Archive pour février, 2020
Les funérailles du cordonnier
7 février, 2020Vieux ?
6 février, 2020« Je suis une personne âgée. »
« Vous voulez que je vous cède ma place assise ? »
« Non, parce que ni vous ni moi savons si je suis plus âgé que vous. On devrait se balader avec une étiquette qui indique notre âge ce serait plus clair ! »
« C’est une drôle d’idée, je me fiche un peu de votre âge. »
« Vous avez tort, c’est stupéfiant. A 70 ans, ceux qui m’ont connu à 20 ans, me reconnaissent encore. Je fais très jeune. »
« C’est bien le problème : avec toutes les crèmes qu’on vend maintenant on ne sait plus si on parle à un vieillard ou à un gamin. »
« Vous n’en mettez pas ? Vous faites vraiment âgé. »
« Pourquoi tricher ? Dans toutes les civilisations, les personnes âgées sont respectées en raison de leur grande expérience de la vie. »
« C’est-à-dire que pour avoir une place assise dans un bus, l’expérience de la vie, ça ne sert pas à grand-chose. Les gens ne sont guère courtois. Il vaut mieux savoir jouer des coudes. »
« Peut-être que je risque de rester debout, mais ça ne m’empêche pas de me sentir moins bête que les gens qui luttent pour s’asseoir. »
« Et vos rides, ça ne vous gêne pas ? Moi, j’ai un excellent anti-rides. »
« Moi, j’aime bien mes rides au coin des yeux, ça donne une sorte de sourire malicieux, dans le genre : on ne me la fait pas. »
« Vous êtes un malicieux âgé … et fatigué… »
« Non, mes rides me donnent aussi l’air du vieux loup de mer qui a bourlingué un peu partout, cela peut être très sexy. »
« Et votre silhouette ? La canne, le déambulateur, c’est pour bientôt ? »
« C’est vrai qu’il faut faire un peu d’activité physique. J’essaie d’entretenir le matériel pour qu’il dure le plus longtemps possible. »
« Qu’est-ce que ça va être quand on vieillira tous jusqu’à 120 ans. Parfois, j’ai une vision apocalyptique : une armée de déambulateurs qui descendent le boulevard en rangs serrés… »
« Remarquez que certains sont vieux à quarante ans voire moins. Quand on n’a plus de rêves ou d’imagination, la vieillesse c’est un mal qui s’attrape facilement. »
« C’est vrai, mais dans notre société, il n’y a plus grand-chose qui fasse appelle à la créativité des gens. Ni à l’école, où l’essentiel est d’apprendre, ni au boulot où il faut faire ce qu’on vous dit, ni au chômage où il faut trouver un boulot pour que vous puissiez faire ce qu’on vous dit… »
« Si bien qu’on va vers une civilisation de jeunes vieillards ! »
« Ne soyons pas pessimistes. Celui qui est vieux jeune peut retrouver de la jeunesse quand il est vieux grâce à une bonne crème antivieillissement. »
« C’est bien ce que je disais : tout se mélange, on ne sait plus qui est vieux ou jeune ! »
Dix nuances de bleu
5 février, 2020Finalement, je ne vais pas parler d’amour
4 février, 2020« Je suis le réalisateur du film. Charlotte vient de vous quitter pour Alexandre. Qu’est-ce que vous faites ? »
« Je vais casser la figure d’Alexandre. »
« Non, pas du tout. »
« Je vais me saouler pour noyer mon chagrin. »
« Non plus. Vous manifestez votre grandeur d’âme. Vous allez voir Charlotte. Vous lui dites que l’important c’est qu’elle soit heureuse et vous vous retirez dignement. »
« Vous êtes sur ? C’est plutôt rare comme réaction…. Après, je peux me rabattre sur Valentine pour me consoler ? »
« Vous essayez, mais vous vous prenez un râteau, parce Valentine se sent outragée que vous ayez pu la considérer comme un second choix. »
« Bon, alors je ne fais rien. Je regarde le temps qui passe avec de la nostalgie dans le cœur, en me souvenant de tous les bons moments passés avec Charlotte. »
« Non, là, vous allez bousiller mon film. Il y a un rebondissement. Vous apprenez que le nouvel amoureux de Charlotte est une fripouille. Dès lors un dilemme s’empare de vous. Vous lui dites ou vous ne lui dites pas ? »
« Je lui dis. »
« Sûrement pas. Vous allez passer pour le mec petit, bas, qui cherche à prendre une revanche. Par conséquent, Charlotte ne vous croira pas. »
« D’accord ! Alors je ne lui dis pas que son mec est un gangster. J’attends qu’elle s’en rende compte et je la ramasse en morceaux ou pas.»
« Non plus. Vous faites intervenir votre copains Charles. Sans en avoir l’air, vous lui apprenez que le mec de Charlotte est un affreux brigand. Et lui, il en fait part à Charlotte. »
« Charlotte le croit et elle me revient en pleurs. »
« Non. C’est trop simple. Je ne réalise pas un navet. Il se trouve que chemin faisant, vous êtes tombé amoureux d’Anaïs. »
« Ah mince ! C’est la cata ! Alors je fais quoi ? Je largue Anaïs. »
« Non… enfin pas tout de suite. Ce serait d’un cynisme épouvantable. Vous expliquez à Charlotte que le temps passe… que vous ne pouviez l’attendre éternellement … que vous êtes bien désolé ! »
« Et là, elle se suicide ? »
« Non, ça c’est dans les mauvais film. Elle veut voir Anaïs. A contre-cœur, vous lui présentez. Elle a une réaction pleine de noblesse en vous souhaitant beaucoup de bonheur. »
« Et là, je m’aperçois que c’est Charlotte que j’aime. On revient au point de départ et c’est comme s’il n’y avait pas eu de film. »
« Finalement, je vais faire un policier, c’est beaucoup plus simple. »
Jo, le porteur
3 février, 2020Une machine pratique
2 février, 2020« Allez ! Hop ! Au bloc ! »
« Mais qu’est-ce que j’ai fait ? »
« Vous ne pensez pas comme il faut ! C’est très grave ! »
« Comment savez-vous ce que je pense ? »
« Nous avons un rayon XYZ qui analyse ce que pensent tous les gens qui passent sur ce trottoir ! C’est scientifique ! Vous n’avez rien à dire ! »
« Mais j’étais en train de penser à ma sœur ! »
« Vous suggérez que notre technologie ne marche pas ? A d’autres ! C’est très grave ! Vous pensiez peut-être à votre sœur, mais elle pensait sûrement de manière subversive. »
« Non, pas du tout ! Ma sœur est d’accord sur tout ce que décide le gouvernement, même sur la baisse des allocations familiales ! Avec cinq gosses, il faut le faire ! »
« Vous deviez y penser de manière sarcastique, car le bouton « sarcasme » s’est allumé. »
« Pourtant, j’écoute les journaux télévisés et je crois tout ce que disent les présentateurs. »
« Oui, mais de toute évidence, vous avez quand même des doutes dans un coin de l’esprit. La machine ne se trompe pas, elle a détecté un soupçon de doute. Il est interdit de douter ! »
« J’ai peut-être quelques réserves sur la politique économique du gouvernement… »
« Quelques réserves ? Vous voulez rire ! Vous avez failli détraquer la machine tellement vous en avez ! Vous savez ce que ça coûte une machine comme ça ? »
« Si je comprends bien, il ne faut pas dévier de la pensée unique ? »
« Ah ! Il commence à comprendre ! Bon… Vous avez de la chance, le bouton « révolution » ne s’est pas allumé. Vous n’êtes qu’un petit rebelle qui ne pense qu’à sa sœur. »
« Ouf ! J’échappe au camp de rééducation ! »
« Oui, pour cette fois, mais un petit stage pour récupérer vos points de bon citoyen ne vous fera pas de mal. »
« Parce qu’il y a un système de points ? »
« Comment, vous n’êtes pas au courant ! Ils en ont pourtant parler au Journal Télévisé ! On vous attribue 12 points le jour où vous passez votre brevet des collèges et chaque fois que vous pensez mal … Hop ! Trois points en moins et à zéro point, stage de rattrapage ! »
« Avec votre machine à détecter les pensées déviantes, vous devez en remplir des stages ! »
« Vous ne pouvez pas savoir ! Mais ne vous inquiétez pas, nous avons aussi une machine à encaisser les pots-de-vin. On introduit un peu d’argent et ça produit de nouveaux points. »
« C’est pratique, mais ne trouvez-vous pas le procédé un peu cynique ? »
« Vous avez dit cynisme ? Alors là, vous n’avez pas de chance : dans la cadre de sa grande réforme, le gouvernement vient d’inventer les points négatifs ! Je vous signale que vous êtes à moins 4 points.»
« Il ne manquait plus que ça ! »