Archive pour le 19 juin, 2014

Le sportif et le lecteur

19 juin, 2014

« Je fais du sport pour préserver ma santé et retrouver la ligne. »

« Moi, je ne fais rien. Le sport, c’est très fatigant. Après, je suis obligé de me reposer et je ne peux donc rien faire d’autre.  C’est ce qui explique mon embonpoint. Je préfère me cultiver, faire faire du sport à mes neurones. »

« Moi, je fais aussi du sport pour maigrir. Le problème c’est qu’en faisant du sport, je prends du muscle, que le muscle c’est lourd, donc je grossis. »

« Oui, à vous voir, on dirait un pilier des All Blacks. Vous ne devez pas être très intelligent pour être aussi costaud. »

« Détrompez-vous pour triompher dans les mêlées de rugby, il faut être malin. Considérer que les sportifs sont des idiots est une idée reçue. Certains font des phrases. »

« Des phrases ? Comme : on va faire mieux la prochaine fois, ou alors : on va tout faire pour gagner ! »

« Ce sont déjà de belles preuves de confiance en soi. Ils ne sont pas si nombreux les gens qui croient en leur destin. Vous, est-ce qu’avec vos bouquins, vous vous sentez prêtes à empoigner la vie ? »

« J’empoigne la vie des autres et je regarde si ça me plait. J’ai plus de choix que vous.. Je peux connaitre des aventures maritimes ou alors des grandes histoires d’amour ou encore mener une enquête policière… »

« Finalement, vous êtes assez cohérent. En restant sur votre fauteuil, vous attrapez du cholestérol ou du diabète, et entre deux visites de l’infirmière, vous avez le temps de lire vos romans. »

« C’est mieux que de ne rien faire entre deux séances de musculation… »

« Figurez qu’écouter son corps, ce n’est pas ne rien faire. Votre corps a beaucoup de choses à dire sur vous, vos angoisses, vos envies… On ne s’écoute jamais assez. »

« Moi, il me dit surtout qu’il a faim… »

« Justement, si
vous ne l’écoutez qu’aux heures du repas, vous vous réduisez à un tube digestif. Après vingt siècles de civilisation, c’est un peu juste ! Vous voyez, je lis peut-être Bibi Fricotin, mais j’ai des réflexions d’ordre philosophique… »

« Bibi Fricotin, ça existe encore ? »

« Euh… finalement… on pourrait s’organiser entre nous. On se met à la retraite, on fait du sport ensemble et après vous me faites la lecture pour améliorer ma culture littéraire. Je ne peux pas vous proposer de faire du sport à votre place, tout de même ! Tandis que vous, vous pouvez me parler de vos livres, j’aime bien votre voix ! »

« Vous ne manquez pas d’air. C’est moi qui fais tout ! »

« Euh… Oui. »