Les louches

Dans un coin du cimetière s’était installée une drôle de communauté que le village nommait « Les Louches », car chacun des membres menait une activité non homologuée par les spécialistes des bonnes mœurs. Il y avait là Louise qui se disait dans la mouise, alors qu’elle avait un peu d’argent. Son mari, nommé Potiron, un mégalomane qui avait des rêves de grandeur, mais n’en fichait pas une rame de la journée. A leurs côtés dormait le Castor, un voleur qui s’était spécialisé dans le vol de mousses au chocolat. Enfin, avec eux, vivait Nino une crapule. Personne ne savait ce qu’il avait fait de répréhensible, mais l’opinion générale c’était qu’il était une crapule, alors c’était ainsi qu’on le décrivait et cela suffisait pour le cataloguer « louche ».

Un jour arriva Paulette et son bien-aimé Ducognot qui était analyste financier dans une célèbre banque. Le couple formula le vœu d’intégrer la communauté des Louches. Les membres se concertèrent. Ils virent d’un bon œil la candidature de Paulette qui avait l’habitude et le bon goût de se travestir en squelette pour faire peur aux gens qui venaient se recueillir dans le cimetière. Par contre, les Louches mirent un veto à l’arrivée parmi eux de Ducognot, au motif qu’il n’y avait rien de louche à exercer la profession d’analyste financier.

L’opinion des Louches était qu’il ne fallait pas qu’ils perdent leur identité. Ducognot n’ayant rien fait de suspect, il pouvait répandre ses manières dans une communauté réputée pour son caractère asocial. Ducognot fit appel de la décision qui le frappait auprès du Tribunal administratif. Les magistrats furent bien embêtés, mais ils décidèrent finalement de forcer les Louches à admettre Ducognot.

En effet, leur argument principal fut qu’il était louche de la part d’un financier de vouloir faire partie des Louches. La demande de Ducognot était donc légitime !