Dans l’ascenseur
12 mars, 2017« Vous allez à quel étage ? »
« Quarante-troisième … »
« Moi, je suis au quarante-septième… »
« Vous pourriez me parler. »
« Pourquoi ? »
« Avec vous, je pourrais avoir ma seule conversation humaine de la journée. Pour le reste du temps, je communiquerai avec des gens que je n’ai jamais vus par mail. »
« C’est ennuyeux, mais nous n’avons pas le temps de converser. »
« Si, j’ai tout calculé. En tenant compte des arrêts aux différents étages, nous avons quatre minutes et demi. »
« Une discussion de quatre minutes et demi, ça va être compliqué. On va être obligé de se dire qu’il fait froid. »
« Bon déjà, une minute quarante-cinq de passé. Il fait froid, mais je m’en fous. Dites-moi quelque chose d’intéressant. »
« Vous en avez de bonnes ! Vous n’avez qu’à trouver un sujet, vous ! »
« Déjà deux minutes trente et on en sort pas. Je vous signale qu’hier quelqu’un m’a parlé de la culture du rhododendron. C’était passionnant. »
« Je n’ai pas la main verte. Je peux vous faire une analyse du dernier match du PSG. »
« Trois minutes. Non, je ne m’intéresse pas au foot. Vous n’avez rien sur l’économie chez les aztèques ? »
« Désolé, je suis un être assez frustre. Sur chaque départ d’ascenseur, il devrait y avoir une liste de sujets envisageables durant le parcours. Genre : dans cet ascenseur, on parle littérature ou bien éducation des enfants… »
« Vous avez raison, mais on en est déjà à quatre minutes et vous n’avez pas démarré un sujet acceptable. »
« Vous non plus. »
« Nous n’avons pas le même niveau culturel. Il faudrait que vous progressiez un peu. Prenez un abonnement à l’opéra. »
« Bon, pour me rattraper, je pourrais vous donner rendez-vous à la machine à café à onze heures. C’est le seul endroit où on peut encore blablater. D’ici là, je me serai renseigné sur les aztèques. »
« D’accord, je descendrai à la machine de votre étage, j’espère qu’il y a du thé, je supporte assez mal le café. »
« Je vais vérifier et je vous envoie un mail. »