Archive pour août, 2021

Précautions

31 août, 2021

« C’est bon, je suis paré. J’ai pris mes précautions.»

« Contre quoi ? »

« Une attaque des Chinois. J’ai mis toute ma famille au Mandarin. Nous pourrons leur parler. »

« Et contre les ours bruns ? »

« Nous sommes au point. Nous nous sommes entrainés en poussant des cris horribles qui les éloigneront. Nous avons essayé sur le chat de la concierge. »

« Il partait qu’elle ne veut plus vous voir. »

« Ce n’est pas grave. Nous nous sommes faits vaccinés contre la bêtise humaine : 4 doses successives et un rappel. »

« Et contre une hausse d’impôts ? »

« J’ai une épargne de précaution. Voilà 10 ans que j’ai interdit les départs en vacances. Les vendeurs de cacahuètes ne sont pas près de me piquer mon fric ! »

« Je vois que vous avez pris toutes vos précautions. »

« Oui, la clé c’est d’anticiper. Par exemple, vous savez que notre nouveau patron vient de Biarritz. Eh bien, je me suis mis à la pelote basque illico. »

« Vous croyez à une promotion prochaine ? »

« Bien sûr. D’ailleurs, j’ai averti Mollard. Il faut qu’il prenne ses précautions pour ne pas pleurer quand il saura que c’est moi qui ai été promu. »

« Et si c’est Dugenou qui est promu ? »

« Pas de problème. J’ai pris la précaution de lui dire que j’admirais beaucoup son travail et que j’aimerais bien me mettre à son service dans le cas bien improbable où ma candidature ne serait pas retenue. »

« Et pour le prochain diner de fiançailles de votre belle-mère ? »

« J’ai pris mes précautions aussi. J’ai demandé au docteur Mouchalet un certificat pour excuse mon absence. Il connait ma belle-mère, il a donc pensé que je devrais effectivement m’en dispenser. C’est une question de santé mentale. »

« Et pour le bac de votre gamin. »

« Aucun problème, j’ai fait graver le théorème de Pythagore sur la branche droite de ses lunettes. Dans le creux de sa main, il a les principales dates de la guerre de 14. S’il va aux toilettes, il aura la théorie de la relativité sur le revers de sa chemise. »

« Je vois que vous vous protégez contre tous les aléas de la vie. »

« Et même au-delà ! Je suis allé m’entretenir du Paradis avec l’abbé Tize de de la paroisse. Il va entreprendre des démarches pour m’assurer une place. »

« C’est sympa de sa part. »

« J’ai également convoqué le diable pour lui faire part de mon refus de séjourner chez lui. Je l’ai plutôt orienté sur la famille Dugenou. »

Un polisson

29 août, 2021

« Madame, vous me repoussez alors que mon cœur brûle d’amour pour vous ! J’en suis profondément blessé. »

« C’est-à-dire que vous n’êtes pas très beau ni très riche, baron ! Donc, ça m’arrangerait que vous bruliez ailleurs ! »

« Avez-vous bien regardé mon arbre généalogique, comtesse ? Mon ancêtre Pierre-Auguste s’est distingué à la bataille de Bouvines aux côtés du roi Philippe ! »

« C’est-à-dire que je n’ai pas l’intention d’épouser votre ancêtre, baron. »

« Et mon habileté au jeu du tric-trac ? N’y-a-t ’il pas là une originalité capable de retenir l’attention de vos sentiments à mon égard ? »

« Euh… je n’ai pas vraiment l’intention de passer mon temps en jouant aux dés avec vous ! »

« Feu la baronne, ma mère, m’a légué des dons de cuisiniers tout à fait extraordinaires ! « 

« Ne vous fatiguez pas, cher ami. J’ai un homme de l’art qui réussit des bouchées à la reine merveilleuses, sans compter des montagnes de pâtisseries des plus fines ! »

« Bon alors que puis-je faire pour vous divertir ? Vous contez quelques historiettes particulièrement lestes ? Quelques grivoiseries amusantes ? »

« Monsieur ! Me prenez-vous pour une femme de mauvaise vie ? »

« Pas du tout, je cherche à remonter dans votre estime, madame qui me traitez si bas. Peut-être une petite improvisation au clavecin… »

« Dois-je vous rappeler que toute la Cour s’est moquée de votre dernière prestation, baron ? Sa Majesté s’en est vivement gaussée. »

« Je vois que vous prêtez l’oreille à de mauvaises rumeurs. Savez-vous que sa Majesté s’est prise d’un réel intérêt pour ma collection de boîtes de fromage ? »

« Je ne manquerais pas d’en faire part à mon fromager, mais je serais plutôt tentée par une collection de pierres précieuses dont je pourrais faire monter les joyaux en colliers. Vous n’auriez pas quelque chose comme ça, monsieur ? »

« Non, par contre, j’ai une très belle galerie de tableaux exécutés par des artistes orientaux qui sont d’une finesse exquise. »

« N’êtes-vous pas en train de me parler de vos estampes japonaises, monsieur. La marquise Dubout a déjà eu l’avantage de les visiter. Elle fut fortement étonnée que cette exposition se termine dans votre boudoir, monsieur. »

« La marquise n’a pas votre goût pour les belles choses, madame. Elle n’a pas la luminosité de votre regard, la douceur de votre peau ou l’élégance de vos gestes. »

« Monsieur, veuillez cesser ces viles flatteries avant que je décide de les rapporter au comte, mon époux, qui pourrait s’en trouver contrarié et vous provoquer en duel. »

« Monsieur le Comte étant atteint par les maladies relatives à son âge, je crois que je vais continuer à louer votre grande beauté, madame. »

« Vous êtes un fripon, baron. Rhabillons-nous et fuyez de mes appartements ! »

Dans ta voiture

27 août, 2021

Depuis ta voiture, que vois-tu ?

Le lieu du milieu.

Le mandarin et sa mandarine.

La gourde de la gourde.

Le furoncle de l’oncle.

Le futal du futé.

Le moineau du moine.

L’os du molosse.

Le microbe sur la robe.

Le chaland et son chat lent.

Le bossu cossu.

Vintage

25 août, 2021

« Je suis une personne particulièrement désintéressée. »

« Ah bon ? L’argent ne vous passionne pas. »

« Non, je refuse de me laisser happer par ce piège qui détruit tant de carrières. Moi, ce qui m’intéresse c’est de pouvoir exprimer ma créativité. »

« Il faut pourtant de l’argent pour vivre. »

« On peut très bien vivre sobrement comme nos ancêtres. Par exemple, je peux très bien regarder le journal télévisé sur mon poste de 1980. Les informations sont les mêmes. »

« Oui, mais en noir et blanc, vous loupez le charme de la présentatrice. »

« Je peux aussi aller au boulot en Renault Dauphine. »

« C’est très vintage, mais faites attention, ça tient mal la route. »

« Je vais revenir au téléphone fixe. Le mobile est un instrument d’emprisonnement, ce n’est qu’un fil à la patte. »

« C’est le patron qui ne va pas être content. Vous savez bien que vous devez pouvoir être engueulé vingt-quatre heures sur vingt-quatre. »

« C’est vrai qu’il n’a déjà pas apprécié que je lui rédige mes rapports avec un stylo à plume. J’ai pourtant utilisé du papier à carreaux pour qu’il puisse suivre les lignes. »

« Et pour votre machine à calculer de 1950, vous pensez à un renouvellement ? Le service logistique ne veut plus assurer sa maintenance. »

« Elle marche très bien. Ce n’est pas comme vos ordinateurs. Dès qu’ils calent, vous ne savez plus faire une addition ! »

« Pour le café de 10 heures, le patron trouve que c’est un peu long et qu’il faudrait arrêter de moudre le café dans le moulin de votre grand-mère. »

« Il ne faut pas compter sur moi pour boire votre café au goût de carton, ça me donne des aigreurs à l’estomac assez insupportable. »

« Moi, je dis ça, c’est pour vous. C’est comme la serviette en tissu et à carreaux que vous vous attachez autour du cou à la cantine. Je vous signale qu’elle prête à commentaires. »

« Moi au moins, je ne reviens pas de manger avec un costume tâché. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Quand je vois le vôtre, je pourrais deviner le menu. »

« Vous comptez toujours payer vos impôts en liquide ? Vous savez que les impôts ont ouvert un guichet rien que pour vous ? »

« Je m’en fous, c’est légal jusqu’à 300 euros. Et les hackers ne sont pas près de mettre leur nez dans mon portemonnaie ! »

« Il parait que vos gamins passent leur temps dans des livres au lieu de jouer sur des tablettes comme des crétins. Ce sont les seuls qui ont l’air éveillé en classe. »

« Parfaitement. Et le plus étonnant, c’est qu’ils disent bonjour en se levant le matin et qu’en plus, ils fréquentent la salle de bains tous les jours ! »

Par procuration

22 août, 2021

« Qu’est-ce que vous faites ? »

« Je découpe des photos de vedettes que je collectionne dans un grand livre. »

« Quelles vedettes ? »

« Cinéma, chanson, sport, journalisme… enfin tous les gens qui font parler d’eux, quoi ! »

« Vous êtes un vrai groupie… C’est bizarre, que ma gamine collectionne des photos de chanteurs, je peux comprendre… Mais vous, à quarante-huit ans… »

« Non, ce n’est pas curieux. A mon âge, j’ai eu le temps de comprendre que je ne serai jamais quelqu’un de célèbre. Personne n’a créé la cérémonie des César de la plomberie qui pourrait me mettre en évidence… »

« Donc, vous cherchez à vivre des moments de gloire par procuration… »

« C’est à peu près ça. Regardez la tête de Dumollard qui reçoit son Oscar. En regardant bien la photo, je m’insinue dans son esprit pour savoir l’impression que ça fait. »

« Et ça fait quelle impression ? »

« J’avoue que je suis très heureux, mais vous constaterez quand même mon maintien modeste. »

« Et cette photo-là, avec une chanteuse à la mode en bikini. »

« Je ne la regarde pas tellement, parce que Thérèse n’aime pas trop l’air extatique qui me saisit dans ces moments-là. »

« Vous avez aussi une photo du ministre Duplantier sur son yacht de luxe. Comment vous sentez-vous dans ce symbole du capitalisme dominant ? »

« J’ai tout fait pour me cacher, tout en laissant venir quelques photographes. Sur le pont du bateau, je pense à tous ces contribuables qui, en voyant que je la coule douce, sont en train de se demander pourquoi ils ont voté pour moi. »

« Effectivement, c’est bien ce qu’on voit en observant votre air arrogant et satisfait. »

« Et celle-là, vous avez vu. Je sors d’un restau populaire pour bien montrer qu’en dépit de mon immense fortune, je suis un grand modeste, proche des gens. »

« Et là, malgré vos lunettes noires, on vous reconnait en compagnie d’un homme politique d’extrême-droite. C’est un peu gênant, non ? »

« Pas du tout ! J’ai fait faire cette photo pour pouvoir diffuser un communiqué sanglant dans lequel je combats les idées extrémistes. Avec une belle polémique comme ça, j’ai tenu la Une des journées pendant quinze jours ! »

« Donc, vous voulez faire parler de vous. »

« Evidemment, sinon à quoi ça sert tout ça ? Et regardez celle-là, je suis en compagnie de footballeur célèbre du genre à valoir 150 à 200 millions d’euros. Je peux faire valoir mon côté sportif qui ne saute pas aux yeux au premier coup d’œil. »

« Et là, cette photo, c’est qui ? »

« Non, ce n’est rien. C’est mon beau-frère qui est boulanger. Je suis allé au baptême de sa fille, mais il n’y avait pas de vedettes. »

L’or de Laure

21 août, 2021

Dans l’Orne

Laure

Orne

Ses oripeaux

Avec l’or

De l’orfèvre.

Sous l’orage

Elle sort de l’ornière

Avec orgueil.

Le rendez-vous d’Oscar

20 août, 2021

Oscar

Vient de Madagascar

En autocar.

Ce lascar

Est un vieux briscard,

Pas un toquard.

Il a rancart

A l’écart,

A moins quart.

Couché, assis, debout

19 août, 2021

« J’aime bien rester couché le week-end ou alors me payer une petite sieste dans le hamac après le repas ».

« Oh, mon pauvre, c’est socialement très mal vu ! »

« Ah bon ! Il faut faire comment alors ? »

« On doit vous croiser debout, la mine fière et énergique. Vous devez marcher d’un pas ferme et décidé, surtout dans les couloirs de l’entreprise. Si vous pouviez avoir un gros dossier sous le bras, c’est encore mieux. »

« Ah, mince, c’est fatigant tout ça ! »

« Peut-être mais socialement, vous êtes jugé sur votre allure encore plus que sur votre visage ou vos vêtements. »

« Je peux courir. »

« Oui, vous levez tôt le samedi matin pour votre jogging, c’est pas mal. Mais alors, n’avancez pas en petites foulées, façon pépère ! »

« Comment il faut faire ? »

« Grandes foulées élastiques. Soufflez fort pour qu’on sente bien que vous ne faites pas semblant. Quand vous vous arrêtez faites quelques exercices d’assouplissement, pour que tous ceux qui vous regardent sachent qu’ils n’ont pas à faire à un amateur. »

« Et mon fauteuil en cuir, je l’utilise quand ? »

« Lorsque vous recevez. Et bien entendu ne vous vautrez pas comme vos gamins. Dites à Thérèse d’éviter de mettre un petit napperon derrière voter tête, façon grand-mère. »

« Je peux quand même m’asseoir pour manger. »

« Oui, mais alors à la cuisine. Ne soyez pas comme tous ces bof qui regardent la télé en dînant. »

« Et pour le petit déj ? »

« Le mieux, c’est debout. Vous buvez votre café à toute vitesse en disant que vous êtes en retard. Ça fait celui qui a un rendez-vous ou un boulot important. »

« Il faut s’agenouiller ? »

« A l’église, oui. A la maison, vous pouvez vous accroupir devant votre gamin qui joue à terre, c’est l’attitude du père moderne qui essaie de s’intéresser à l’éveil de l’enfant. »

« Il y a des façons de s’asseoir ? »

« Oui. Au bureau, débrouillez-vous pour avoir des accoudoirs. En plantant vos coudes, les doigts joints devant votre visage, vous pouvez vous donner un air réfléchi. »

« Et sur mon fauteuil ? »

« Le soir, quand vous rentrez, vous pouvez vous jetez dessus en vous tassant discrètement. A ce moment-là, dites que vous êtes crevé, avec un peu de chance vous éviterez les tâches ménagères. »

« J’ai le droit de m’allonger pour dormir quand même. »

« Oui, mais alors ne tapotez pas votre oreiller avant de vous allongez, ça fait encore pépère. »

Robin et Odette sont pauvres

18 août, 2021

Robin est dans son bain.

Il n’a plus un radis ; ce n’est pas le paradis.

Odette à des dettes.

A leurs âges, ils sont dans le potage.

Ils n’ont plus que des oripeaux sur leurs peaux.

Plus une tune de leur fortune.

Dans leur hameau, il leur reste un chameau,

Acheté à un indigène dans la gêne.

Ah ! La mode !

17 août, 2021

« Des carreaux sur un pull marine, quel manque de goût, cher ami. »

« Et vous, votre robe, on dirait un arbre de Noël ambulant. »

« Hier vous aviez un pull jacquard, c’était à mourir de rire. Là on était dans les années 50 en mettant les choses au mieux ! Je parie que vous portez un tricot de peau comme vos ancêtres. »

« De quoi je me mêle ? Votre gilet gris était déjà dépassé avant le Première Guerre Mondiale. »

« Charmant ! Vous feriez mieux d’aller chez votre coiffeur de temps en temps. »

« Je vous demande pardon, je porte une coiffure dans le vent signé Mario. »

« C’est tellement dans le vent que ça part dans tous les sens et qu’on n’y comprend rien. »

« Et vous avec votre frange qui vous tombe sur les yeux, vous voyez quelque chose ? »

« Euh… pendant que j’y suis, vous devriez repasser vos chemises. Qui pensez-vous séduire avec le chiffon que vous portez ? »

« Pas vous, enfin j’espère. Votre manteau style « vieille rombière » des années 60 ne m’inspire rien qui puisse ressembler à une pensée libidineuse. »

« C’est possible, mais moi j’ai plus chaud que vous dans votre duffle-coat vintage. C’est celui de votre grand-père ? »

« Et votre écharpe qui traine parterre, il faudrait peut-être la passer en machine de temps en temps. Vous ne croyez pas ? »

« J’aime bien respirer son odeur si ça ne vous dérange pas. Occupez-vous plutôt de vos baskets. Même mon gamin en collège n’en voudrait pas. »

« C’est toujours mieux que les godillots de votre grand-mère. Les grosses chaussettes en laine, c’est indispensable ? »

« N’attaquez pas ma mémé. Sinon je parle de votre pelisse. D’où la tenez-vous ? Les vieux inuits vous ont fait un rabais ? »

« Bon, maintenant parlons de votre gamin. C’est bien un gamin que vous tenez à la main. Pourquoi a-t-il les yeux barbouillés de noir ? »

« D’abord c’est une gamine et elle a le look Gothic. Si vous vous intéressiez à la mode, vous le sauriez. »

« C’est peut-être à la mode, mais moi, ça me fait peur. »

« Et vôtre môme avec sa capuche et son jean taille basse. Vous êtes sur que c’est le vôtre ? Comme ils se ressemblent tous, une erreur est vite arrivée. »

« Il suit la mode skatteur. Le sport, ça ne risque pas de concerner votre autre gamine constellée de ferraillages autour du cou. »

« Ce n’est pas du ferraillage, ce sont des bijoux. »

« Vous pensez pouvoir la caser avec ses jupes à carreaux et ses chaussettes à pompons. A 18 ans, il faudrait avoir plus d’ambition ! »

« Vous feriez mieux de dire à votre Jah-Jah que les coiffures rasta sont du passé. »

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