D’un père à son fils
1 septembre, 2015« Tu n’aimes pas aller au lycée ? »
« Non, pas vraiment, ça me gave. »
« On y apprend pourtant plein de choses intéressantes. Les campagnes de Napoléon, par exemple. Ses rêves de grandeur sont tout à fait exaltants pour les jeunes. »
« Euh… je crois que ça s’est mal terminé. Si je cassais la figure à tout le monde dans le quartier sous prétexte de grandeur, je pense que tu ne trouverais pas ça spécialement exaltant. »
« Et les grands philosophes ? Voltaire, l’apprentissage de la liberté d’opinion … qu’est-ce que ça te dit ? »
« Il est intéressant, mais j’ai pas envie de vivre à côté de la frontière pour me barrer au premier coup dur. »
« Bon… alors apprend au moins l’anglais, ça te servira plus tard. Les anglais font ce qu’ils veulent dans le monde. »
« Euh… l’accent français les fait marrer. Je veux bien être dominé mais pas ridiculisé. »
« Alors qu’est-ce que tu n’aimes pas au lycée ? »
« Faire ma toilette tous les matins. En plus, il faut toujours être certain de porter les bonnes baskets, le bon jean, sinon tu passes pour un arriéré… »
« Et alors ? Tu pourrais imposer ton style : retour aux années 60, avec une cravate, un blazer, un pantalon non troué, un petit cartable porté à la main au lieu de pendouiller lamentablement dans le dos. »
« Euh… Tu tiens à me revoir en vie ? »
« Moi, ce que j’en dis… C’était pour te dire que tu peux aussi positiver en apprenant à imposer ton originalité. Tu ne connaitras rien à la vie de Napoléon ou de Voltaire, mais au moins tu ne passeras pas inaperçu ! »
« Pourquoi tu me dis ça ? Pourquoi tu ne me crie pas dessus comme tous les parents ? Tu n’es pas normal ! Mon avenir minable qui se dessine lentement, ça ne te fais rien ? »
« Bof, avec ou sans Voltaire… finalement… »
« Et comment je ferai pour briller dans les diners en ville ? Hein ? Tu y as pensé ? Tu es complètement irresponsable. »
« Euh… l’important, c’est d’être un homme libre. »
« Et voilà… sous le prétexte d’apprentissage de la liberté, tu me laisses libre de faire n’importe quoi ! Je vais mal tourné, c’est sûr ! Personne ne me tient en mains! Et les valeurs de la République, qui c’est qui va me les transmettre ? »
« J’en ai marre, c’est toujours de la faute des parents ! »