Archive pour juin, 2020

Une belle soirée

30 juin, 2020

« Pourquoi me parlez-vous d’un air pincé ? »

« C’est normal, nous sommes dans une partie de pince-fesses, nous devons nous parler d’un air distingué, cher ami ! »

« Pourquoi m’appelez-vous ‘cher ami ‘ ? Nous ne sommes pas amis. »

« Si ! Dans une réception de qualité, nous sommes tous des chers amis. Et quand je vous parle, vous devez avoir l’air souriant. »

« Pourquoi vous esclaffez-vous ? Je n’ai rien dit de drôle. »

« C’est obligatoire. Dans une telle soirée, il faut s’esclaffer bien fort pour avoir l’air d’un joyeux compagnon qui passe une bonne soirée. »

« Pourquoi dites-vous que vous revenez de los Angeles ? »

« Il faut toujours avoir l’air de revenir d’une destination lointaine. On donne l’impression de mener des affaires de niveau international. Je ne vais tout de même pas vous dire que je reviens de Montélimar. Ce serait mesquin. »

« Pourquoi dites-vous que vous avez vu le Président, la semaine dernière ? »

« Non pas moi ! J’ai un ami qui est passé en coup de vent à l’Elysée. Il avait été appelé en consultation par le Président. »

« Ah bon, c’est vrai ? »

« Non, mais il est indispensable de toujours avoir un ami qui a fait quelque chose de grand. Comprenez-vous ? Il s’agit d’asseoir sa crédibilité. »

« Moi, j’ai bien mon ami Marc qui est monté à la Tour Effel, la semaine dernière. Ça compte ? »

« Non, pas du tout. Cherchez mieux ! Vous avez sûrement croisé quelqu’un d’important ! »

« Non, pas vraiment. J’ai bien mon copain Maurice qui joue de l’harmonica dans les bals du samedi soir, mais je sens que ça ne va pas le faire. Pourquoi toutes les femmes portent-elles des diamants autour de nous sur leurs poitrines opulentes ? »

« Ce sont des faux. Je parle des diamants. Personne n’ira vérifier. En général, elles les achètent sur Amazon ou la Redoute. »

« Pourquoi ce sont les plus jolies femmes qui sont les plus entourées ? »

« Vous n’avez pas bientôt fini avec vos questions idiotes ? Ceux qui entourent les plus belles fantasment sur leurs décolletés. Les moches doivent avoir de l’esprit pour être cernée. Si vous voyez une moche qui attire beaucoup d’hommes, précipitez-vous, vous allez vous marrer. »

« Nous pourrions peut-être nous parler en riant fort et en nous tapant sur le ventre, ça m’arrangerait ! »

« Non, je n’y tiens pas. J’ai une réputation. Dans ce genre de soirée, chacun tient le compte de qui tape sur le ventre de qui. Et comme vous n’êtes pas connu… »

« Justement, grâce à vous, je pourrais être célèbre sans me fatiguer. »

« A propos, vous avez un carton d’invitation ? »

Six !

29 juin, 2020

A Cassis

Clarisse

Boit du cassis

Dans une bâtisse.

Narcisse

Lui offre des narcisses

Et une génisse.

Puis ils mangent des saucisses.

Economie circulaire

28 juin, 2020

« Tout déchet humain ou matériel inspire du dégout. »

« Le petit problème, c’est que rien ne fonctionne sans rejeter des ressources excédentaires, inutiles ou non assimilables. Par exemple votre voiture rejette plein de machins polluants. »

« La grande distribution rejette aussi des produits qui ont dépassé la date de consommation. Heureusement, on en sauve aujourd’hui une partie pour les déshérités. »

« C’est vrai aussi des systèmes humains. Au début des temps, il y avait des guerres pour un oui ou un non qui éliminaient les plus faibles. »

« Aujourd’hui, nos économies repousse des gens qui ne sont pas assez qualifiés pour travailler. On les appelle les chômeurs ou les exclus. »

« En fait, tout ce qui ne correspond pas à la logique du système est mis au rebut. A l’école, ceux qui n’apprennent pas leurs leçons sont mal considérés. »

« Même le temps qui passe génère des gens plus faibles en produisant des personnes âgées. »

« En fait tout ce qui est rejeté inspire une sensation de répulsion. Le progrès consiste à penser qu’on peut en faire encore quelque chose. Les gens qu’aucun déchet ne rebutent ont notre avenir entre leurs mains. »

« Est-ce une fatalité, maître ? »

« Non, l’homme cherche à lutter contre ce phénomène par l’économie circulaire en recyclant les objets rejetés. Mais c’est encore marginal. »

« En fait, il faudrait trouver le système idéal qui fonctionne sans rien rejeter. »

« Je ne vois guère que le grand cycle de la nature. Les arbres, les fleurs naissent, vivent et meurt sans rien polluer par leur rejet. Au contraire, leur décomposition fournit un terreau qui favorise leur renaissance. Par l’économie circulaire, les hommes tentent d’imiter ce processus. »

« Et la télé ? »

« La télé, c’est pareil. On a l’impression qu’elle ne peut pas fonctionner sans produire des émissions bas de gamme. »

« En fait la qualité d’un système, c’est la qualité des déchets qu’il produit. On peut recycler une bouteille en plastique, mais recycler une émission de télé débile, c’est plus compliqué. »

« Pourrait-on élargir votre théorie des déchets au monde artistique, maître ? »

« Non, malheureusement, l’argent intervient.  Parmi les œuvres d’art exclues de toute exposition ou publication, il y a peut-être des œuvres somptueuses qui n’ont pas trouvé leur financement. On arrive à un paradoxe qui est que des éléments rejetés par le système peuvent être de meilleure qualité que des éléments intégrés. »

« J’en conclus donc que s’il y a des déchets, c’est qu’il y a des systèmes et pour qu’un système existe, il faut qu’il réponde à une demande, elle-même générée par l’argent, le profit ou la mode (c’est-à-dire finalement n’importe quoi). »

« En gros, nos déchets sont la conséquence de nos vanités et le progrès humain consiste à escamoter nos gamineries en récupérant nos déchets pour en faire quelque chose de bien. C’est comme si je casse un vase pour le plaisir et que je m’en foutais parce que j’ai inventé la colle miracle pour le réparer.  Malheureusement, on n’a pas encore la bonne colle pour tout. »

Les agents du roi

27 juin, 2020

Sire !

Je veux vous dire :

Soyez en ire.

Vos sbires

Sont les pires.

Dans leurs mires

Ceux qui savent lire

Et rire.

Ils tirent !

Où est le troupeau de Sylvain ?

26 juin, 2020

Sylvain,

Un Angevin,

Est un écrivain

Divin

Et chauvin.

Ses bovins

Et ses ovins

Sont dans le ravin,

Sur le pré du devin.

Transparence

25 juin, 2020

« Soyons clair ! Comme le ciel bleu d’un petit matin d’été. »

« Vous avez raison ! Je dirais même : soyons transparents ! N’ayons pas de secret les uns pour les autres ! »

« Le petit problème, c’est qu’on a tous un coin sombre. Je n’ai pas tellement envie que vous sachiez que je truande sur ma déclaration de revenus. »

« Je ne peux pas non plus vous dire que je mate votre femme dans son jardin. »

« Bon ! Alors… Disons qu’il faut être clair sauf sur tout ce qui est dans notre coin sombre. Par exemple, je vais vous dire que je prendrai des carottes râpées à la cantine. Hop ! Sans hésiter ! »

« Très bien ! Moi, j’annonce que je vais chez ma belle-mère dimanche prochain. »

« D’accord, mais ça ne m’intéresse pas tellement. Finalement, je trouverai beaucoup plus excitant ce que vous avez dans votre jardin secret et sombre. »

« C’est étonnant ! On arrive à parler de tout, sauf de ce qui est gênant. »

« Le mieux, c’est de parler des autres, comme ça nous ne sommes pas obligés d’ouvrir notre boite à secrets. »

« Oui, par exemple, on pourrait parler des petits secrets de Dugenou. Puisqu’il n’est pas là, ça ne peut pas lui porter tort et nous, ça nous fait du bien. »

« Par exemple, on sait qu’il sort avec Gisèle du service informatique. Ils se cachent, mais tout le monde le sait. Ils feraient mieux de s’afficher franchement. »

« Ce ne serait quand même pas très compliqué de nous dire qu’il trompe sa femme avec Gisèle. On ne lui demande rien d’extraordinaire ! »

« Vous avez raison ! Qu’est-ce que c’est que ces cachotteries ? J’ai horreur de ces gens qui ne sont jamais transparents ! »

« Ça ne doit pas aller très fort avec Thérèse Dugenou ! Il faudrait qu’il en parle au lieu de tout garder pour lui. En plus, il a eu le culot de m’interroger sur l’ambiance dans mon ménage ! »

« C’est un pervers qui avance masqué ! On aimerait un peu de clarté !

« Si on continue comme ça, on n’aura plus un ragot à se raconter à la cantine ! »

« Et vous ? Avec Josiane, ça va ? S’il y a un problème, n’hésitez pas à nous le dire ! Vous savez que nous sommes disponibles pour tout commentaire utile. »

« Euh… non je n’ai pas tellement envie d’en parler. »

« Ah ! Ah ! J’en étais sûr la transparence, ça vous gêne, hein ! »

« Non, mais tout le monde le sait que la transparence, c’est surtout pour les autres ! Moi, je n’aime pas trop qu’on se mêle de mes affaires. »

« Moi, non plus. Le mieux serait d’admettre que nous sommes programmés pour parler de ce qui ne nous regarde pas chez les autres. Alors, il faudrait qu’ils s’y fassent et qu’ils nous facilitent les choses en faisant preuve de transparence. »

« Vous avez raison ! Qu’on tienne compte de notre indiscrétion naturelle ! Qu’on tienne compte de notre besoin de faire courir des ragots sur le dos des autres ! »

Italianismes

24 juin, 2020

Après son concerto,

La cantatrice

Veut des chipolatas

Et un capuccino.

Son imprésario

Vit sur un matelas

Incognito

Dans sa mezzanine.

Il  mange du gorgonzola.

C’est un paladin.

L’habit fait le moine

23 juin, 2020

« Vous avez vu comment vous êtes attifé ? »

« Qu’est-ce qui ne va pas ? »

« Votre béret dans une réunion géostratégique avec les japonais, devant la ministre ! »

« C’est-à-dire qu’il y a des courants d’air dans le couloir qui me font froid à la tête. Je suis assez sensible de ce côté-là. »

« Et vos bermudas, c’est pour aérer les mollets ? La ministre est intéressée ? »

« Parfaitement, il faut savoir casser les codes. Elle l’a dit elle-même. »

« Il n’empêche, vous êtes le seul conseiller à ne pas être habillé comme un pingouin. Vous comptez faire carrière dans la haute fonction publique ? »

« Pourquoi pas ? L’habit ne fait pas le moine. »

« Mais il y contribue fortement. En fait, pour être crédible sur les questions économiques, il faut avoir la tête de l’emploi et des vêtements sobres, c’est-à-dire moches. La question du confort de vos vêtements n’a pas à être posée ! »

« On en est encore là ? »

« Oui. Vous êtes jugé sur votre apparence physique. Vous ne pouvez pas parler de la croissance et du chômage en débraillé, ça ne se fait pas. »

« C’est dommage, ça mettrait les gens plus à l’aise si j’étais habillé comme eux. »

« Non, il faut avoir l’air d’un expert qui a fait de très longues études. Et un expert ça porte un complet sombre, une chemise blanche et une cravate à la couleur innommable. »

« Et je peux sortir mon jean ? »

« Non plus, vous allez avoir l’air d’un vieux beau qui veut faire jeune. C’est encore pire ! »

« C’est fou ! On croit ou on ne croit pas les gens en fonction de la manière dont ils sont habillés ! »

« Evidemment, nigaud ! Si les présentatrices de la météo ne sont pas habillées de manière ultrasexy comment voulez-vous avoir confiance dans leurs prévisions ? »

« Effectivement, je suis tout de suite plus intéressé par le dérèglement climatique depuis qu’elles nous en parlent. »

« Et le président ? Croyez-vous qu’il puisse parler à la télé en étant attifé de manière ridicule ? Pourquoi pas un chapeau pointu et un tee-shirt rouge à pois verts ? »

« Non, bien sûr. Pour les tee-shirts, il faut avoir des pectoraux ! »

« Qu’aurait-on dit si Louis XIV s’était habillé comme un manant ? Comment voulez-vous construire le palais de Versailles en se baladant en haillons ? »

« Oui, peut-être, mais il aurait gagné la sympathie de ses sujets. »

« Je vous rappelle aussi que votre allure vestimentaire doit refléter l’esprit de sérieux avec lequel vous abordez les problèmes ; alors si vous pouviez laisser votre veste fluo à la maison… »

« C’est donc ainsi que ça se passe : c’est l’habit qui fait le moine ! Ou plutôt le moine est prié de revêtir l’habit de moine ! »

Petit génie

22 juin, 2020

« Il faut toujours que je la ramène. »

« Oui, c’est agaçant. »

« Ce n’est pas de ma faute si j’ai un avis pertinent et péremptoire sur tout. »

« Vous n’êtes pas très modeste. »

« Vous voudriez peut-être que je laisse les autres dans l’ignorance de mon savoir, alors que je peux leur rendre tant de services ? »

« Oui, je serais curieux de savoir si le monde s’arrête de tourner quand vous gardez vos conseils pour vous ! »

« Moi qui n’ai pour but que de rendre service, je suis bien déçu. »

« Vous souffrez ? Votre maman ne vous donnait pas assez à manger ? »

« Pourquoi dites-vous ça ? »

« Parce que souvent, les gens qui se croient indispensables et supérieurs aux autres souffrent d’un manque affectif qui remonte loin dans le temps. »

« Ne vous inquiétez pas, maman me nourrissait, sauf entre les repas, il m’était interdit d’ouvrir le frigo sous peine de privation de dessert. »

« Je m’en doutais. Et à l’école ? »

« J’étais tellement intelligent que je répondais toujours juste aux questions de la maîtresse. Les autres ne m’aimaient pas tellement et me cassaient la figure à la récré. »

« Mon pauvre ami, vous êtes un mal aimé. »

« Ne m’en parlez pas : quand j’ai voulu courtiser Fernande à 18 ans, elle m’a regardé d’un œil où flottait une onde de mépris. Elle préférait sortir avec Roger. »

« Vous êtes un vrai looser. »

« Oui, c’est comme ça que j’ai eu le temps de potasser le dictionnaire, ce qui m’a permis d’avoir un avis sur tout ! »

« Au bureau, vous avez pu vous distinguer ! »

« Absolument, la direction compte beaucoup sur moi. Les autres beaucoup moins. Je ne suis pas le bienvenu dans les conversations de machine à café. »

« Même avec Dugenou ! »

« Non, Dugenou m’aime bien. Je peux parler avec lui et faire étalage de mes connaissances. Comme il ne sait rien, c’est assez facile. »

« Et Mollard ? »

« Mollard ne me supporte pas, c’est clair. Chaque fois que nous avons une controverse, c’est moi qui ai raison, ça le rend malade. »

« Vous pourriez faire exprès d’avoir tort pour lui permettre de redresser votre opinion. En général, quand on peut corriger quelqu’un qui croit tout savoir, on le trouve plutôt sympathique. C’est comme s’il devenait humain. »

En 3 lettres maxi

19 juin, 2020

L’âme

Du Hun

Agé

A

Emu

L’âne

Et l’oie.

Où ?

A Spa.

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