De toutes les couleurs !
28 novembre, 2021Le bleu dit qu’il est noble par nature. On disait des princes d’antan qu’ils étaient de sang bleu. En plus, il offre un grand nombre de nuances au regard : du bleu ciel au bleu nuit en passant par le bleu outremer.
Le rouge ne l’entend pas ainsi. Il symbolise le courage du peuple qui versa son sang sur les champs de bataille ou dans des révoltes contre l’oppression. Le rouge cerise offre au gourmand l’occasion d’exciter ses friandes papilles.
Le vert s’énerve. C’est lui qui est la couleur de la Nature, mère de toute chose. Quand on est vert, on est écologiste, on est pour la protection de la mer, on est pour manger sainement… Bref, le vert est la couleur qui sauvera la civilisation !
Parlons un peu de moi, dit le jaune. Je suis extrêmement intéressant. Je ne plastronne pas au premier rang, mais en me mêlant aux autres, je peux changer les choses. En épousant le bleu, je peux devenir vert par exemple.
A ces mots, le violet ne se retient plus. Il dit qu’il est sans doute la couleur la plus élégante. N’importe qui ne peut pas porter du violet. La preuve : les prélats s’en sont réservé l’usage quasi exclusif. En plus, les autres – le bleu et le rouge – se mettent à deux pour accéder au violet.
L’orange s’énerve. Lorsque le crépuscule survient les soirs d’été, qu’aperçoit-on à l’horizon ? Dans un subtil dégradé des teintes mordorées accompagnent le coucher du soleil. Par conséquent l’orange estime être la plus belle des couleurs puisqu’il peut offrir un tel tableau quotidien.
Il restait le blanc qui n’avait rien dit. Il agita ses petites mains pour qu’on prête attention à la couleur de la paix et de la fraternité. Au passage, il dit aussi être très propre puisqu’il symbolise la virginité. Et l’hiver ? Qui est-ce qui calme tout le monde en recouvrant la campagne d’un voile immaculé ?
Ah, mince ! On a oublié le noir !
Le noir règle son compte au bleu qui s’en prend à l’âme des gens en l’obscurcissant lorsque les hommes sont blessés par la vie.
Il fait également remarqué au passage que le rouge est la couleur de tous les martyrisés par la violence de l’injustice. Le rouge est donc sanguinaire.
Le jaune, c’est celui qui brise les grèves. Celui qui fait fi de la solidarité avec ses camarades de lutte. Le jaune manque de dignité.
Le noir n’a rien contre le violet, mais tout de même il le trouve assez louche. N’y a-t-il pas un paradoxe entre symboliser la sagesse et être un indice de rage dans l’expression : violet de rage. Par ailleurs, pourquoi se cache-t-il sous des pseudonymes comme parme ou mauve ?
Parlons de l’orange, dit le noir avec une certaine jubilation. L’orange, c’est la couleur des bagnards américains qui ont commis les pires exactions ! Il n’y a pas de quoi être fiers ! L’orange est un voleur ! Il est le seul à avoir pris le nom d’un fruit qui ne demandait rien à personne !
Quant au blanc, le noir s’esbaudit, il suffit qu’il le touche pour le transformer en gris, avec une bonne cinquantaine de nuances, s’il le veut.
Soyons sérieux, affirme le noir. Moi, j’offre quelque chose de magique. L’obscurité de la nuit inspire les poètes. Lorsque le soleil est couché, les hommes sont confrontés à leurs sentiments. C’est à cet instant-là que leurs âmes s’élèvent vers un peu plus de grandeur.
Bon, on en a vu de toutes les couleurs !