Archive pour février, 2021

Se détester

28 février, 2021

« Je vous déteste. »

« Ah bon ? Et pourquoi, je vous prie ? »

« Vous êtes trop correct. Vous aimez tout le monde et tout le monde vous aime. »

« Ne croyez-vous pas qu’il faut s’estimer les uns les autres pour vivre en harmonie dans cette entreprise ? Vous pourriez faire un effort pour me trouver des qualités. »

« Je crois que je ne vous aime pas parce que tout le monde à une haute opinion de vous-même et que, par comparaison, personne ne me considère. Il y a une sorte de déséquilibre à mon désavantage. »

« Je comprends, tout se joue dans l’estime de soi. Il est vrai les gens ont plus de considération pour moi que pour vous. Pour bien faire, il faudrait que je me déconsidère. »

« Oui, il faudrait quelque chose qui vous rende mesquin aux yeux des autres. Vous pourriez par exemple envier ma nouvelle voiture. »

« C’est vrai. Elle est belle. Mais j’ai de quoi m’en acheter dix comme elle et sans prendre le misérable crédit que vous avez quémandé et que vous mettrez tant de temps à rembourser. »

« Ou alors, je pourrais faire une erreur dans un dossier, vous la feriez remarquer au patron qui m’adresserait un blâme. Ce serait une infamie indigne qui flanquerait à bas la considération que vous avez dans les bureaux. Bien entendu, je m’arrangerai pour passer pour la victime. »

« Ben… non, j’ai déjà essayé de le faire… Et le patron s’en fout ! c’est un comble ! »

« Bon, on progresse, vous êtes décidemment très dégoutant. Vous allez me plaire si vous continuer. »

« Je pourrais faire semblant de ne pas faire exprès d’érafler votre voiture dans le parking. »

« Ah… enfin, ça c’est pas mal. C’est de mon niveau. Moi, j’ai dragué Ginette Poirier du service compta et puis je l’ai laissée tomber. Résultat : dépression, congé maladie, etc… »

« J’aurais du mal à être aussi odieux que vous, mais je pourrais peut-être vous voler un dossier et le perdre volontairement. Vous seriez bien embêté. »

« Ben… vous voyez quand vous voulez ! On se roule dans la même fange : c’est moi qui vous ai dérobé le dossier Poulard et je l’ai caché dans le bureau de Dugenou pour le faire disputer. »

« Super ! Vous me donnez une idée. Je vais téléphoner à votre femme pour lui dire que Ginette Poirier et vous, vous fautez ensemble. »

« Mais je vous dis qu’on a rompu. »

« C’est ce que vous dites, mais si j’en crois le ragot que j’ai fait courir sur vous, ce n’est pas le cas. »

« Alors là, je commence à vous aimer beaucoup. Je pourrais dévoiler le montant de vos primes que vous obtenez en jouant au tennis avec le patron que vous laissez gagner alors qu’il joue comme un pied. »

« Et si je disais qu’on vous a vu dans une manifestation anti-féministe. »

« Bon ! Je me suis trompé sur vous ! Vous êtes un type super. Une vraie pourriture du même niveau que la plupart des salariés de cette boite. Je vais vous introniser à notre table de cantine, celle où on peut dégoiser à plaisir sur les autres. »

La naissance du geai

27 février, 2021

En mai,

Je le sais !

Le geai

Nait

En paix

Au milieu des baies

De la haie,

Près du chai.

Contradictions

25 février, 2021

« Le fanatisme et les contradictions sont l’apanage de la nature humaine. » disait le grand Voltaire.

« Voilà qui est bien vrai, maître. Je n’ai jamais vu ma chatte Soupière en contradiction avec elle-même. »

« C’est normal, élève. Un chat a pour seul objectif de se nourrir et de dormir. On ne voit pas bien où seraient les occasions de s’interroger dans ce genre de vie. »

« C’est certain. De même pour le fanatisme. Je n’imagine pas Soupière aduler un Dieu et le défendre bec et ongles, si j’ose dire. »

« Si les chats ont une religion, j’aimerais bien être au courant, élève. »

« Donc, on pourrait dire que les félins ont une vie plus sage que les humains. »

« C’est presque ça. Les félins ne sont jamais piégés entre des tensions contradictoires. A-t ’on déjà vu un chat hésiter entre un bol de lait et une sieste ? » 

« Il estime avoir droit aux deux. Il prend ses plaisirs l’un après l’autre. »

« Heureusement, l’homme est doté de son intelligence pour surmonter ses contradictions internes. Voter un président autoritaire, tout en revendiquant sa liberté individuelle, ça ne l’impressionne absolument pas. »

« C’est comme lutter pour sauvegarder l’environnement, tout en jetant un papier à terre. »

« Vous avez raison, malheureusement. Pour beaucoup d’êtres humains, la meilleure façon de surmonter ses contradictions, c’est de ne pas s’en soucier ! »

« Quel égoïsme ! »

« Par nature, l’homme est un nid de contradictions, élève. Il peut être très égoïste, tout en manifestant son attachement à la collectivité. »

« C’est vrai, ça n’a pas l’air non plus de le choquer plus que ça. »

« En fait, il fait un raisonnement économique. Il compare ce que lui coûte un choix par rapport aux autres et il adopte le prix le moins élevé, sur le plan matériel ou sur le plan moral. »

« Pourtant quand je fais un don aux miséreux, ça me coute plus cher que de ne pas le faire. N’y a-t-il pas là une nouvelle contradiction, maître ? »

« Pas du tout : faire un don aux pauvres vous coûte de l’argent, certes ! Mais cela vous donne bonne conscience. Le coût moral de ne pas donner devient excessif par rapport à celui de donner. »

« Mais cette évaluation n’est-elle pas individuelle, maître ? »

« Tout à fait. Imaginions que nous trouvions un billet de 100 euros dans la rue. Vous vous empresseriez de chercher son propriétaire. Le coût moral de ne pas rendre cet argent est plus élevé pour vous que le coût économique. Tandis que moi, j’empocherai le billet puisque je suis un être sans moralité. »

« Donc, j’en déduis que Voltaire avait raison : les contradictions sont l’apanage de l’homme. Il aurait pu ajouter qu’il passe son temps à arbitrer des entre des options opposées. Et pour le fanatisme qu’est-ce qu’on peut dire, maître ? »

« C’est une sorte de conséquence néfaste des contradictions humaines, élèves. N’oublions bas que la bêtise est aussi l’apanage de l’homme. Il peut donc choisir des options les plus idiotes. »

Miquette et sa biquette

24 février, 2021

Sur la banquette

Miquette

Coquette

Sous sa casquette

Caquette

Et fait des claquettes

En regardant sa biquette

Manger de la roquette

Sur la moquette.

Prendre

23 février, 2021

« Je vais prendre l’air. »

« Comment vous faites pour vous saisir de l’air ? »

« C’est une expression, ça veut dire que je vais dehors pour respirer un grand coup. C’est encore une facétie de la langue française. »

« Alors, c’est comme quand vous me dites que vous allez prendre le temps. Vous vous spécialisez dans la préhension de choses invisibles ! »

« Si vous voulez. Remarquez que j’aurais aussi pu vous dire que je vais prendre l’air de rien . L’expression non seulement veut dire que je me saisis d’une chose immatérielle, mais qu’en plus cette chose, c’est rien. »

« C’est simple votre affaire ! »

« Le verbe prendre est tout de même très pratique quand vous n’avez rien d’autre sous la main. Par exemple, dans des expressions très abstraites comme prendre son avenir en mains. Même chose quand vous employez des expressions imagées : prendre la clé des champs, par exemple. Vous aurez du mal à trouver un autre verbe que prendre. »

« En fait, très souvent l’usage du verbe prendre ne sert à rien. Si je vous dis que je vous prends en considération, vous serez sans doute flattez, mais je pourrais tout aussi bien annoncer que je vous considère. »

« Ben… non…. Parce qu’on attend la suite … vous me considérez comme quoi ? »

« Bon, alors prenons un autre exemple : si je vous dis que je prends la décision de vous flanquer à la porte ! C’est beaucoup trop long : je dirai plutôt je décide de vous flanquer à la porte ! »

« Je comprends ! C’est comme quand Thérèse m’a dit qu’elle m’a pris pour époux … C’est pour faire sa maline : elle pourrait faire plus simple en me disant qu’elle m’a épousé. »

« Voilà ! Remarquez que nous avons aussi la situation inverse. C’est-à-dire que nous utilisons le verbe prendre pour résumer des expressions trop longues. Par exemple, je peux vous dire que « je vous prends au sérieux » au lieu de dire que j’accorde la plus vive attention à votre personne. »

« C’est vrai ! Quand je prends mal vos paroles, en fait ça veut dire qu’elles m’ont profondément blessé à un point qui met en danger nos bonnes relations. »

« Voilà ! Vous y êtes ! Selon le contexte le verbe prendre a un pouvoir de contraction ou de dilatation de la pensée. »

« Bon, mais tout de même… Dans la plupart des cas, prendre veut dire se saisir de  ! »

« Pas toujours… quand vous dites, très content de vous, que vous allez prendre votre bagnole, vous ne vous saisissez de rien du tout, vous utilisez votre voiture ! »

« En effet, mais le sens de s’approprier n’est-il pas le plus courant ? »

« Oui, quand je dis : je prends le balai, cela veut bien dire que je me saisis de l’objet en mains, avec la ferme intention de l’utiliser. Mais si j’affirme que vous prenez de l’embonpoint, vous n’avez rien dans les mains, c’est votre personne qui subit ce malheureux évènement. »

« Bon … heureusement qu’il y a des mots qui servent à tout et n’importe quoi, ça m’évite de me casser la tête à chercher le mot précis ! »

L’attaché taché

22 février, 2021

A l’auberge sur la berge,

L’attaché s’est taché.

Il joue de l’orgue avec morgue.

A son mouflet, il donne un camouflet.

Il sifflote sous la flotte.

Il y a une échauffourée dans les fourrés.

La troupe s’attroupe.

Le monarque prend son arc.

Sous le vent, le paravent tombe.

Le parchemin poursuit son chemin.

Ohé !

21 février, 2021

« L’œcuménisme, quel beau mot maître ! Qu’est-ce donc ? »

« En gros, c’est l’univers des hommes ou tout ce qui rassemble les hommes dans cet univers. »

« Il y a tellement de choses qui les divisent. L’œcuménisme ne serait-il pas une utopie ? »

« Non, c’est une réalité qui se rappelle à nous de temps en temps, élève. L’étymologie du mot, c’est « terre habité ». Cela nous rappelle au passage que nous sommes unis par la terre que nous habitons. Vous voyez où je veux en venir ? »

« Oui, vous allez me dire que nous sommes tous unis au moins sur un point : prendre soin de notre environnement. »

« Il y en a qui n’ont pas encore compris. Mais l’œcuménisme progresse peu à peu. Finalement, on veut tous la même chose : le bonheur, la santé, la paix, manger, dormir, un boulot… »

« Pour le bonheur, la santé, la paix, manger, dormir je veux bien, mais le boulot… N’est-ce pas plutôt une fatalité plus qu’un souhait, maître ! »

« Oui, je sais, il y en a qui se satisferaient de vivre en bullant, mais ceux-ci seront punis par l’ennui, l’ignorance et la bêtise. »

« Voilà qui est sagement parler. Mais il n’en reste pas moins que si nous avons la Terre en commun, nous avons beaucoup de différences dont la plupart nous opposent de manière plus ou moins violente. »

« Certes, élève ! L’œcuménisme n’est pas une donnée a priori, c’est une conquête. N’en soyez pas découragé. Si je vous donnais a priori la solution à tous vos problèmes, vous ne vivriez plus. Vous vous rendez compte de ce que serait une vie « clés en mains ». Encore une question intelligente, élève ? »

« Oui, ne trouvez pas qu’œcuménisme est un beau mot ? »

« Tout à fait, élève. En français, il n’y a que 200 mots environ qui comprennent ‘œ’ qui est donc une lettre à part entière. Nous pourrions dire que notre langue comprend 27 lettres et non 26, comme nous l’apprenons à l’école. »

« Comment faut-il prononcer cette lettre, maitre ? »

« Il y a beaucoup d’hésitations à ce sujet. Quand le ‘œ’ est suivie d’un ‘u’, on dit plutôt ‘eu’, comme dans cœur ou manœuvre. Mais parfois on entend légèrement le « o » comme dans œil. Pour compliquer les choses, le son ‘eu’ peut se prononcer de manière très différente. Tout dépend des accents régionaux. »

« C’est bien compliqué, maître. »

« Oui, d’autant plus que certains ont tendance à prononcer ‘é’ comme dans fœtus qui devient « fétus ». Comme toujours, c’est la langue de tous les jours qui fait évoluer la langue officielle. »

« Remarquez que si tout le monde prononçait de la même manière, la vie courante serait assez ennuyeuse et la carrière des imitateurs très compromise. Ils ne pourraient plus se moquer des voix un peu atypiques. »

« D’où l’intérêt de garder des mots et des tournures un peu compliqués qui permettent de caractériser un discours. Par exemple ‘consubstantiel’. »

« Le problème, c’est qu’aujourd’hui il a une injonction sociale de parler de plus en plus vite. Il devient difficile des caser des mots de 4 syllabes ou plus. »

Gare !

20 février, 2021

Dans la gare

Un Bulgare

Hagard

Et ringard

Se bagarre

Pour un cigare

Et un regard,

Puis s’égare

Dans le Gard.

Marie et son mari

19 février, 2021

A Paris

Marie

Rit

Avec son mari

Harry

Qui parie

Sa Ferrari

Et le canari

De Marine

Marrie.

Ma tante, le sultan et Satan

18 février, 2021

Près de l’étang,

Ma tante

Contente

Attend

Sous sa tente

Le sultan

Haletant

Et le gitan

Satan.

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