L’art de la décision

« Je ne suis pas un mou du genou, moi ! Je suis un être décisif ! »

« Autrement dit, vous savez prendre des décisions ! »

« Non, pas du tout ! Je suis ce qu’on appelle au foot un passeur décisif. Je prépare les décisions. Ensuite je passe la balle au buteur final. »

« Ce n’est pas trop frustrant ? »

« Pas du tout. C’est très tranquille. Si l’équipe échoue, c’est la faute du buteur final. Moi, j’ai fait mon job ! »

« Et votre patron ne vous reproche jamais vos décisions. »

« Non, quand il réussit son coup, il dit que c’est grâce à son charisme et à son intelligence stratégique. Quand il le manque, je lui dis qu’il n’a pas tenu compte de mes propositions. »

« Et à la maison, ça se passe comment ? »

« A la maison, c’est comme au boulot. Pour avoir la paix il suffit de donner à sa femme ou à son patron que c’est eux qui prennent les décisions. »

« Et vous faites comment ? »

« Je leur prépare un choix entre deux solutions : une pourrie et celle que je veux voir mise en œuvre. »

« Oui, mais ils vont finir par s’apercevoir de votre manœuvre ! »

« J’ai une parade : je prépare deux solutions pourries. Ils disent que toutes mes solutions sont pourries. Alors je baisse la tête, je leur dis qu’ils ont raison et qu’ils sont d’une grande sagacité. Puis, je présente le bon projet ! »

« C’est consternant ! »

« Peut-être, mais c’est une école d’humilité ! »

« Si je comprends bien, vous préférez être celui qui prend des décisions dans l’ombre. »

« Evidemment ! Si je voulais être celui qui prend la décision finale, je m’exposerais aux basses manœuvres de quelque arriviste ambitieux, lequel me soufflerait sûrement des solutions pourries. »

« Je comprends ! C’est une façon de prendre des décisions sans assumer le risque qui va avec ! »

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