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9 septembre, 2014« Sous prétexte que les ressources naturelles diminuent, il faut tout partager. Votre voiture, vos vêtements, vos machines à laver… et bientôt votre logement. »
« Et alors ? On ne pourra pas construire des logements à l’infini ! »
« Oui, mais moi, je n’ai pas envie de partager mon intimité avec un étranger. Je l’ai déjà fait pendant dix ans de mariage, alors merci bien… »
« Qu’est-ce qui vous dérange ? »
« Il faut tout le temps se justifier : pourquoi la vaisselle n’est pas faite ? Pourquoi je fais le ménage le mercredi ? Pour quoi je regarde des émissions débiles à la télé ?… »
« Oui, pourquoi ? »
« Mais j’en sais rien ! Il n’y a pas forcément des raisons à tout ce que je fais ! Et puis, il y a pire : imaginez que mon colocataire ne supporte pas que je traine les pieds quand je suis en pantoufles… Eh bien, je vais être obligé de lever les pieds en marchant ! »
« Et alors… »
« C’est très contrariant. Le droit de propriété, c’est le droit de se laisser aller sans motif et surtout de ne pas se justifier à tout bout de champ. J’ai besoin d’un espace vital où n’importe quoi est permis et tout à fait normal. »
« Vous pensez à tous ceux qui n’ont rien. Si personne ne veut partager, ils n’auront toujours rien. L’humanité sera partagée entre ceux qui n’ont rien et ceux qui ont quelque chose. »
« Oui, j’y pense et ça me dérange. Mais les possédants doivent-ils pour autant se rendre malheureux en partageant leurs biens durement acquis ? »
« Essayez au moins de partager quelque chose entre possédants. Faites du covoiturage pour aller au bureau par exemple !»
« Pour que mes collègues critiquent ma façon de conduire ! C’est la meilleure façon de s’engueuler. Dans le meilleur des cas, il faudra trouver un sujet de conversation tous les matins, c’est encore pire que les voyages collectifs en ascenseur ! »
« Eh oui… le partage des ressources, c’est aussi un partage humain ! »
« Le mieux serait que je partage les biens de mon voisin, sans être obligé d’être aimable et bavard avec lui. »
« Non, ce n’est pas possible. Il faut participer à la vie collective. »
« C’est une forme d’asservissement votre truc. Moi j’aime ma liberté individuelle et ma liberté, c’est de trainer les pieds si j’ai envie de trainer les pieds ou d’insulter grossièrement les autres conducteurs en voiture, s’ils m’énervent. »
« Bon, je vois : il faudrait arriver à partager votre imbécilité… »