Le principe d’agglomération
20 novembre, 2016« Vous avez remarqué ? Souvent, les gens se précipitent en masse au même endroit. »
« Oui, dans les villes, par exemple, on peut se demander pourquoi les gens s’entassent ? »
« Je pense que ça les rassure. Là où il y a beaucoup de mes contemporains, je ne risque pas de me trouver tout seul en cas de difficultés. »
« Oui, et puis si beaucoup de gens convergent vers le même endroit, c’est qu’il y a quelque chose d’intéressant à voir, donc j’y vais aussi. »
« Même si cet afflux crée une pollution dont tout le monde pâtit, comme la ruée sur les autoroutes entre le 14 juillet et le 15 août. »
« En plus, il y a un effet boule de neige, plus les gens sont nombreux à s’agglomérer quelque part, plus la foule attire d’autres personnes. »
« Cette tendance à se regrouper ne va pas sans contradiction. Quand les gens se sentent trop nombreux en agglomération, ils s’empressent, dès qu’ils le peuvent, de bâtir une petite maison sur un petit bout de terrain, à l’écart de la ville. »
« Eh oui ! Chacun aime chacun, mais enfin pas trop quand même ! »
« C’est extraordinaire ! Tout le monde veut aller à la plage en été, mais comme il y a trop de promiscuité, chaque estivant se remue pour trouver ‘un petit coin bien tranquille’ ».
« Au final, ce sont toujours les plus riches qui trouvent le petit coin bien tranquille, puisqu’il se fait de plus en plus rare. »
« Mais comme l’homme est à la fois solitaire et grégaire, les riches en ont bientôt marre de leur petit coin bien tranquille, et ils y font donc venir d’autres riches pour être plus nombreux, entre riches. »
« Quant aux pauvres, ils vont en vacances là où il n’y a pas de petit coin bien tranquille, c’est-à-dire là où il y a une foule de touristes pauvres aussi, qui rêvent d’un petit coin bien tranquille. Vous suivez ? »
« A peu près. Mais les pauvres ont quand même accès à un petit coin bien tranquille : leur propre logement où il peut prendre ses vacances ‘tranquille’.. »
« Quand l’homme a usé et abusé de son ‘petit coin bien tranquille’, le voilà qui repart à la recherche d’un endroit où les gens s’attroupent en nombre, comme les boites de nuit par exemple. C’est l’endroit où il y a beaucoup de gens, beaucoup de musique, beaucoup de bruit, où l’on ne s’entend pas parler. L’homme aime beaucoup : il appelle ça s’amuser. »
« A défaut, il peut aussi aller au stade où il se rassure en hurlant comme un débile avec plusieurs milliers de ses congénères. »
« Là aussi, il y a une ségrégation sociale, entre les pauvres qui sont dans les endroits les plus mal placés et qui mugissent comme des démons et les riches qui sont dans les tribunes, qui crient aussi, mais de manière distinguée. »
« Oui, l’homme aime à s’agglomérer, mais pas avec n’importe qui. »