Economie circulaire
28 juin, 2020« Tout déchet humain ou matériel inspire du dégout. »
« Le petit problème, c’est que rien ne fonctionne sans rejeter des ressources excédentaires, inutiles ou non assimilables. Par exemple votre voiture rejette plein de machins polluants. »
« La grande distribution rejette aussi des produits qui ont dépassé la date de consommation. Heureusement, on en sauve aujourd’hui une partie pour les déshérités. »
« C’est vrai aussi des systèmes humains. Au début des temps, il y avait des guerres pour un oui ou un non qui éliminaient les plus faibles. »
« Aujourd’hui, nos économies repousse des gens qui ne sont pas assez qualifiés pour travailler. On les appelle les chômeurs ou les exclus. »
« En fait, tout ce qui ne correspond pas à la logique du système est mis au rebut. A l’école, ceux qui n’apprennent pas leurs leçons sont mal considérés. »
« Même le temps qui passe génère des gens plus faibles en produisant des personnes âgées. »
« En fait tout ce qui est rejeté inspire une sensation de répulsion. Le progrès consiste à penser qu’on peut en faire encore quelque chose. Les gens qu’aucun déchet ne rebutent ont notre avenir entre leurs mains. »
« Est-ce une fatalité, maître ? »
« Non, l’homme cherche à lutter contre ce phénomène par l’économie circulaire en recyclant les objets rejetés. Mais c’est encore marginal. »
« En fait, il faudrait trouver le système idéal qui fonctionne sans rien rejeter. »
« Je ne vois guère que le grand cycle de la nature. Les arbres, les fleurs naissent, vivent et meurt sans rien polluer par leur rejet. Au contraire, leur décomposition fournit un terreau qui favorise leur renaissance. Par l’économie circulaire, les hommes tentent d’imiter ce processus. »
« Et la télé ? »
« La télé, c’est pareil. On a l’impression qu’elle ne peut pas fonctionner sans produire des émissions bas de gamme. »
« En fait la qualité d’un système, c’est la qualité des déchets qu’il produit. On peut recycler une bouteille en plastique, mais recycler une émission de télé débile, c’est plus compliqué. »
« Pourrait-on élargir votre théorie des déchets au monde artistique, maître ? »
« Non, malheureusement, l’argent intervient. Parmi les œuvres d’art exclues de toute exposition ou publication, il y a peut-être des œuvres somptueuses qui n’ont pas trouvé leur financement. On arrive à un paradoxe qui est que des éléments rejetés par le système peuvent être de meilleure qualité que des éléments intégrés. »
« J’en conclus donc que s’il y a des déchets, c’est qu’il y a des systèmes et pour qu’un système existe, il faut qu’il réponde à une demande, elle-même générée par l’argent, le profit ou la mode (c’est-à-dire finalement n’importe quoi). »
« En gros, nos déchets sont la conséquence de nos vanités et le progrès humain consiste à escamoter nos gamineries en récupérant nos déchets pour en faire quelque chose de bien. C’est comme si je casse un vase pour le plaisir et que je m’en foutais parce que j’ai inventé la colle miracle pour le réparer. Malheureusement, on n’a pas encore la bonne colle pour tout. »