Les 4 saisons
9 septembre, 2018« Vous vous rendez compte. Dans mille ans, le soleil ou la pluie formeront encore l’essentiel de nos conversations quotidiennes. »
« Oui, peut-être, mais avec le dérèglement climatique, aura-t-on encore de vraies saisons en l’an 3000. »
« Peut-être pas, mais est-ce vraiment important d’avoir des saisons ? »
« Bien sûr que oui. Je trouve que ça nous permet d’explorer toutes les nuances de l’âme humaine influencée par les humeurs de la nature. Par exemple, quand arrive l’automne, je me sens envahi d’une tristesse nostalgique en foulant au pied les tapis de feuilles mortes, tout en pensant aux beaux jours qui s’en vont. »
« Oui, mais après, vous avez les beaux jours d’hiver tellement vivifiants. »
« Certes, mais là, je sens le froid, comme un grand vide qui s’ouvre sous mes pas. C’est très angoissant le froid. »
« Avec la neige, ce n’est pas mieux ?»
« Si, la neige c’est démocratique, ça recouvre tout sans distinction, d’un tapis de douceur immaculée. La neige me donne le sentiment d’être sur une autre planète où tout serait doux, calme et silencieux. »
« Je vous signale tout de même qu’il est obligatoire par arrêté municipal de déneiger devant chez vous pour que personne ne casse la figure. C’est moins poétique. »
« Pfff.. Quel ennui ! Heureusement, il y a le printemps. Moi ce que j’aime bien, c’est le pré-printemps, cette période où l’on sent que le printemps est là, mais pas encore tout à fait. C’est très sensuel. »
« Je vois ce que vous voulez dire, c’est cette période où on ne sait pas comment s’habiller pour sortir. »
« Si vous voulez. Mais je reconnais que rien ne vaut le printemps. C’est très émouvant le printemps. On a l’impression d’assister à la renaissance d’un monde qu’on croyait enfui pour toujours. Cela me donne beaucoup d’espérance en un avenir meilleur. »
« Pfff… Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre ? Je suppose que l’arrivée de l’été vous met dans tous vos états. »
« Oui, mais avant, il y a le pré-été. C’est cette période du 1er au 30 juin. Il fait bon. On respire comme si, enfin libre, on sortait de l’enfer. Les jours s’allongent. On a le sentiment que la nuit et l’ombre, définitivement vaincues, n’arriveront jamais. »
« Et l’été ? »
« Oui, c’est bien. On se découvre les uns les autres. On entend la nature. Je m’endors après un repas plantureux à l’ombre de mes arbres centenaires épanouis, tout en me laissant bercé par le doux bruissement de la bise dans le feuillage des peupliers qui bordent la rivière. »
« J’en étais sûr : vous êtes contre les réformes. On ne peut même pas vous supprimer les saisons ! »