.
Bientôt les enfants ne revinrent plus de classe, riants et joyeux, les mains et le tablier maculés d’une encre indélébile : le stylobille avait envahi les cartables. Désormais, ils rentrent propres et sombres.
Le Progrès s’attaqua ensuite au tri de la salade. Avant ce grand chambardement, la ménagère, pouvait, tout à loisir, laver la salade à la main, feuille après feuille, en préparant avec entrain et plaisir le repas des siens. Quelle n’était pas la joie du cercle familial applaudissant à tout rompre, lorsqu’un des enfants découvrait dans le saladier une limace oubliée par la mère de famille ! Eh bien, cette scène délicate n’aura plus lieu : la salade est désormais vendue en sachet, certifiée et labellisée, triée et saine.
Où va-t-on ?
Tintin