S’envoyer en l’air

« Dans cinquante ans, nous voyagerons tous par les airs puisqu’il n’y aura plus de place pour toutes les voitures sur Terre. »

« Comment voyez-vous ça, maître ? »

« Nous aurons un petit gilet, muni d’une petite fusée dans le dos qui nous permettra de nous déplacer, à notre guise, dans toutes les directions. »

« Ce sont les pigeons du quartier qui vont être surpris ! Pourvu qu’ils ne prennent pas l’idée d’atterrir et de marcher sur le sol pour nous remplacer. »

« Donc, vous irez au bureau en surplombant les embouteillages provoqués par ceux qui sont contre les déplacements par fusée. Parce qu’il y aura sûrement ceux qui sont contre ; en France, il y a toujours des gens qui sont contre. »

« Ceux qui arriveront en retard au bureau seront sanctionnés. »

« Oui, puisque vous pourrez régler la vitesse de votre gilet à votre convenance. Ce sera la première fois que vous vous précipiterez à votre bureau à Mach 2. »

« Mon collègue Dugenou qui habite en face du bureau pourra sauter directement de la fenêtre de sa chambre jusqu’à son fauteuil. »

« Dans les airs, il faudra une réglementation. Si vous rentrez dans un nuage en même temps que votre voisine, madame Duplantier, il y a des risques de collision. »

« On ne pourra plus dire d’un air polisson qu’on va s’envoyer en l’air puisque c’est précisément ce qu’on fera. »

« Dans le même ordre d’idée, votre voisin, monsieur Duplantier, ne pourra plus prétendre qu’il a les pieds sur Terre, contrairement à vous ! »

« Et en cas de pluie ou de neige ? »

« Pas de problème, il suffira de vous élever au-dessus des nuages en faisant attention de ne pas vous cogner aux satellites ou aux avions gros porteurs. »

« Faire coucou aux passagers d’un Boeing par le hublot, ce sera sympa ! »

« Le petit problème, c’est qu’il n’y aura plus de frontières entre pays ! »

« Oui, on règlera d’une seul coup les problèmes d’immigration. On ne pourra pas installer un douanier derrière chaque nuage. »

« Il parait que le gilet-fusée pourra être utilisé aussi dans les couloirs du bureau. Nous irons plus vite, d’où gain de productivité. »

« Mon patron continuera à me dire que je ne touche plus terre ou que je me donne des grands airs ! »

« Il y a quand même le risque d’être détourné. Je ne serais pas étonné qu’un hacker trouve le moyen de prendre le contrôle de notre gilet et vende son logiciel en ligne. »

« Ce qui permettrait à Thérèse de m’enfiler le gilet en douce, le dimanche matin, et de m’envoyer chez sa mère pour le déjeuner ! »

« Oui, reconnaissons-le : le progrès présente toujours de effets pervers. »

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