Archive pour le 20 juin, 2017

Le temps qui passe

20 juin, 2017

« C’était mieux avant. »

« J’en étais sûr ! Encore un déclinologue ! »

« Pas du tout. Quand vous cassez une vitre chez vous, qu’est-ce que vous faites ?

« J’appelle un artisan. »

« Pour une vitre, il vous envoie balader, ce n’est pas rentable. Dans le temps, le vitrier passait dans la rue en criant, il suffisait de le héler. »

« C’est vrai qu’actuellement, je ne hèle plus personne dans la rue. »

« En plus, dans le temps, il y avait des bistrots où on pouvait parler et dire n’importe quoi avant d’aller bosser. Maintenant, ils disparaissent un par un. Où peut-on dire n’importe quoi, maintenant ? »

« Euh… c’est vrai aussi, il faut avoir l’air intelligent 24 heures sur 24. »

« Et puis en ville, il y avait de la place pour se garer. »

« Vous exagérez, hier j’ai tourné seulement une demi-heure pour aller chez mon beau-frère. Finalement j’ai trouvé une place à 800 mètres. »

« Avant le pompiste vous servait d’essence au garage. On pouvait échanger sur la pluie et le beau temps. Maintenant vous faites le boulot à sa place. Si vous vous trompez, vous vous mettez de l’essence plein le pantalon et en plus il faut payer plus cher. »

« J’en ai marre de mettre mes pantalons au rebut. »

« A la poste, on pouvait faire la queue. On avait le temps de bavarder, de dire du mal des uns et des autres, ça créait du lien social. Maintenant, il y a des gens qui viennent à votre rencontre pour vous aider, il n’y a plus moyen de perdre son temps. »

« Remarquez que je n’aime pas trop attendre. »

« Autrefois, l’épicier vous servait. Il vous demandait : alors, pour cette petite dame, qu’est-ce que ce sera ? L’ambiance était bon enfant. Dans l’hyper marché, il n’y a plus personne pour vous interpeller avec bonhommie. »

« Euh… c’était sympa. Mais j’aime bien aussi choisir mes salades sans avoir personne sur le dos. »

« Et la télé ? Hein, si on parlait de la télé ? Il y avait une chaîne, on n’avait pas le choix, ça évitait les bagarres. Maintenant, j’en ai 150, avec plein de séries américaines qui se ressemblent toutes. Résultat, je ne regarde plus rien. »

« Certes, mais enfin on a fait des progrès partout, même en matière de vêtements. »

« Peut-être, mais je m’en fous. Moi, je mets toujours mon vieux pyjama à rayures verticales qui pendouille lamentablement sur les genoux, ça au moins ça me rappelle le temps jadis. Maintenant, vos objets se renouvellent sans cesse, vous n’avez plus rien sous la main pour vous souvenir du passé et comprendre que le temps passe. »