Le bruit

« Le vent mugit dans la plaine. »

« C’est une phrase très réaliste. On s’y croirait. »

« Décrire un bruit en littérature, c’est très compliqué. Heureusement nous avons pleine de verbes bruyants. Par exemple, votre voiture vrombit. »

« Effectivement, j’ai remarqué un bruit inquiétant, mais mon garagiste est confiné. »

« Et si je dis : la fontaine glougloute, n’avez-vous pas envie de vous y plonger tout de suite ? »

« Euh … j’entends ce bruit, maître ! Où est-on ? Sur la plage ? Car j’entends aussi les vagues qui clapotent ! »

« C’est bien possible car je vois tournicoter les mouettes qui criaillent. Ce cri strident ne vous agace-t-il pas les tympans ? »

« Si fait, maître ! Rentrons à la maison. Je préfère entendre les pigeons qui roucoulent. C’est un verbe agréable à l’oreille. »

« Vous avez raison, mais allons plutôt chez vous. Chez moi, Josiane va se plaindre de mon retard. Elle va gémir ou alors glapir, c’est selon les jours. »

« Il parait qu’elle a la voix qui chevrote, ce qui n’est pas non plus très plaisant. »

« Ouvrons une bonne bouteille. Rien ne vaut le pétillement du champagne au fond de nos verres cristallins. Rien que de dire ‘pétillement’, je déguste déjà des bulles. »

« Moi, j’entends déjà nos coupes tinter lorsque nous les porterons l’une vers l’autre en célébrant notre rencontre. »

« Après nous pourrions analyser l’état du monde. Il ne faudra pas déranger Thérèse qui télétravaille. Nous devrons chuchoter. »

« Ou alors murmurer, ce qui serait encore plus discret. »

« C’est-à-dire qu’il y a déjà le vent qui murmure dans les peupliers derrière chez nous. Il ne faudra pas être trop nombreux à murmurer. »

« N’oubliez pas de mettre votre clignotant. J’aime bien ce tic-tac qui signale votre intention à l’égard des autres usagers. »

« Si je dis que je vais klaxonner, vous allez tout de suite vous boucher les oreilles car vous entendez déjà ce bruit infernal. »

« C’est vrai ! C’est extraordinaire comme de simples mots peuvent être bruyants ! »

« J’espère que Thérèse a préparé le repas. J’aime bien entendre les plats crépités sur le feu quand je pousse la porte. J’en salive d’avance. Mon gamin sera là, ne vous étonnez si vous ne comprenez rien de ce qu’il dit : c’est son âge. Vous n’entendrez qu’un simple bredouillement. »

« J’ai le même à la maison. C’est difficile de communiquer avec eux : ils ne savent que marmonner. »

« Sauf quand leur téléphone carillonne, ce qui les transforment immédiatement en personne humaine. »

« C’est dommage qu’on n’ait pas autant de mots pour nous dire ce que fait le silence. »

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