Les esclaves

« Nous sommes des esclaves. »

« Ah bon ?  De qui ? De quoi ? »

« La télé qui nous dit quoi penser, le Jour de l’An qui nous oblige à picoler, le téléphone qu’il faut avoir même quand on ne parle à personne… »

« En effet, mais ça ne date pas d’aujourd’hui. Au Moyen-Age, le noble était plutôt voué à faire la guerre, et la femme à faire des enfants. »

« Nous sommes aussi les esclaves des robots. Bientôt, j’aurais le maître à la maison qui me dira à quelle heure me lever et qui me sortira du lit à coups de pied dans le derrière. »

« Remarquez, moi ça ne me changera pas tellement. Josiane n’aime pas que je m’offre des grasses matinées. »

« Ensuite le maître m’obligera à manger des trucs sans saveur pour que je ne grossisse pas comme un porc et que mon rendement au boulot ne soit pas en baisse. »

« Oui, ça prend ce chemin. Au bureau, le chef de la cantine utilise un programme pour nous faire des menus soi-disant équilibrés. Le résultat, c’est qu’il a supprimé le jour de la choucroute. »

« On est mal, on est mal. Il parait que les japonais ont déjà mis au point le programme qui achètera sur Internet le cadeau qui vous fera obligatoirement plaisir pour Noël ! »

« Bon ! Si nous prenions la tête de la révolte des nouveaux esclaves ? »

« On pourrait commencer par virer tous nos écrans de chez nous et revenir aux veillées au coin du feu pendant lesquelles les anciens racontent des histoires du temps jadis. »

« Oui… mais non. J’ai une page Facebook très intéressante. Vous ne trouvez pas ?  Et mes gamins vont râler … à quoi vont-ils jouer ? »

« Et voilà ! Ils sont esclaves de leurs écrans et vous vous êtes esclaves de vos gamins. On ne va pas s’en sortir. »

« C’est vrai qu’on est tous esclaves de quelqu’un. Même le président de la République est esclave de son personnage. Si tous les esclaves se révoltent, ça va être un beau bazar ! »

« Dans la grande chaîne des esclaves, j’ai l’impression d’être le dernier, c’est-à-dire l’esclave ultime, autrement dit l’esclave qui n’a pas d’esclave. C’est très frustrant. »

« Allons, allons ! Pas de pessimisme, vous avez votre chat qui vous obéit au doigt et à l’œil. »

« On voit bien que ce n’est pas vous qui êtes obligé de vous lever à deux heures du matin quand môssieur a faim ! »

« Il faudrait rétablir un marché aux esclaves. On y vendrait par exemple des téléphones sans écran qui nus obéiraient au doigt et à l’œil sans qu’on soit obligés de les regarder continuellement ! »

« Ensuite on y trouverait aussi des stylos qui marchent et des blocs de papier à lettre. Nous pourrions écrire quand nous en avons envie, au lieu d’être obligé d’envoyer des SMS bourrés de fautes d’orthographe aux copains ! »

« Vous avez raison ! Le pire c’est que c’est nous qui payons toutes les choses qui nous dominent et c’est nous qui en devenons les esclaves. »

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