Archive pour février, 2016

Une histoire napoléonienne

29 février, 2016

Près de la gare d’Austerlitz

Il a acheté un beau harnais pour son cheval

Puis, il a pris un bus à impériale,

De couleur magenta.

Chez lui, il prépara un veau marengo,

Mais ce fut la Bérézina.

Il dit : ça se corse !

Pour éviter le mot de Cambronne.

Mission spéciale

28 février, 2016

« Dugenou, je vais mettre mes erreurs sur votre dos, si ça ne vous dérange pas. »

« Si, ça me dérange un peu tout de même ! »

« Vous pourriez me rendre ce service. De toute façon, vous êtes honnête, prompt à reconnaitre vos erreurs, donc vous pourriez en accepter quelques-unes de plus. Les gens seront admiratifs devant votre courage. »

« Oui, mais enfin, vous pourriez vous charger de vos erreurs, vous-même. »

« Non, ce n’est pas possible. Moi, je ne suis qu’un arriviste infaillible. Je ne me trompe pas. Je ne pense qu’à ma carrière. Je suis d’une mauvaise foi écœurante. Si je deviens honnête, les gens vont s’inquiéter de ma santé. »

« Vous savez tout de même que ce genre de manœuvre ne vous grandit pas. »

« Je n’ai pas l’intention d’être grand. Où vous avez vu jouer ça ? Avec vous, Dugenou, le problème c’est que vous ramenez tout à une question de dignité. On n’a pas le temps, Dugenou ! On n’a pas le temps ! »

« Bon, alors, d’accord. A propos, je suis coupable de quoi ? »

« Euh… je n’en sais rien. Allez-vous mêler à la conversation devant la machine à café et dès que les gens rouspètent, dites que c’est de votre faute et que la direction n’y est pour rien. Ce n’est pas compliqué, ils râlent tout le temps. »

« Je suis donc votre bouc émissaire ! »

« Oui, voilà, ça m’arrange. Et essayez de prendre l’air convaincu de tous vos péchés au lieu de prendre cet air rigolard. »

« Il faudrait que je sois au courant de toutes vos erreurs pour m’en charger correctement. »

« Ne vous en faites pas. Dès que je vais en commettre une, je vous convoque pour vous admonester sévèrement. »

« Je pourrais bénéficier de compliments de temps à autre ? »

« C’est-à-dire que vous ne faites pas grand-chose pour vous en attirer. »

« Et pour mes congés, on fait comment ? Vous pourriez morigéner Dumollard quand je ne suis pas là. Il serait bouc-émissaire remplaçant. »

« Comment ça ? Dumollard ne fait rien ? »

« Il colporte des ragots sur le dos des autres. C’est un vrai boulot ! »

« Vous avez raison. Vous allez constituer une sorte de task-force avec Dumollard. Il me faut des glandeurs de votre niveau pour assumer tout ce qui ne va pas dans l’entreprise. C’est ce qui s’appelle utiliser chacun en fonction de ses compétences. »

« J’aurais préféré assumer tout ce qui va bien. »

« Non, je ne veux pas trop vous charger, ça, je m’en occupe. »

Bah !!!

27 février, 2016

A Rabat

Sa boucherie vend des abats

Et des bas

Aux ménagères avec leurs cabas.

Mais là-bas

Il tient aussi un café-tabac

Où il  vend des abat-jour.

Il dit souvent : à bas les paresseux !

J’en reste baba.

A notre rayon boucherie

26 février, 2016

Jeanne aime tailler une bavette avec Louise.

Elles discutent le bout de gras.

Jeanne s’est acheté un nouveau collier

Et un filet pour chasser le papillon.

Louise mange des noix

Elle trouve le boucher mignon.

C’est quasi-sûr,

Rien ne se mettra en travers de ce deux-là !

Le chemin de la gare

25 février, 2016

« Vous m’avez mal renseigné tout à l’heure. Je vous ai demandé le chemin de la gare et je suis arrivé au stade municipal. »

« Oui, c’est possible. Moi, je ne sais pas grand-chose. »

« Moi non plus, je ne sais pas grand-chose. Entre les gamins, la femme, le boulot, les vacances à préparer, la bagnole à réviser, les visites chez le toubib pour qu’il me dise que je n’ai rien… je ne m’en sors plus. Je n’apprends plus grand chose de la vie. Mais quand même, il me reste un fond de connaissances. Je ne suis pas complètement ignare.»

« Depuis que j’ai appris par cœur la liste des départements et des os du corps humain à l’école primaire, mes connaissances n’ont pas beaucoup progressé. »

« Vous exagérez. Moi au lycée et en fac, j’ai appris plein de choses : la trigonométrie, le latin, l’histoire des faits économiques et sociaux…. Bref, je suis un petit peu cultivé quand même. »

« C’est vrai, moi aussi, on m’a enseigné plein de trucs, mais je n’ai pas imprimé. Heureusement qu’il y a Google. Pour aller à la gare vous auriez dû consulter Google. »

« Et voilà ! Nous sommes esclaves des nouvelles technologies. Figurez-vous que je suis l’un dernier à refuser de posséder un portable ou une tablette. Je vis libre. Cela me permet d’entretenir un semblant de relations avec mes semblables. »

« Compliments !  C’est donc pour entretenir un semblant de relations humaines dans cette ville que vous m’embêtez avec des questions auxquelles je ne sais pas répondre. »

« Oui, vous ne trouvez pas notre conversation enrichissante ? »

« Elle aboutit surtout à me faire constater mon ignorance. Je ne vous aime pas tellement. Je préfère les gens qui cherchent leur chemin sur Google et qui ignorent que je ne connais rien en dehors du chemin pour retourner chez moi. »

« Le mieux, ce serait d’inventer un faux Google qui induirait tout le monde en erreur, ça obligerait chacun à apprendre quelque chose ou alors à demander poliment un renseignement à son voisin. Ce serait – en quelque sorte – l’application qui permettrait de rétablir des relations civilisées. »

« Je ne crois pas que les grands opérateurs de la planète numérique soient vraiment d’accord. Ils font leur beurre sur le dos de l’ignorance des hommes, de leur paresse à apprendre et de leur orgueil qui les empêchera de demander leur chemin à leur prochain. »

« Résumons-nous. En l’absence d’Internet, il est donc impossible de savoir où est la gare. Comment faisaient nos pères et nos grands-pères ? »

« Ils étaient courageux, obligés d’apprendre plein de trucs ou alors d’interroger leurs voisins quand ils ne savaient pas. Vous vous rendez compte du stress qu’ils étaient obligés de supporter ! Aujourd’hui, on peut être paresseux et ne rien connaître, ça n’a aucune importance. En plus, on n’est pas obligé de demander son chemin à un individu qui nous plait pas et qui risque de nous tromper. »

« En effet, quel progrès ! »

C’est le pompon !

24 février, 2016

Tous sur le pont

Ce n’est pas le moment de faire le pont

Le pontife arrive

A Joinville-le- Pont

Dans sa Pontiac.

Il n’a pas coupé les ponts.

Même si beaucoup d’eau a coulé par en-dessous.

Les Ponts et Chaussées sont prêts !

Ma personnalité

23 février, 2016

« Je suis n’importe qui. »

« Comment ça, n’importe qui ? Vous avez bien une identité comme tout le monde ? »

« Oui, j’ai une tête, deux bras, deux jambes, une santé à peu près bonne, je vote, je respecte la loi, je travaille, j’ai des gamins. »

« Ah ! Vous voyez ! »

« N’importe qui (ou presque) pourrait en dire autant. Donc je suis n’importe qui. Si vous préférez, ce que je viens de décrire, c’est l’individu standardisé que nous sommes tous. Certes, c’est comme pour les bagnoles, il y a des options. Vous pouvez avoir fait des études littéraires ou scientifiques, vous pouvez avoir deux ou trois gamins, vous pouvez être commerçant ou salarié, etc…. Mais il reste un tronc commun : un volant et quatre roues. »

« Et alors, c’est ce qu’on appelle la vie ! »

« Non, ce qu’il y a d’intéressant chez moi et chez vous, c’est l’autre individu, celui qui n’est pas n’importe qui. »

« Ah bon ? Vous avez fait sa connaissance. »

« C’est un peu compliqué parce qu’il se dérobe. Mais je le coince parfois. Quand je parle tout seul, c’est surement lui qui s’exprime, sans me demander mon avis d’ailleurs. Ou alors quand je fais n’importe quoi, je ne suis plus n’importe qui. Vous voyez ce que je veux vous dire ? »

« Euh… c’est un peu compliqué votre affaire. »

« Non, c’est très clair. Votre identité officielle est limitée, pour le reste c’est un terrain vague sans début ni fin. Et d’ailleurs chaque fois que vous essayez de préciser un coin de vos pensées, vous ouvrez une autre perspective informe. »

« Bon, récapitulons. Vous êtes en train de me dire que je suis incapable de me décrire complètement. »

« Evidemment ! Le jour où on pourra tous dire qui on est de manière exhaustive, on  sera tous robotisés. C’est ça que vous voulez ? »

« Ah oui ! Je n’y avais pas pensé. Je vais donc entretenir mon espace infini de liberté. »

« C’est ça, vous commencez à comprendre. Ce n’est pas trop tôt. Mais méfiez-vous, ce n’est pas si facile que ça. On a tous été formatés pour rester n’importe qui. »

« Comment je fais alors pour sauvegarder ma liberté individuelle ? »

« Le mieux, c’est de ne pas chercher à se définir. Les gens qui vous disent que vous êtes trop comme ci ou pas assez comme ça, toisez-les d’un regard compatissant. Ils n’ont rien compris, votre personnalité échappe à leurs misérables analyses. Elle est indéfinissable et doit le rester. D‘ailleurs, je suis partisan d’exclure le mot ‘personnalité’ du vocabulaire, il donne l’impression d’une chose finie dont on peut faire le tour. »

« Bon, je note que je n’ai plus de personnalité. »

Houhou !

22 février, 2016

Youhou !

Fit Loulou

En cherchant de la houille

Avec sa houe.

Hou ! Hou !

Répondit Fatou

Où va-t-elle

Avec son bout de chou ?

Cueillit du houx ?

Nullard, mais pas tout seul

21 février, 2016

« Moi, j’imite tout le monde. J’ai la même bagnole avec GPS, le même téléphone, les mêmes vêtements. Je parle vite. Je dis ce que tout le monde dit. »

« Et vous êtes fiers de vous ? »

« Le problème n’est pas là. Il s’agit d’être bien accepté. Je n’ai pas envie d’être rejeté du groupe, c’est très déstabilisant. »

« Et d’abord, qui c’est tout le monde ? »

« C’est ceux que je rencontre dans la rue, au bureau ; ceux qu’on nous montre à la télé. »

« Et quand l’opinion publique est partagée, vous faites comment ? »

« Je me mets du côté du parti le plus nombreux. Je n’ai pas envie de prendre des risques. Se sentir minoritaire, c’est démoralisant. »

« Vous êtes assez lâche finalement. »

« Oui, mais nous sommes les plus nombreux dans ce cas. Les lâches sont en bonne santé. Les risques sont pris par les courageux qui ne s’en relèvent pas toujours. Je trouve qu’il y a une bonne répartition du travail. »

« Pourtant, c’est intéressant d’avoir des idées personnelles et de les confronter à celles des autres. »

« Vous trouvez ? Le problème, ce n’est pas de savoir si c’est intéressant. Moi, je pense qu’il vaut mieux être d’accord avec tout le monde. Au moins, l’opinion publique parle d’une seule voix. Sinon, c’est le bordel, tout le monde tire à hue et à dia et on ne sait plus vraiment ce que veut le peuple. »

« Il faut bien, de temps en temps, qu’il y ait une tête pensante qui émerge pour faire passer de nouvelles idées. »

« Pourquoi pas ? Moi, je le suivrais après avoir vérifié à la cafétéria et à la cantine que tout le monde est d’accord. Il faut que les idées nouvelles se transforment en évidence partagée, validée par la télé si possible, sinon ce n’est pas une idée nouvelle. »

« Prenons un exemple concret : la préservation de l’environnement. »

« Bien sûr que je suis pour, puisque tout le monde est pour. »

« Pourtant, il y a vingt ans, vous vous en fichiez royalement. »

« Peut-être, et alors ? J’ai suivi l’opinion sur ce point. La sagesse populaire, ça existe. Encore faut-il accepter de n’être qu’un petit élément du peuple, et ne pas faire la malin en jouant les francs-tireurs. »

« Vous pensez donc que votre grande modestie vous permet de faire les bons choix dans la vie, en vous calquant sur les autres. »

« Oui, comme ça, si je me trompe, je ne suis pas tout seul. »

Double jeu

20 février, 2016

Dans l’Indre, il ne cesse de se plaindre.

Thomas a mal à l’estomac,

Mais il n’a pas d’entorse au torse.

Il a une tache sur la moustache.

Son maçon est tombé dans l’escalier en colimaçon.

Il ne devrait pas faire de commentaire et se taire.

Il ne manque pas d’air, il n’a pas de salaire.

Il s’est rapproché de son rocher,

Où il ne fait rien, prenant prétexte de ce texte.

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