Il faut savoir se battre

« Je vais me battre. »

« Vous voulez vous battre contre qui ? »

« Je ne sais pas, mais il faut que je montre que je suis un battant. Maintenant, c’est comme ça qu’il faut être. Vous ne voudriez pas vous battre contre moi ? »

« Euh… L’ennui, c’est que je vous aime bien, moi. Il nous faudrait un sujet de discorde. »

« Vous avez raison. Prenons le Brexit. Vous êtes pour ou vous êtes contre ? »

« Oh, vous savez, les anglais ils peuvent faire ce qu’ils veulent, je m’en fiche un petit peu. »

« Ah mince ! Vous pensez comme moi, ça ne va pas le faire ! On pourrait parler de la baisse des impôts, mais je suppose que vous êtes pour, aussi. Vous n’êtes pas très original. Je suis déçu. »

« Le mieux pour se déchirer, ce serait que nous ambitionnons tous les deux la même chose. Par exemple, vous avez sûrement envie de ma place de parking. »

« Non, j’habite tout près. Je viens à pied. C’est compliqué de se battre avec vous. D’autant plus que vous êtes d’un commerce très agréable. Je vais essayer de m’empoigner avec Dugenou. »

« Faites gaffe, il est très conciliant. »

« Ah bon ? Alors je pourrais essayer de revendiquer le bureau de Thérèse. Elle va très mal le prendre. »

« Oui, ce serait bien. Voulez-vous que je prenne parti pour vous ? Je demanderai à Dugenou de soutenir Thérèse, ça devrait faire une belle bataille. »

« Euh… mais j’y pense : son bureau est à côté de celui du patron. Moi, je veux bien me battre, mais je ne veux pas d’ennuis ! »

« Vous n’êtes pas au courant ? Il n’existe pas beaucoup de vainqueurs de batailles qui n’aient pas affronté quelques dangers ! »

« Vous êtes sûr ? Voilà qui ne m’arrange pas. Je préfèrerais me battre dans un combat sans risque. Vous n’avez rien dans ce genre ? »

« Ecoutez, le chef du service juridique part à la retraite. Battons-nous tous les deux pour avoir le poste. Comme je n’en ai aucune envie, je ferai semblant de me battre, j’ourdirai un complot odieux contre vous, vous le déjouerez habilement et vous triompherez. Bien sûr, je ferai semblant d’être plein d’amertume. Je ne vous parlerai plus pendant six mois au moins ; ça vous va ? »

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