Archive pour janvier, 2017

Décroissance ?

31 janvier, 2017

« Vous avez remarqué ? »

« Quoi encore ? »

« Une bonne partie de l’activité des hommes consiste à s’autodétruire pour bénéficier d’une période de croissance lorsqu’ils se reconstruisent. »

« Certes, les périodes de croissance économique coïncident souvent avec les après-guerres, mais il ne faudrait pas généraliser. »

« Si, on peut. Suivez mon raisonnement. Les hommes consomment de plus en plus, ils s’ensevelissent sous leurs propres déchets et hop ! Ils inventent l’industrie du retraitement et du recyclage de leurs déchets. Non seulement ils se sauvent, mais en plus ils font leurs malins puisqu’ils ont relancé le taux de croissance économique.»

« Vous avez un autre exemple ? »

« Oui. Ils ont inventé l’automobile, mais ils n’ont pas fait gaffe qu’ils inventaient aussi les accidents qui vont avec. Résultat : les hôpitaux tournent bien, ça crée de l’emploi. »

« Autrement dit, ils se font du mal ce qui n’a pas vraiment d’importance, puisqu’ils se réparent derrière pour le plus grand profit de la machine économique. S’ils évitaient de s’en prendre à leur santé, ce serait mieux ! »

« La prévention, ça crée de beaux messages publicitaires à la télé, mais pas beaucoup d’emplois. »

« Mais tout de même, il existe des activités constructives : l’éducation, par exemple ! »

« Sauf que, lorsque ça ne marche pas, les gamins se retrouvent sans diplôme et il faut recommencer à les former à un métier : c’est encore de la réparation de dégât social. »

« Si je comprends bien, la croissance est due au fait que les hommes se consacrent essentiellement au rafistolage de leurs bévues. Mais prenons l’invention de la télé, par exemple, ça ne répare rien du tout, c’est un progrès absolu. »

« La télé a aussi provoqué la mise au rebut des vieux postes qu’il faut recycler. Elle a aussi diffusé des images de violence qui ont perverti nos jeunes esprits qu’il faut rééduquer par la suite. »

« Certes, toutes les innovations ont des effets négatifs qu’il faut bien corriger, mais on ne va pas s’arrêter d’innover pour autant. L’invention qui n’aura pas d’effet secondaire néfaste reste à trouver.

« En attendant, nous nous félicitons chaque mois de résultats économiques en hausse qui sont dus au bricolage des conséquences de notre incurie.»

« Avec une théorie comme la vôtre, mon pauvre, la société n’avance plus. On ne cherche plus des médicaments nouveaux pour soigner par exemple. »

« Si, on cherche et on trouve. Les hommes ne font pas exprès de se mettre en difficulté, en étant malades par exemple. Je pense qu’ils sont condamnés par une volonté supérieure à une course poursuite vers l’avant qui leur permet de limiter les dégâts de la croissance, notamment sur leur propre santé. Pour le moment on gagne, mais il ne faut pas faire les fanfarons, parce que ce n’est peut-être pas éternel. »

« C’est déprimant votre truc. »

« Je sais, c’est la raison pour laquelle les hommes ont inventé l’industrie de la communication pour que les gens se rassurent les uns les autres et continuent à aller de l’avant en consommant toujours plus. »

Ah ! Hu !

30 janvier, 2017

Au temps du bahut

J’étais un ahuri

Qui menait des chahuts.

Aujourd’hui, depuis ma cahute,

Je crapahute

A la chasse au dahu

Avec mon chihuahua

Que je transbahute.

Sa Majesté est saisie par le spleen

29 janvier, 2017

« Chambellan, flattez-moi ! »

« Mais Sire, j’ai déjà beaucoup flatté sa Majesté, la semaine dernière. »

« Oui, mais là, j’ai un petit coup de mou. Re-flattez-moi. »

« Sa Majesté est un grand roi. L’histoire se souviendra de son règne. »

« Euh… non, vous ne flattez pas bien, Chambellan. On dirait que je suis déjà mort. Dites-moi plutôt ce que vous pensez de mon allure physique. »

« Sa Majesté rayonne partout où elle passe. Si j’osais, je dirais que sa Majesté a une allure majestueuse. »

« Bon, on progresse. Et mon caractère, comment vous le trouvez mon caractère ? »

« Sa Majesté allie avec dextérité la fermeté qui sied à un grand décideur et une grande qualité d’écoute qui lui permet de prendre des décisions toujours justes et efficaces. »

« Certains disent que je suis toujours à la recherche de compliments. »

« Quelle ignominie ! Sa Majesté est d’une modestie confondante alors qu’elle pourrait s’enorgueillir de si belles réalisations au profit de son peuple. »

« Bien ! Le peuple m’aime, n’est-ce pas ! »

« Tout à fait, sa Majesté fait l’objet d’une véritable vénération dans toutes les couches populaires, jusqu’aux plus humbles. »

« On m’a parlé d’une petite révolte dans certains quartiers ? »

« Trois fois rien, votre Majesté ! Juste des petits impertinents qui ont été vite sanctionnés, ça m’étonnerait que sa Majesté en entende encore parler. »

« Et en chef de guerre, je ne suis pas mal, non ? »

« Sa Majesté est étincelant sur son destrier blanc. Les soldats adorent se battre sous votre bannière, surtout ceux qui ont reçu leur solde. »

« Et les femmes, je trouve qu’elles ne se précipitent pas assez sur moi, ces temps-ci. Il parait que je n’ai pas bonne haleine.»

« Sa Majesté veut rire. Toutes les demoiselles de la cour rêvent d’être remarquées par votre Majesté. Sa Majesté dégage une haleine virile qui fait chavirer tous les cœurs. »

« Et la Reine, elle a l’air de me faire la tête. »

« Pas du tout. Depuis que sa Majesté a édicté une loi interdisant à quiconque de courtiser la Reine, celle-ci est littéralement fascinée par vote autorité naturelle. Elle n’ose même plus approcher son royal époux. »

« Bon, parlons de ma gestion financière… »

« Euh…là, je crois que je vais aller chercher le Grand Argentier de sa Majesté. Je ne sais pas comment il va s’y prendre, mais il saura très certainement flatter sa Majesté. »

Encore des soucis d’argent !

28 janvier, 2017

A la fête

De Sète,

Il fait la quête

A cause de cette

Dette

Pas nette

Qui lui prend la tête.

C’est bête !

Le voyage de Gilles

27 janvier, 2017

Depuis ses mille

Iles

Gilles

Qui n’est pas vil

File

Pile

A Lille

Où il

Ne bouge plus un cil.

Ouverture d’un nouvel institut de beauté

26 janvier, 2017

« Je voudrais ouvrir un institut d’esthétique. »

« Oui, mais pour ça, il faut être soi-même esthétique. »

« Nous y voilà ! Qu’est-ce qu’une personne à l’apparence esthétique ? Vous, avec votre nez cabossé et vos paupières tombantes, par exemple, vous n’êtes pas terrible. En plus, votre coiffure ne vous va pas du tout. »

« Je reconnais que ce n’est pas moi qui peux ouvrir un institut de beauté. A la rigueur peut-être un atelier de cordonnier, car j’ai un beau pied. »

« Je m’en fiche. Nous les filles, on a un tas de trucs pour avoir un visage avenant. Grâce à nous, les pharmacies vivent bien. »

« C’est assez injuste. Nous les mecs, dès qu’on se jette sur des produits de beauté, les autres nous prennent pour des filles, ce qui explique qu’on reste moches en évitant toute crème de beauté et étant très contents de nous. » 

« Ce n’est pas scandaleux de s’entretenir, ça coûte un peu d’argent, mais ça permet d’être apprécié en collectivité. »

« Bon, vous avez raison, je vais devenir riche et beau. Ce sera mieux. »

« Vous pourriez être le premier client de mon institut. Il va y avoir du boulot. Je pourrais vous faire un rabais pour commande massive. Après, il faudra vous habiller correctement pour ne pas gâcher mon travail. »

« Parce qu’en plus, je suis mal habillé ? »

« Oui, il faut que tout soit harmonieux. Bien sûr, il faut avoir une allure et des manières élégantes. Vous êtes un peu rustaud. »

« C’est agréable ! Vous allez aussi m’enseigner à me comporter. »

« Par exemple à marcher. Vous avancez en vous dandinant comme un canard. Et puis vous pourriez faire un peu de sport aussi. Si vous pouviez vous tenir droit et ne pas rigoler comme un imbécile pour n’importe quoi, ce serait mieux. »

« Ah bon ? Je pensais pourtant être pas mal pour mon âge. »

« Euh… pour l’intelligence et la lucidité, je ne peux pas grand-chose, ça ne s’apprend pas. Essayez de pratiquer l’autodérision, vous avez de quoi vous occuper.  Il faut que vous soyez harmonieux à tous les points de vue tout en gardant une pointe de personnalité.»

« Si je comprends bien, je ne vous plais pas. Vous ne voyez en moi qu’un chantier de travaux publics, une espèce de ruine à réhabiliter ? »

« Vous êtes un excellent cas d’école. Tout compte fait, ne changez rien, je pourrais vous montrer à mes apprenties pour qu’elles voient ce qu’il ne faut pas faire. »

« Pff… Je ne me rendais pas compte de mon état. On se croit intéressant et puis, on n’est qu’un gros beauf ! Je ne sais pas si je vais m’en remettre. Je vais sortir de mon bureau caché sous une couverture, ça vaudrait mieux. »

« Bon, vous me le faites ce prêt pour ouvrir mon institut ? « 

Cette histoire ne casse rien !

25 janvier, 2017

Lui, c’est un casseur.

Il n’ira au casse-pipe,

Car ce n’est pas un casse-cou,

Ni un casse-pied.

Il n’aime pas les casse-têtes.

Elle, elle danse Casse-Noisette,

Puis se met aux casseroles,

Pour préparer le casse-croute.

 

L’entrée au paradis

24 janvier, 2017

« Qu’est-ce que vous emporteriez au Paradis ? »

« Pourquoi ? On est fouillé à l’entrée ? »

« Je ne sais pas, mais il va falloir s’occuper. »

« Moi j’y vais avec une réserve de crème caramel et des albums de Gotlib. »

« Si je comprends bien, vous continuerez à faire preuve de la gourmandise alimentaire et intellectuelle que vous manifestiez sur Terre. Je ne pense pas qu’une telle attitude soient appréciée. »

« Je n’ai pas tellement le choix. En enfer, je ne vois pas déguster mes crèmes caramel et je crains que les dessins de Gotlib ne fassent pas rire le Diable. »

« Vous n’avez pas un niveau de spiritualité très élevé. A mon avis, vous allez faire un long séjour au Purgatoire pour vous débarrasser de cette façon de jouir des bonnes choses de la vie. »

« Il ne va pas rester grand-chose de ma riche personnalité. »

« On s’en fout un peu. Vous avez intérêt à participer à ce processus d’élévation de l’âme. »

« Je ne vois pas bien qui je blesse quand je dis que j’aime ma crème caramel ou les dessins de Gotlib. »

« C’est à vous que vous faites du mal. Il va arriver un moment où la gastronomie et l’humour n’aurons plus d’importance. »

« C’est pourtant ce qui aide les gens à vivre et à bien vivre. Ce sont des moteurs de la paix entre les hommes. On ne se fait pas la guerre quand on s’est bien marré ensemble ou lorsqu’on a fait une bonne bouffe entre potes. »

« Vous feriez mieux de méditer sur votre condition au lieu de penser à rigoler et à vous empiffrer. »

« D’accord, mais quand je médite, je pense tout de suite que tout a une fin y compris moi, alors je me précipite pour vivre un peu tant qu’il est encore temps. »

« Evidemment ! Ce qu’il est nigaud celui-là ! Vous croyez que vous allez oublier la finitude humaine en festoyant ?»

« Non, mais ça me console de bien des déboires. Rigoler et bâfrer, ça empêche de se faire peur. Moi, je n’aime pas trop me dire que je ne suis pas grand-chose. »

« Ne vous inquiétez pas tant que ça, nous sommes tous situés entre pas grand-chose et rien du tout. Une fois qu’on l’a compris, il n’y a plus rien à craindre. »

« Pourtant, mon chef de bureau Dugenou n’arrête pas de faire son malin, mon voisin Mollard roule les mécaniques dans sa nouvelle bagnole, enfin bref… tout le monde se hausse du col. »

« Demandez-leur ce qu’ils emporteraient au Paradis en supposant qu’ils y aillent. »

Le pélerinage d’Estelle

23 janvier, 2017

Sur le chemin de Compostelle

Estelle

A mis son porte-jarretelles

Et ses bretelles

En dentelle

Pour danser la tarentelle.

Elle ne cédera pas à la bagatelle,

Ou alors ce sera accidentelle.

Un programme électoral

22 janvier, 2017

« Il y a 30 millions de voitures particulières en France. Si chacune a une valeur moyenne d’environ 10000 euros, c’est 300 milliards d’euros qui circulent sur nos routes, soit plus que la dette publique de la France. Je vous passe les motos, les camions, les bus… »

« Donc, selon vous, tout le monde circule à pied et hop ! Le pays n’est plus endettée. »

« Vous pouvez faire aussi circuler tout le monde en vélo, ce serait bien pour la santé publique. Vous vous rendez compte : on diminue la pollution de l’air de moitié. »

« Oui, mais on ne pourra plus parler bagnole à la cantine. »

« Vous parlerez littérature, ça élèvera un peu le niveau. »

« A qui va-t-on vendre nos 30 millions de voitures ? »

« A des pays qui ne sont pas encore endettés pour qu’ils le deviennent. Après tout, on leur vend bien des avions. »

« Et pour partir en vacances on fait comment, personne ne fera Lille-Saint Tropez en vélo, avec les valises sur le porte-bagage. »

« On ne part plus. On profite des vacances pour se cultiver sur place : lecture, cinéma, théâtre, conversations entre amis… Bref, on fait du lien social. »

« Et en cas d’urgence ?»

« Je n’ai pas interdit les ambulances qui arriveront plus vite à destination, puisque la circulation sera quasiment inexistante. »

« Et l’emploi dans le secteur automobile, vous y avez pensé, hein ? »

« On construira des voitures pour ceux qui nous les achètent. Anciennement nos voitures étaient fabriquées en Asie. Maintenant, c’est nous qui fabriquerons leurs automobiles. Je sais : c’est le monde à l’envers. »

« Votre programme est complètement irréaliste. »

« Oui, tout à fait. »

« Alors pourquoi cette proposition ? »

« Pour culpabiliser les gens. Se faire soigner, il parait que c’est trop cher. Se faire former aussi. Donc je propose de se séparer des bagnoles, ce que personne ne voudra faire. C’st le meilleur moyen de continuer à ne rien faire. »

« Donc ne rien faire, c’est votre programme électoral. »

« Non, mon programme, c’est de proposer des choses irréalistes pour ne rien faire. »

« Ce n’est pas terrible comme programme. »

« On ne fait rien, mais on montre où sont les problèmes. A chacun de voir ce qu’il peut faire. »

« Moi, je n’ai pas envie de me culpabiliser à cause de la bagnole ou de mon patrimoine, je préfère rouspéter contre le gouvernement qui ne fait rien. Vous pourriez quand même prendre des mesures impopulaires pour que je me mobilise.  Comme ça, ça animera un peu la presse et lors des prochaines élections, j’exprimerai mon mécontentement devant votre immobilisme. »

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