Un aventurier
8 décembre, 2019« Je vais m’exiler au bout du monde. »
« Ah bon ? Vous êtes fâché ? »
« Non, mais ici je paie trop d’impôts. »
« Oui, mais enfin, l’école, la santé, c’est presque gratuit. »
« Euh … ça ne va peut-être pas durer longtemps. Et puis, je trouve que je ne suis pas assez considéré. J’ai l’impression d’être un pion. »
« Vous êtes un pion qui mange à sa faim et qui a un toit sur la tête pour dormir tranquillement. »
« Vous êtes satisfait de pas grand-chose. Moi, je veux me sentir vivre pleinement : traverser le désert à dos de chameau ou alors découvrir la dernière civilisation inconnue. »
« Bon, mais chez nous, vous pouvez aussi vous sentir quelqu’un. Faire du bénévolat, distribuer de la soupe aux pauvres… »
« Vous ne comprenez rien : je suis un aventurier ! J’ai besoin d’aventures. Vivre 6 mois dans une cabane de trappeur en Sibérie, voilà qui serait à ma hauteur, par exemple. »
« Se donner des sensations exotiques, ce n’est pas à la portée de toutes les bourses. Le romantisme du voyage, ça se paie. »
« Vous ramenez tout à des questions d’argent. Je n’irai peut-être pas au bout du monde, mais moi, au moins j’en rêve. Vous, demain, en prenant votre petit métro du matin, vous penserez à rentrer vos petits géraniums ou acheter votre petite baguette en rentant le soir. »
« Je me trouve bien ici. Je peux aller et venir librement. Je peux dire et lire n’importe quoi sans être inquiété. En gros, ça s’appelle la liberté. »
« Pff… c’est décourageant. Si tout le monde avait l’imagination aussi plate que vous, Jules Vernes et Victor Hugo n’auraient rien écrit. Vous vous rendez compte ! Vous avez failli nous faire rater Jules Vernes et Victor Hugo. »
« Désolé, je ne me rendais pas compte. Je vais faire un effort. »
« Bon, on va essayer : où allez-vous en vacances ? »
« A Palavas-les-Flots, mais cette fois je ne vais pas lambiner : je m’achèterais des brassières gonflables et je vais à l’eau ! Sans hésiter !»
