Archive pour mai, 2017

Le voyage de l’escargot

31 mai, 2017

Dans le cadre de l’escadre

L’escargot monte sur le cargo.

C’est un espion qui avance ses pions.

Il attend l’escale dans les cales.

Il a les crocs, cet escroc.

Il a mis ses espoirs dans une poire.

Son père l’espère

Il vit en Espagne dans son pagne.

 

Un gamin exemplaire

30 mai, 2017

« J’ai un gamin parfait. »

« Oh ! Mon pauvre, ce n’est pas trop dur ? »

« Si, un peu ! On a l’impression qu’il est né sans écouteur sur la tête comme les autres. A 15 ans, tiens-toi bien, il connait le chemin de la salle de bains ! »

« Ne me dis pas qu’il change de sous-vêtements tous les jours ? »

« Si, et en plus, il sait très bien se servir de la machine à laver ! »

« Heureusement, il regarde des conneries à la télé ! »

« Même pas ! Le soir des matchs de Ligue des Champions, il se retranche dans sa chambre pour lire Balzac ou Zola. »

« C’est grave. Qu’est-ce qu’en pense le toubib ? »

« Rien, il est dépassé. Il n’a jamais vu ça. De toute façon, il n’a pas le temps de s’en occuper, il est obligé d’aller chercher le sien tous les trois jours, chez les flics. »

« Bon ! Pas de panique, on pourrait choisir de bonnes fréquentations pour ton gosse. Le mien par exemple, il n’y a pas de danger qu’il lise Zola ou Balzac. Ni rien d’autre d’ailleurs. »

« J’ai déjà essayé avec le fils du voisin, mais il a déclaré forfait quand mon gamin a voulu l’emmener voir une expo sur les impressionnistes. »

« Une expo de peinture !!! C’est dur. Et ta femme qu’est-ce qu’elle en pense ? »

« Elle est ravie, tu parles. Son fils l’aide à faire le ménage ! En plus, il range sa chambre, rien ne dépasse ! Un vrai désastre ! »

« Il range !!! Sans qu’on lui demande !!! Alors là, les bras m’en tombent. Le mien bouge après quinze rappels et trois menaces d’interdiction de sortie ou de manif. »

« A propos de manif, j’ai honte : j’ai un fils qui n’est jamais descendu dans la rue. Je ne lui demande même pas de se faire tabasser par les CRS, mais juste un petit bout de chemin pavé en levant le poing. Même ça, il n’y a pas moyen ! »

« Et les filles ? »

« Il y a bien Marie. Il l’a invitée plusieurs fois. »

« Ah ! Tout de même ! »

« Il lui paie une glace à la fraise et ils vont la déguster sur les bords du lac en regardant les canards. »

« C’est tout ? … C’est terrifiant ! Et toi, qu’est-ce qu’il te dit ? Vous avez des conversations ? »

« Oui, il me dit que je suis un excellent père et qu’il a bien de la chance d’être tombé sur moi. »

« Pff… C’est complet, je compatis. Moi, je n’aurais pas supporté. Si je ne pouvais pas flanquer une bonne torgnole à mon gamin, j’aurais l’impression de ne pas remplir mon rôle de père. »

Georges ne comprend rien

29 mai, 2017

« Tu m’aimes ? »

« Ou, bien sûr ! »

« Et comment tu m’aimes ? »

« Euh … enfin, je t’aime…. Comme on aime ! Quelle question ! »

« Et mes petits pieds, tu les aimes ? »

« Mais évidemment que j’aime tes pieds ! »

« Et mes orteils ? On ne dirait pas que ce sont des pétales de roses ? Surtout le petit ? »

« Va pour des pétales de roses ! »

« Ma mère avait bien raison. »

« Qu’est-ce qu’elle a encore dit ta mère ? »

« Vous les hommes, vous ne savez pas dire des choses romantiques. On n’a l’impression que ça vous écorche la bouche. Par exemple, tu ne m’as jamais rien dit sur mes yeux. »

« Tes yeux … tes yeux…. »

« … Sont des perles de rosée… Et tu ne m’as jamais fait de poème. »

« Ecoute Gisèle, je bosse 60 heures par semaine, comment veux-tu que je trouve le temps de te faire un poème ! Il faut trouver des mots, compter les syllabes, tout ça… »

« Le mari de Paulette lui en fait. »

« Le mari de Paulette est chômeur. Et puis, je voudrais bien voir ses poèmes, ça doit être quelque chose ! »

« Et le voyage à Venise que tu m’avais promis ? »

« Le voyage à Venise ? Qu’est-ce que c’est encore que ce truc ? L’été dernier, on a passé 15 jours au Grau-du-Roi, ça ne peut pas faire l’affaire ? »

« Il n’y a pas la même ambiance, Georges. »

« Bon ! Allez ! C’est d’accord pour tes doigts de pied et Venise. J’espère qu’il y a du réseau là-bas pour que je puisse bosser un peu ! »

« T’es jaloux, Georges, quand les autres hommes me regardent ? »

« Parce qu’il y a d’autres hommes qui te regardent ? »

« Au bureau, Martinot n’arrête pas d’aller me chercher un café. »

« Il n’a rien à faire ? »

« Il n’est pas mal, Martinot. Plein d’humour, yeux bleus, épaules larges, barbe faussement négligée… »

« Bon, si tu aimes les négligés, je peux essayer de faire un effort. »

« Georges, tu ne comprends rien ! »

Une bonne éducation !

28 mai, 2017

« C’est ton nouveau copain, ça ? Qu’est-ce qu’il fait ? »

« La cuisine, le ménage. »

« C’est tout à fait insuffisant ! Il faut les tenir en mains dès le début, sinon ils en prennent à leur aise et c’est fini ! »

« On peut en discuter entre personnes raisonnables. »

« Tu plaisantes ! Le seul copain raisonnable, c’est celui qui fait ce que tu dis ! Et dans la vie, il fait quoi ? »

« Employé à la Sécu. »

« Et ça te fait rêver ça ! J’espère au moins qu’il est hacker le soir ou alors DJ pendant les nuits de week-end. Il picole ? Il fume ? »

« Euh… il fait une collection de timbres et de boites de fromage. »

« Je suis sciée ! Ce n’est pas sérieux ! Bon…. Il t’emmène au bout du monde sur commande, ton employé de Sécu ? »

« C’est-à-dire qu’il a peur de l’avion. »

« Alors, vous y allez comment au bout du monde ? »

« On a déjà été dans le Périgord pour voir sa tante qui fait des pâtés aux olives délicieux. »

« Si je comprends bien tu te shootes aux pâtés aux olives de sa tante. J’espère au moins que ton mec est un rebelle. Qu’est-ce qu’il fait pour se rebeller ? »

« C’est-à-dire qu’il participe aux nettoyages des berges de la Seine. »

« Noooon, même pas une petite manif ? Ne me dis pas qu’il fait ses Pâques ou qu’il va se confesser tous les huit jours. »

« Nous discutons beaucoup de nous, du monde, de la société. C’est très intéressant. »

« Et quand il a fini de discuter, il mène ta bagnole à la révision, il porte ta jupe au pressing, il emmène ton courrier à la poste, évidemment… »

« C’est-à-dire qu’il est souvent fatigué. »

« Alors là ! Tu permets que je m’assoie ! Tu te rends compte de ce que tu fais ? Tu gâches le métier ! S’ils s’autorisent tous à être fatigués, on va toutes être obligées de s’occuper de nos affaires. C’est ça que tu veux ? »

« Euh… il n’aime pas beaucoup être contrarié. »

« Pff… J’aime mieux ne pas entendre ça ! Le mien, n’est JAMAIS contrarié, je l’ai élevé très tôt ! Je suis la seule à avoir le droit d’être en colère, fourbue, harassée quand je rentre du boulot…. Et quand je ne le suis pas, je fais semblant pour qu’il se trouve obligé de s’occuper de tout ! »

Mal m’en a pris

27 mai, 2017

Un mâle

Maltais

Malotru

Vit dans une malle.

Il est malingre

Et sans malice.

C’est malsain

Et très mal.

Des hauts et des bas

26 mai, 2017

Ici-bas

Au Pays-Bas

Dans les bas-fonds

Une pin-up

Fait un hold-up.

Là-haut

Le Très-Haut

Prend de haut

Ce coup bas.

Réunion de direction

25 mai, 2017

« Georgette ! Vous n’êtes pas la femme de ménage, vous êtes mon assistante de direction. »

« Bien, monsieur le directeur de la maison. Alors, je propose une réunion de service. »

« A quel sujet ? »

« Le tiroir à chaussettes. »

« Qu’est-ce qu’il a le tiroir à chaussettes ? »

« Il ne contient pas que des chaussettes. »

« En effet, c’est un problème que vous faites bien de me signaler. Je vais constituer un groupe de travail qui procèdera à une expertise. »

« Je vous rappelle aussi, monsieur le directeur, le rapport que je vous ai remis sur les croquettes du chat. Il se plaint beaucoup, il préfèrerait saumon. »

« Ecoutez, Georgette, je ne peux pas accéder aux caprices de tous les employés, tout de même ! Nous verrons cela au prochain conseil d’administration. Autre chose ? »

« Oui, votre fille Laura vient de déposer les statuts de son syndicat. »

« Un syndicat ? Ils sont combien ? »

« Pour le moment, elle est toute seule, mais elle en a parlé au facteur et à la concierge. Il semble qu’elle arrive à mobiliser. »

« A 10 ans ? Qu’est-ce qu’elle veut ? Elle a tout. »

« Justement, elle pense qu’un parent normal devrait lui imposer des limites, de façon à ce qu’elle puisse exprimer sa rébellion juvénile. »

« Pff… Il va encore falloir ouvrir des négociations. Proposez-lui une rencontre paritaire au Mac Do du quartier sur la base de son cahier de revendications. Et après ? »

« Euh… votre femme vous fait remarquer qu’elle est en congé maladie. »

« Ah bon ? Voilà qui va encore faire grimper mon taux d’absentéisme ! On peut peut-être chercher une intérimaire. »

« C’est un poste très particulier, ça ne se fait pas, monsieur le directeur. Et puis, ça peut coûter très cher…. Euh, ce n’est pas fini, monsieur…. Pour la réunion de demain dans la buanderie, le réparateur s’est désisté… Il dit qu’il ne va pas encore  se déplacer pour une machine pourrie. »

« De mieux en mieux ! Puisqu’il en est ainsi, nous allons dénoncer notre contrat ! Si les sous-traitants commencent à avoir des états d’âme, où allons-nous ? »

« Il y aussi notre découvert bancaire. Le chargé de clientèle vous fait savoir qu’il n’a jamais vu un fonds de roulement aussi négatif que le vôtre. »

« Et voilà. Quand on a besoin des banques pour relancer l’économie nationale, il n’y a plus personne !… Bon, Joséphine, bordez-moi et racontez-moi une histoire. »

Han ! Han !

24 mai, 2017

Au Mans

Sur un banc

Il a un coup de sang

Car il a une dent

Contre Alban

Qui a quitté son camp

En lui mettant un vent.

Et Pan !

Un chargé de lui-même

23 mai, 2017

« Voilà, ça y est, j’ai obtenu un prêt de ma banque pour acheter ma bagnole. 10 000 euros pendant 4 ans à 5%. C’est un peu de l’arnaque, mais cela aurait pu être pire ! »

« Ça n’a pas été trop dur ?»

« Si, il a fallu négocier serré. Le chargé de clientèle voulait toutes sortes de garanties. Il m’a imposé plein de formalités. C’est tous les mêmes ! Ils vous demandent de la paperasse encore de la paperasse. Je me demande à quoi ça leur sert. »

« Mais en même temps, c’est vous le chargé de clientèle de la banque. »

« Si vous croyez que c’est plus facile. D’accord, je connaissais bien le dossier, mais il faut être très dur avec soi-même pour l’être avec les autres. C’est obligatoire. Sinon, c’est la porte ouverte aux excès. Je pourrais me consentir un prêt tous les huit jours ! L’un pour rembourser l’autre ! »

« Si je comprends bien, c’est de l’autonégociation. »

« Oui, j’ai dû batailler ferme pour me faire lâcher des conditions avantageuses. Avec la veine que j’ai, je suis tombé sur le plus dur des chargés de clientèle. Je me suis tellement énervé que j’ai bien cru que j’allais m’envoyer tout le dossier à la figure. Avec la mère Duboulot, ça aurait été plus simple.»

« Et depuis, vous allez mieux avec vous-même ? »

« Pas tellement. Je suis obligé de me harceler tous les jours à cause de mon découvert bancaire. »

« Comment faites-vous ? »

« Je me téléphone, mais comme par hasard je tombe toujours sur mon répondeur. Je vais être obligé de m’envoyer un recommandé ! »

« C’est troublant, en effet. »

« Il faut dire que mon salaire à la banque n’est pas très élevé. Je l’ai dit à mon chargé de clientèle qui m’a répondu qu’il était bien d’accord, mais que ce n’était pas son affaire. Heureusement, je viens de toucher une prime de fin d’année… »

« … que vous allez immédiatement placer en suivant les recommandations de votre chargé de clientèle. »

« Non, je me méfie, il va encore essayer de me refiler un placement sur lequel il perçoit une commission. Je suis bien placé pour le savoir. Ces gens-là pensent à leur profit d’abord au lieu de s’intéresser au client ! »

« Bon, alors finalement, vous me conseillez cette banque, oui ou non ? »

« C’est-à-dire qu’entre 9 heures et 18 heures, ce serait plutôt ‘oui’. Après ou avant, ce serait plutôt ‘non’. Vous comprenez ? »

« J’essaie, mais j’ai du mal. »

Un fantôme

22 mai, 2017

« Je suis rien. »

« Comment ça, rien ? »

« Rien du tout, je vous dis. D’ailleurs, je me demande comment vous pouvez parler avec un rien du tout, ça me déstabilise. »

« Je vous parle comme à un être humain. »

« C’est une erreur. Je ne suis pas un humain, je suis une huitre. Je ne l’ouvre jamais. Je n’ai rien à dire. Je suis un être falot, sans intérêt. Depuis, que vous vous adressez à moi, je suis complètement désarçonné. »

« Mais enfin, vous avez l’allure d’un homme… »

« Je suis complètement transparent. Regardez bien. Vous ne voyez rien à travers moi ? Comment faites-vous pour apercevoir de ma présence ? »

« Euh… j’observe. »

« C’est bien mon problème. Je ne fais pourtant aucun effort pour me mettre en valeur. Je n’ai aucune conversation. Je ne suis pas amusant du tout. »

« Mais pourquoi faites-vous ça ? »

« Je ne tiens pas à être repéré. Je suis tranquille comme ça. Je suis personne. »

« Pourtant vous êtes bien obligé de coexister avec d’autres. »

« Oui. Au travail, je suis dans le même bureau que Dugenou. Je ne suis pas sûr qu’il se soit aperçu de mon existence devant lui. Quand je pars en congés, personne ne s’en aperçoit. Tout le monde a oublié mes attributions. Moi aussi. »

« Je suis sûr que vous parlez de temps à autre. »

« Quand je parle, les autres continuent à parler entre eux. Ils ne comprennent pas ce que je dis. D’ailleurs, moi-même je ne suis pas certain de me comprendre. »

« Vous avez quand même des dossiers administratifs. Au minimum, vous êtes repéré par l’Administration ! »

« Même pas.  A la Sécu, ils ont perdu mon dossier. Aux Impôts, on m’a certifié que je n’existe pas. Je suis dispensé de taxes locales parce que la Mairie n’arrive pas à me prendre en considération. »

« Mais vous avez sûrement des soucis qui vous mettent en contact avec des gens. »

« Non. Comme je ne suis rien, il ne m’arrive jamais rien. Je ne souffre de rien. Sauf un jour où j’ai failli devenir quelque chose. »

« Ah ! Vous voyez ! »

« C’était une femme : Marie. Elle s’est adressé à moi par erreur. Mais il faut dire qu’elle aussi, c’était une rien du tout. »

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