Archive pour mai, 2018
Un homme moderne
20 mai, 2018« Moi, je suis un homme de contact. »
« Qu’est-ce à dire ? »
« J’aime parler avec les gens, il n’y a que ça de vrai. C’est la seule manière de se sentir vivant. Je ne suis pas ce genre d’intellectuel qui refait le monde dans son coin. »
« Euh… on peut être intellectuel et aimer parler aux gens. »
« Non, ce n’est pas possible. Chaque fois que je parle avec un intellectuel, je sens bien qu’il ne m’aime pas. »
« Comment vous le savez ? »
« Il fait des efforts démesurés pour employer des mots simples afin de s’assurer que je le comprenne. »
« C’est méritoire d’essayer de se mettre au niveau des gens. »
« Oui, mais moi je n’aime pas les chichis. Je dis les choses directement telles que je les pense sans circonvolutions oratoires. »
« Vous connaissez le mot circonvolution ? C’est déjà l’indice d’une certaine culture. »
« Vous êtes sûr ? Mince, il faudra que je fasse attention. »
« En effet, si vous utilisez un vocabulaire élaboré, vous risquez de perdre le contact. Conservez vos termes habituels : OK, c’est clair, grave, etc… »
« Vous avez raison. Quand je suis fatigué, je ne fais pas très attention à ce que je dis et hop ! Sans le faire exprès, je fais des phrases complètes avec sujet, verbe, complément. »
« C’est très ennuyeux quand on aime le contact. Faites attention ! Certains se plaignent que vous employez parfois des adverbes ! »
« Bon d’accord, mais je n’en suis pas encore au niveau de Jojo qui utilisait l’imparfait du subjonctif. On a été obligé de lui offrir un stage de rééducation. »
« Le pire pour les hommes de contact, c’est de lire autre chose que leurs hebdomadaires de télévision. »
« Vous voulez dire des romans ? Quelle horreur ! Ce sont des trucs à développer l’imagination. Et l’imagination, c’est le début de la réflexion… »
« Restons concrets ! »
« Voilà, c’est le mot concret ! Foin du blabla ! »
« Vous venez encore d’employer une expression sophistiquée :foin ! »
« C’est de la faute de mon neveu qui regarde des émissions historiques instructives à la télé. Je répète pourtant à sa mère qu’il faut le mettre devant des émissions débiles comme les autres. Rien n’y fait ! »
Mini, mini !
19 mai, 2018Tatatata….
11 mai, 2018Jouer aux petits chevaux
10 mai, 2018« Vous avez vu ? Vous avez encore fini dernier du Grand Prix ! »
« Oui, je sais, mais je ne suis pas très à l’aise sur terrain lourd. »
« La dernière fois, votre excuse c’était que vous n’aviez pas pu déjeuner tranquillement. »
« Oui, ma digestion avait été sérieusement troublée. Vous croyez que c’est facile de courir dans ces conditions ? »
« Moi, je cours ce dimanche. J’ai une chance très sérieuse. »
« Vous ? J’en doute ! Vous n’avez pas fini votre dernière course. »
« Ça n’en valait pas la peine. Les autres m’avaient gêné. Et puis, il fallait que je me réserve pour dimanche prochain. Je vais tenter un gros coup. »
« Moi, je serai là aussi. J’ai élaboré une tactique imparable. Je m’excuse d’avance de vous dominer. »
« Alors là, je ris. Votre tactique, tout le monde la connait. Vous vous emparez de la corde et vous ne la lâchez plus. »
« C’est la seule méthode pour couvrir moins de terrain. »
« Si vous voulez ! Moi je m’en fous ! Je vais vous déborder dans la dernière ligne droite en venant du diable vauvert et le tour sera joué. »
« Vous ne tiendrez pas le coup, tandis que moi, avec mon air de rien, je vais en garder sous le sabot et je remettrai la gomme à 100 mètres de la ligne. Qui c’est qui va être bien surpris de se trouver distancé alors qu’il croyait gagner ? »
« Mon pauvre, vous allez être balayé par votre excès de confiance. La dernière fois que vous avez fini une course, j’ai eu le temps de boire un coup avant votre arrivée. Tout le monde se demandait où vous étiez passé. »
« Et vous, la dernière fois, vous avez refusé de prendre le départ. »
« Le niveau de la course n’était pas assez relevé. Je ne vais pas me mesurer à des tocards. Je risquerai d’y perdre ma pointe de vitesse. »
« D’après les derniers potins d’entrainement, il parait que vous n’êtes pas très en forme. Vos chronos ne sont pas bons. »
« Parce mes entraineurs n’ont pas encore compris que je n’étais pas du matin. Mais, je vous rappelle que le Grand Prix se court à 15 heures. C’est justement à cette heure-là que je peux me donner à fond. »
« Moi, je suis bon à toutes les heures de la journée. C’est ce qu’on appelle la régularité. Vous allez voir, je ne paie pas de mine, mais ça va rapporter ! Mon jockey qui n’a pas l’habitude va être surpris ! »
« A propos de payer, il parait que votre propriétaire est en faillite. »
« Dimanche, je vais gagner pour le renflouer. Et puis assez parler ! Aller manger dans votre râtelier et au lit ! Vous aurez besoin de forces pour me résister. »
Une B.D.
9 mai, 2018Le conseilleur
8 mai, 2018« Je prodigue volontiers mes conseils. J’en donne à tous ceux qui m’en demandent. Ça ne vous intéresse pas ? »
« Il sont bons vos conseils ? »
« Comment voulez-vous que je le sache ? On connait la pertinence d’un conseil qu’une fois que l’action a eu lieu ! »
« Parce que moi, je préfère les bons aux mauvais. Qu’est-ce que vous faites si un conseil que vous avez donné s’avère mauvais ? »
« Rien. Je n’assure pas le service après-vente. Il faut que celui qui s’est approprié mon conseil le suive scrupuleusement et qu’il assume les conséquences »
« Si vous conseillez mal, vous le mettez en grave difficulté. Par exemple, si vous lui conseillez d’acheter une voiture Renault avec laquelle il a beaucoup d’ennuis, vous croyez qu’il ne va pas vous en vouloir ? »
« Non. Les gens n’aiment pas avouer qu’ils ont fait un mauvais achat, surtout en matière de bagnole. Dans le cas que vous citez, l’homme sera obligé de me sourire, même d’un sourire coincé. Au pire, je lui conseillerai de demander conseil à son garagiste. »
« On devrait vous faire payer vos mauvais conseils. »
« Ce serait assez injuste. Quand je donne un conseil, même s’il est mauvais, c’est la preuve que je m’intéresse aux autres. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Suivez mon regard. »
« Et quand – par hasard – vous donnez un bon conseil, les gens vous en sont certainement reconnaissants ? »
« Pas tellement. En général, les gens s’estiment assez grands pour se débrouiller tous seuls. Quand ils prennent une bonne décision qui correspond à un conseil que j’ai donné, ils font comme si cela avait découlé de leur propre réflexion. »
« Vous devez vous sentir frustré. »
« Non. Donner un bon conseil sans attendre de reconnaissance, c’est un sacerdoce. Pour un peu, je louerais ma grande bonté d’âme. »
« Et vous, vous demandez parfois des conseils aux autres ? »
« Bien entendu. Je ne suis pas monsieur-je-sais-tout. »
« Qu’est-ce qui se passe quand on vous donne un mauvais conseil ? »
« Je m’énerve contre le responsable qui donne une si mauvaise image du rôle de conseilleur. Et je lui fais payer une amende. »
« Et quand son conseil est bon ? »
« Je reprends le conseil à mon compte. Vous voyez… Je sais être modeste. Je n’invente rien. A propos, vous voulez un conseil ? »
« Non. »
Appendice nasal
7 mai, 2018Complications conjugales
6 mai, 2018« Madame, je vous offre cette rivière de diamants. »
« Vous êtes fou, mon ami ! C’est beaucoup trop, je ne puis accepter. »
« Ah bon ! Et pourquoi donc ? »
« Mon mari va voir ce cadeau ! Que vais-je lui dire ? Il va me faire un tas d’histoires ! Que je prenne un amant, il ne le supporte pas, mais qu’il me couvre de cadeau le plongerait dans une profonde affliction ! Je ne peux l’humilier davantage ! »
« Ah bon ! Il est donc pauvre ? »
« C’est-à-dire qu’Armand… comment dirais-je ? … suit attentivement les dépenses du ménage. »
« Un mari pingre ! Ce sont les plus terribles pour les amants ! Bon, j’ai là un petit collier en matière plastique. Vous pourriez dire que vous l’avez acheté à Monoprix en faisant vos courses de la semaine. Des fois, après avoir mis une botte de poireaux et un camembert dans son caddy, on s’achète des babioles sans trop savoir pourquoi ! »
« Certes mon ami, voilà une bien belle attention, mais … comment dire… j’aurais préféré la rivière de diamants. Vous comprenez… pour me faire oublier les liens sacrés du mariage, il me faudrait un cadeau qui me fasse perdre la tête ! »
« Vous ne pouvez pas être ma maîtresse, tout en gardant votre tête ! »
« Mon ami ! Les femmes ont besoin de rêver ! Un cadeau acheté à Monoprix, vous plaisantez ! »
« Bon, alors, abandonnons le collier. Un voyage à Vladivostok dans le transsibérien, ça fait perdre la tête, ça ? Vous pourrez toujours lui faire le coup du séminaire d’entreprise à Armand. A la Baule, par exemple. »
« Georges, vous voulez donc me perdre. Si je dis que je suis à la Baule, Armand va s’empresser de m’appeler pour vérifier… »
« Et alors ? »
« A Vladivostok, il n’y a pas de réseau. Et puis, il fait froid. Et puis c’est un cadeau trop cher pour que j’accepte. Si on en est là, je prends la rivière de diamants. »
« C’est-à-dire que tout compte fait, je le verrai mieux au cou de Marie-Alexandra. Elle, elle ne va jamais à Monoprix. Et puis, elle n’a pas un mari radin. Il ne va pas lui chercher des complications, il en a assez avec Marie-Micheline Poulard, sa nouvelle maitresse ! »
« Vous ne comptez pas sérieusement me faire porter un collier en plastique alors que le baron de la Moutardière vient de m’offrir un cabriolet Audi A3. »
« Et votre mari a accepté ? »
« Bien sûr, puisqu’il courtise la baronne. Si j’avais refusé la voiture, le baron aurait pleurniché dans les jupes de la baronne, laquelle l’aurait repris dans son lit, puisqu’elle en a marre de l’avarice de mon mari, qui fait toutes ses courses à Monoprix. »