Deux sérendipiteurs
29 décembre, 2016« A l’Université, on devrait apprendre à hésiter, à tergiverser, à se tromper. »
« C’est vrai. Quand on pense au nombre de choses qui ont été découvertes par sérendipité : la bande velcro, le post-it, la pénicilline, le Téflon… Il faudrait apprendre à faire exprès de se tromper. »
« En fait, notre problème, par moment, c’est d’abandonner nos démarches apparemment rationnelles pour solliciter le hasard. »
« Oui, mais si j’abandonne mon travail rémunérateur pour espérer gagner une fortune en jouant au loto, ce n’est pas de la sérendipité, puisque je n’ai rien inventé. »
« Vous avez raison, ne confondons pas sérendipité et paresse. Certes Christophe Colomb a découvert l’Amérique en se trompant, mais il s’était tout de même embarqué pour un objectif bien précis. Ce n’était pas un glandeur. »
« Il n’en reste pas moins vrai qu’il faut savoir fait confiance au hasard. Si je tire au sort des notes de musique, il y a une probabilité non nulle que je crée un chef-d’œuvre musical. C’est rare, mais ça peut exister. »
« Ce n’est jamais que le jeu de pile ou face. »
« Peut-être mais le jeu de pile ou face, lorsqu’on gagne, ne débouche pas sur une création ayant une valeur pour les hommes. »
« En fait, certains disent que le vrai sérendipiteur n’est pas celui qui fait confiance au hasard, mais celui qui sait tirer parti de circonstances imprévues. »
« Voilà un homme qui peut s’appeler un opportuniste, ce qui est en général mal vu. »
« Euh, non. Un opportuniste tire parti des circonstances dans son unique intérêt, sans se laisser embêter par des principes moraux. Un sérendipiteur a une attitude, en général, plus généreuse. »
« Si vous vous cognez contre quelqu’un dans la rue sans le faire exprès, vous pouvez tomber sur quelqu’un qui vous intéresse ou pas. Si votre rencontre est positive, vous pouvez décider instantanément de construire une relation efficace avec la personne (amour, travail). Vous avez alors démontré votre capacité à profiter d’une circonstance inattendue. »
« Il faut donc apprendre aux jeunes qu’il faut chercher rationnellement les chemins de leur vie, mais qu’ils peuvent aussi se présenter à eux de manière inopinée, auquel cas il faut pas lambiner 107 ans avant de les exploiter, même s’ils n’avaient pas pensé à cette voie qui s’ouvre devant eux. »
« C’est une compétence qui pourrait se confondre avec l’adaptabilité, sauf qu’il faut y ajouter une petite dose de chance et une bonne pratique du pifomètre pour sentir les potentialités d’une circonstance fortuite. »
« Exemple : vous et moi. En me prenant dans votre voiture quand je faisais du stop à cause de la grève du bus, nous avons su exploiter la situation en ayant une conversation intelligente au lieu de parler de la pluie et du beau temps. »