Archive pour novembre, 2020

L’histoire du fripon qui mangeait du lard

11 novembre, 2020

Le fripon est sur le pont.

Hilare, il mange le lard.

Que la frivole vole

Au mercenaire qui a ses nerfs.

L’écrivain s’en mêle en vain.

Ensuite, car il y a une suite :

Jean, l’obligeant,

Prend sa lanterne terne

Et se rend chez la mégère qui gère

Le restaurant près du torrent.

Mais elle s’en fout, elle est à Corfou.

Enfin, il y a une fin.

Interview d’un fantôme

10 novembre, 2020

« Bonjour, cher monsieur. Vous êtes donc un fantôme. Comment ça se fabrique un fantôme ? »

« A vrai dire, je n’en sais rien. Il doit y avoir un phénomène physique. Après le décès, je pense qu’une masse d’énergie se regroupe sous forme de corps humain et hop ! »

« C’est curieux ! Mais un tel phénomène doit forcément avoir une raison. On dit que les fantômes reviennent pour se venger de quelqu’un ou de quelque chose. »

« Ah bon ? Mince ! Moi, je ne vois personne dont je voudrais me venger. La plupart des gens ont été très sympas avec moi. Il faut dire que j’étais riche et puissant. »

« Ou alors, vous êtes un fantôme farceur ; vous avez envie de flanquer la frousse à tout le monde ! »

« Non ! Je suis un fantôme sérieux ! En fait, je crois que je réapparais pour terminer des trucs. Par exemple, il faut bien que quelqu’un ferme ma page Facebook. »

« En effet, ce serait dommage de la laisser à l’abandon. Mais après ça, vous allez vous embêter. »

« Non, je peux aussi suivre le prochain Tour de France. Entre fantômes nous avons inauguré un système de paris. Croyez-vous qu’un français va le gagner cette année ? »

« Je ne sais pas, mais vous avez toute l’éternité devant vous pour attendre qu’un coureur français   revienne avec le maillot jaune à Paris. Vous êtes un privilégié. »

« Oui, je le reconnais. Finis les courses du samedi au supermarché. Thérèse se les tape toute seule maintenant ! Comme la corvée de ménage ! »

« Et pour l’argent, vous faites comment ? »

« Fini aussi les problèmes de fric ! Je vais au ciné quand je veux ! »

« Bon, mais enfin, vous avez surement un projet de vie en tant que fantôme ? »

« Non, fini les projets, les objectifs, les évaluations… les machins come ça. Vous, les gens vrais, vous ne comprenez pas qu’on peut avoir pour objectif d’exister. Simplement exister. »

« Chez nous, ça s’appelle du chômage de long terme ou du chômage de longue durée. »

« Eh ben voilà ! Je vous donne le secret pour résoudre votre problème du chômage. Si, du jour au lendemain, tout le monde se croise les bras, il n’y a plus de travail donc plus de chômage ! »

« Euh… je ne suis pas sûr que ça marche comme ça ! Enfin bref… Vous êtes nombreux ? »

« Je ne sais pas. J’ai croisé le fantôme de Dugenou récemment. Lui, il cherche à se venger de Mollard qui lui a piqué sa secrétaire et de son patron qui a un peu mégoté sur ses primes de fins d’année. »

« Si je comprends bien, il y a des catégories de fantômes : les fantômes vengeurs, les fantômes farceurs, et les fantômes paresseux comme vous. »

« Vous avez aussi le fantôme politicien qui cherche à dominer les autres fantômes en organisant des élections. Mais on ne l’aime pas bien celui-ci. »

« En même temps, on ne voit pas bien ce que pourrait faire un président des fantômes. »

« Rien, mais il y en a qui ne peuvent pas s’empêcher de dupliquer les errements humains dans l’autre monde. »

« Au train où vous allez, il y en a sûrement un qui va inventer le championnat de foot des fantômes. »

C’est de l’art !

9 novembre, 2020

Dans le bar,

Il y a du lard.

Dans la mare,

Il y a un bar.

Dans la gare,

Il y a de l’art

Dans le Var,

Je m’égare.

Une prison 6 étoiles

8 novembre, 2020

« Bonjour cher prisonnier, voici votre cellule ! »

« Super ! Le ménage est fait. »

« Tous les jours. Merci de libérer la chambre pour le passage du personnel de ménage. Le petit déjeuner est apporté vers 8 heures. Qu’est-ce que vous prenez : thé ou café ? »

« Je suis plutôt thé. Et pour les repas ?»

« Le chef est à votre disposition. Il suffit de passer votre commende deux heures avant. »

« On dirait qu’il n’y a pas de barreaux aux fenêtres ? »

« C’est inutile : personne ne veut partir. »

« Il n’y a donc pas beaucoup d’évasions de votre prison ? »

« Très peu ! Nous sommes obligés de mettre les gens dehors. Votre prédécesseur avait terminé son temps depuis 3 mois. Il avait posé une demande de prolongation de peine, mais le juge l’a refusée. Il faut dire que si on les accepte toutes, on ne s’en sort plus… »

« Et les voisins ? »

« Ils sont très délicats et calmes. A droite, vous avez monsieur le député Tortichonet qui a détourné quelques millions d’argent public. »

« C’est du classique et à gauche… »

« A gauche, nous avons la chance d’avoir, le président-directeur général de la société Pifpofpaf qui a escroqué quelques milliers d’épargnants. Comme vous le voyez : rien que des gens de qualité. »

« Vous êtes sûr qu’ils vont bien m’accepter ? Moi je ne suis coupable que d’un seul dépassement de ligne jaune ! »

« Ne vous inquiétez, il faut bien débuter. Vous avez le temps de vous améliorer ! »

« Comment se fait-il que votre prison ne soit pas surpeuplée ? »

« Nous n’acceptons qu’une personne par suite. Quand même ! Dans une prison six étoiles, c’est la moindre des choses. Vous avez un bon avocat ? »

« Excellent ! »

« Aïe ! Aïe ! Il est capable d’obtenir une libération anticipée ! »

« Mince ! Vous n’auriez pas quelqu’un de plus nul ? »

« Si, je vous conseille maître Capouletin, il bafouille et se trompe régulièrement de dossier. Avec lui, vous êtes certain de ne pas sortir avant longtemps. »

« Il est possible de s’abonner à vos séjours ?»

« Tout à fait ! Le mieux serait de vous faire arrêter une fois par mois. Nous vous ferons un tarif spécial : six semaines supplémentaires gratuites. »

« Je fais comment ? »

« Pas de problème, nous avons un service qui vous procure la liste des manifestations de casseurs pour vous faire arrêter. Il y a de quoi faire pour tout le monde. »

Hé ! Hé ! Hé !

7 novembre, 2020

Cet été

L’élu

Éric

A émis

Un édit

Ecrit

Sur les ébats

Des édiles

Emus

Et puis

Les écarts

Des élites.

Le maudit et le méchant

6 novembre, 2020

Le maudit n’a pas mot dit

Contre le chant du méchant

Qui joue de la guitare tard.

Pourtant sa sainte femme est enceinte.

Il a le cerveau d’un veau.

Son ciboulot n’est pas au boulot

Dit sa mère qui est une commère

Et qui est liée au chancelier.

Le bruit

5 novembre, 2020

« Le vent mugit dans la plaine. »

« C’est une phrase très réaliste. On s’y croirait. »

« Décrire un bruit en littérature, c’est très compliqué. Heureusement nous avons pleine de verbes bruyants. Par exemple, votre voiture vrombit. »

« Effectivement, j’ai remarqué un bruit inquiétant, mais mon garagiste est confiné. »

« Et si je dis : la fontaine glougloute, n’avez-vous pas envie de vous y plonger tout de suite ? »

« Euh … j’entends ce bruit, maître ! Où est-on ? Sur la plage ? Car j’entends aussi les vagues qui clapotent ! »

« C’est bien possible car je vois tournicoter les mouettes qui criaillent. Ce cri strident ne vous agace-t-il pas les tympans ? »

« Si fait, maître ! Rentrons à la maison. Je préfère entendre les pigeons qui roucoulent. C’est un verbe agréable à l’oreille. »

« Vous avez raison, mais allons plutôt chez vous. Chez moi, Josiane va se plaindre de mon retard. Elle va gémir ou alors glapir, c’est selon les jours. »

« Il parait qu’elle a la voix qui chevrote, ce qui n’est pas non plus très plaisant. »

« Ouvrons une bonne bouteille. Rien ne vaut le pétillement du champagne au fond de nos verres cristallins. Rien que de dire ‘pétillement’, je déguste déjà des bulles. »

« Moi, j’entends déjà nos coupes tinter lorsque nous les porterons l’une vers l’autre en célébrant notre rencontre. »

« Après nous pourrions analyser l’état du monde. Il ne faudra pas déranger Thérèse qui télétravaille. Nous devrons chuchoter. »

« Ou alors murmurer, ce qui serait encore plus discret. »

« C’est-à-dire qu’il y a déjà le vent qui murmure dans les peupliers derrière chez nous. Il ne faudra pas être trop nombreux à murmurer. »

« N’oubliez pas de mettre votre clignotant. J’aime bien ce tic-tac qui signale votre intention à l’égard des autres usagers. »

« Si je dis que je vais klaxonner, vous allez tout de suite vous boucher les oreilles car vous entendez déjà ce bruit infernal. »

« C’est vrai ! C’est extraordinaire comme de simples mots peuvent être bruyants ! »

« J’espère que Thérèse a préparé le repas. J’aime bien entendre les plats crépités sur le feu quand je pousse la porte. J’en salive d’avance. Mon gamin sera là, ne vous étonnez si vous ne comprenez rien de ce qu’il dit : c’est son âge. Vous n’entendrez qu’un simple bredouillement. »

« J’ai le même à la maison. C’est difficile de communiquer avec eux : ils ne savent que marmonner. »

« Sauf quand leur téléphone carillonne, ce qui les transforment immédiatement en personne humaine. »

« C’est dommage qu’on n’ait pas autant de mots pour nous dire ce que fait le silence. »

Serge et ses asperges

4 novembre, 2020

Sur la berge,

Dans l’auberge

Qui l’héberge,

Serge

Mange des asperges.

L’huile vierge

Les asperge.

A la lueur d’un cierge

Il gamberge

Avec le concierge.

Le QI

3 novembre, 2020

« Je suis très intelligent : j’ai un quotient intellectuel plus élevé que la moyenne. »

« Ah ! Mon pauvre, vous devez comprendre beaucoup de choses ! »

« Oui, on ne me raconte pas n’importe quoi à moi. Je suis capable de raisonnements très sophistiqués, tout en restant très modeste, évidemment. »

« Vous savez faire des lasagnes ? »

« Non, mais cela ne relève pas de l’intelligence, ce qui n’empêche pas que vos lasagnes sont délicieuses, je m’en suis régalé. »

« Donc quand on fait des choses délicieuses, on n’est pas intelligent ! »

« Ben non ! On est excellent cuisinier ! Moi, il faut me proposer des problèmes compliqués qui exigent une très grande agilité des neurones. Si vous croyez que ça me fait plaisir, je préfèrerais être un peu simple d’esprit comme vous. »

« C’est vrai que je ne réfléchis pas beaucoup. Je dis des choses complètement superficielles. Je suis très spontané. »

« Ne vous en faites pas. Vous avez un QI moyen, mais vous êtes nombreux dans ce cas. Vous pouvez donc parler à n’importe qui pour dire n’importe quoi. »

« … tandis que vous, il vous est difficile de trouver un interlocuteur qui dispose de votre intelligence, je compatis à votre difficulté. »

« Ne vous en faites pas, j’ai des ressources mentales qui me permettent de dire n’importe quoi aussi, mais il faut que je fasse plus d’efforts que vous. »

« Je vous plains. Les gens intelligents n’ont pas le droit de se tromper. Moi, je peux, tout le monde trouve ça normal. Et votre gamin, il va comment ? »

« Roger a un QI encore plus élevé que le mien. Je ne peux même pas l’aider à faire ses devoirs sans avoir l’air ridicule. »

« Il faut lui faire suivre un traitement : obligez-le à regarder la télé. Achetez-lui plein d’écrans et d’objets connectés pour l’abêtir encore plus. »

« Et vous comment vous vous en tirez avec votre petit QI ? »

« Je me débrouille. J’essaie de ne pas progresser dans l’intelligence. Je ne voudrais pas avoir autant d’ennuis que vous. »

« Arrêtez de lire, ça génère des idées. Dites-vous que les bouquins, ça ne sert à rien, c’est une perte temps. C’est en lisant que les problèmes commencent. »

« Vous avez raison. Un instant de réflexion est vite arrivé. »

« Accepter tout ce qu’on vous dit sans esprit critique. Répétez en boucle ce que vous entendez, c’est moins fatigant que se former sa propre opinion. »

« Je vais m’entraîner. Il faudrait que je me fasse muter dans le même bureau que Dugenou. Il n’y a aucun risque que je m’améliore à son contact. »

« Oui ! Si vous sentez votre Qi s’élever, venez me voir. On pourra peut-être parler intelligemment. »

Le grand cycle

1 novembre, 2020

« Nous sommes en pleine Renaissance ! »

« Vous vous trompez, cher ami. La Renaissance, c’était François 1er et ses artistes. »

« Oui, mais à notre époque, les valeurs de nos ancêtres reviennent en force : le respect de la nature, la vie à la campagne, l’exercice physique, la royauté… »

« Euh… vous vous trompez encore : on est en République ! »

« Oui, mais le Président fonctionne un peu comme le Roi avec sa cour… »

« Ce n’est pas faux. Dans un autre genre, vous avez vu que les pantalons « patte d’éléphant » reviennent à la mode. On va avoir l’air fin ! »

« C’est comme ça… Tout revient un jour ! Même le climat. Savez-vous qu’il y a eu beaucoup de périodes de réchauffement du climat dans l’histoire de la Terre ! »

« Ce n’est pas une raison pour ne pas trier vos déchets. »

« Et le vélo ? Vous avez vu, tout le monde veut un vélo comme au temps de ma mère. Un jour peut-être, on reviendra au temps de la draisienne. »

« N’exagérons pas ces rapprochements historiques. Aucun de nos ancêtres n’avaient inventé le PC, ma tablette ou le smartphone. »

« Oui, mais je vous fiche mon billet qu’un original va bientôt réinventer le téléphone à manivelle. Aujourd’hui, les gens veulent du vintage. »

« Vous avez raison. Bientôt, on communiquera par pigeon voyageur. Certains trouveront ça nettement plus écologique que le SMS ou le mail. »

« Et pourquoi ne pas remettre en circulation la Traction Avant, pendant qu’on y est ? Et l’inusable tricot de corps qu’on appelait le Marcel. Ce serait du dernier chic ! »

« Dans les familles, on pourrait organiser la résurgence des soirées artistiques. La jeune fille de la maison se mettrait au clavecin, tandis que la mère chanterait des airs légers. Un parterre d’amis convoqués applaudiraient laborieusement tout en s’ennuyant copieusement. »

« Remarquez, ce ne serait pas pire que de passer du temps devant les programmes débiles de la télé ou les matchs de la Ligue des Champions ! »

« Et les grandes épidémies qui reviennent de temps en temps, on en parle ? Ça aussi, ça fait partie du grand cycle de l’Univers. »

« En fait, ça ne sert à rien de dire que tout était mieux avant, puisque tout est cyclique. Autrement dit, si un cataclysme n’est pas encore arrivé, c’est qu’il va arriver ! » 

« C’est gai ! Certes, il y a des choses qui reviennent à l’ordre du jour, mais je ne partage pas trop une vision cyclique de l’Histoire. Nos ancêtres ne savaient pas communiquer d’un bout à l’autre de la Terre. Ils avaient tout à découvrir. »

« D’accord, mais nous aussi nous avons beaucoup à découvrir. Nous ne communiquons pas avec Mars, mais ça va venir. Nous avons aussi à découvrir toutes les planètes qui tournent autour de nous. On change de dimension, mais au fond on en est toujours au même point de l’ignorance humaine. »

« Vous exagérez mon cher. Nous faisons mieux que nos ancêtres dans de nombreux domaines. »

« Oui, mais eux faisaient des églises plus belles que les nôtres, ça, nous ne sommes pas près d’en faire autant. »

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