Archive pour avril, 2014

Tirer les Rois

6 avril, 2014

« Je voudrais un Roi. »

« Un Roi ? Pourquoi ? Nous pouvons très bien nous débrouiller seuls ! »

« Un Roi pourrait nous réunir sous sa bannière pour courir sus à l’ennemi. Comment feriez-vous sans Roi pour savoir qui est l’ennemi de la patrie ? »

« Il n’est pas obligatoire d’avoir des ennemis, nous sommes tous en êtres humains. Et si on a des ennemis, il n’est pas absolument nécessaire de leur casser la figure. Bref, si un Roi sert à écraser les voisins, je préfèrerais m’en dispenser. A fortiori, si c’est le Roi des voisins et ses troupes qui nous écrasent. »

« Bon, alors admettez qu’il nous faut un arbitre pour décider du bien commun. Par exemple, quelqu’un qui dira si la route doit passer près de chez moi ou près de chez vous. »

« Non, nous sommes grands, nous pourrions décider que la route passe à mi-distance entre votre maison et la mienne. Ce serait raisonnable. Et puis, comme ça, vous ne pourrez pas intriguer auprès du Roi pour obtenir gain de cause. »

« Vous êtes un utopiste. Le monde est fait d’injustices et pour en profiter, il suffit d’être bien placé à la Cour. »

« Vous m’y faites penser : s’il y a un Roi, il va vouloir disposer de courtisans pour le rassurer. Autrement dit, nous aurons à payer un tas de gens qui se croiront importants, et qui ne feront rien, si ce n’est brosser les chaussures royales. »

« Un Roi, ça symbolise la nation. Vous pourriez vous reconnaître dans sa personne, surtout en tant de crise. »

« En tant de crise, j’essaie de m’occuper surtout de ma propre personne et de la survie de ma famille. Ce n’est pas votre Roi qui va me nourrir »

« Vous êtes pénible, avec vos raisonnements terre-à-terre ! Admettez au moins qu’il faut quelqu’un pour assurer la justice sociale. Qui va répartir l’impôt entre les citoyens, s’il n’y a pas de juge suprême ? Hein ? »

« Euh… ça se termine toujours de la même façon, le Roi va faire payer les plus pauvres pour être sûrs qu’ils restent pauvres. Il n’y aura pas de riches sans pauvres. »

« Il peut exister des Rois soucieux d’équité. Regardez Saint-Louis ! »

« Il a surtout inventé les séjours exotiques au Moyen-Orient, mais à part ça… Et puis, même s’il y avait un Roi juste, son gamin voudra sûrement être Roi aussi. Je ne suis pas assuré que le gamin sera aussi juste que son père. Les jeunes d’aujourd’hui perdent le sens des valeurs, c’est bien connu ! »

« Alors on fait quoi ? »

« On reste dans le bazar, c’est la meilleure garantie de la démocratie. »

Nos mauvais poèmes

6 avril, 2014

César est homme

Qui vit dans un mobil home

En mâchant du chewing-gum

Et buvant du rhum.

Parfois il mange une pomme

Et de la tomme

Avant de faire un somme

Et de se rendre sur le forum.

Pif, paf, boum !

4 avril, 2014

Il a tout pris dans le pif.

C’était pourtant un crack.

Mais son projet a pris une claque

Il a fait plouf.

Ce n’était pas  du toc.

Désormais, il vend de l’ail

Ainsi que de la houille.

Et il organise des boums !

Où va-t-on ?

3 avril, 2014

« Je suis sur Terre, mais je ne sais pas pourquoi. »

« Personne ne sait, mais on y est. On est bien obligé d’aller jusqu’au bout. »

« Le plus fort, c’est que le durée de vie augmente. On ne sait pas pourquoi on est là, mais on essaye d’y rester le plus longtemps possible. C’est curieux. »

« C’est probablement qu’on s’y trouve bien. »

« En plus, on éprouve le besoin de se reproduire dans nos enfants pour être sûr d’être encore un peu là, même quand on n’y sera plus. »

« On pourrait être aussi bien ailleurs, sauf que personne n’a expérimenté l’ailleurs. Sauf les astronautes, mais ils savent qu’ils vont revenir. »

« Comme on ignore la raison de notre présence, nous sommes obligés de nous inventer des objectifs, c’est-à-dire des raisons d’exister. »

« Et si, par miracle, une entité surnaturelle vous révélait le pourquoi de la présence de l’Homme sur Terre ? »

« J’en connais qui seraient bien embêtés, ce sont les hommes politiques. Ils ne pourraient plus faire semblant de savoir où l’on va. »

« Finalement, je trouve que c’est mieux qu’on ne sache pas. J’aime bien ce petit degré d’incertitude qui plane sur le déroulement de ma journée quand je me réveille. Quand vous sautez dans vos pantoufles, vous n’êtes jamais sûr de retrouver votre lit le soir. »

« Oui, mais moi, je préfère quand même savoir ce qui va se passer ou du moins en avoir une idée. Je peux mieux me préparer. » 

« Il faut admettre qu’il y a un mystère non résolu. Personne ne vous dira le but de votre existence. Il faut faire avec. »

« C’est une escroquerie. Moi quand j’emmène Josiane en vacances, je lui dis où on va. »

« Vous la privez d’une surprise bonne ou mauvaise. Imaginez que quelqu’un de bien placé vous dise où va la race humaine. Cela pourrait être une situation apocalyptique : la guerre, la famine, la dégénérescence de la race… auquel cas vous seriez très déçu. Mais l’aboutissement de l’histoire de l’Homme pourrait être aussi  très favorable : la vie éternelle, la félicité, la richesse pour tous… auquel cas vous vous sentiriez frustré de ne pas arriver plus vite à ce stade. »

« Si je vous comprends bien, mieux vaut ne pas savoir où l’on va. Mais vous n’avez pas envisagé qu’on puisse aller nulle part ? »

« Comment ça nulle part ? »

« Une situation de surplace. En l’an 15000, on en serait toujours au même point : les déficits, le chômage, les violences urbaines, la guerre au Moyen-Orient et il y aurait encore des gens qui feraient semblant de très bien savoir où l’on va. »

A l’imprimerie

2 avril, 2014

Max a été arrêté par la police

Il n’a pas pu justifier

Son séjour dans la capitale.

Aux autres, il ne laisse guère de place

Tant il est gras.

Son discours est brouillon.

Il vit en marge de la société.

Il n’est jamais dans la ligne.

Avec lui, il y a toujours du tirage.

Nuançons nos propos

2 avril, 2014

« La sensiblerie c’est de la sensibilité affectée ou outrée. Le mot est employé de manière très péjoratif pour désigner un individu qui en fait beaucoup. »

« Autrement dit, il est permis d’être sensible, mais pas trop ! »

« Exactement, c’est comme l’impudeur et l’impudicité. A la rigueur, vous avez le droit de faire preuve d’impudeur, mais si ça devient de l’impudicité, c’est très mal. Vous êtes quasiment un obsédé. Prison immédiate. »

« Bon, le diable est dans la nuance, donc ! »

« Absolument. Si vous aimez la bonne chère en connaisseur, sans vous goinfrer, vous êtes un fin gourmet. Si vous vous jetez comme un affamé dès qu’un met vous plait, vous êtes un gourmand, ce qui est – rappelons-le au passage -  un péché. »

« Si je comprends bien, il y a une vocabulaire pour des gens modérés et un dictionnaire pour ceux qui exagèrent. »

« Ce n’est pas faux, mais il se peut aussi que l’exagération dans l’expression ait un caractère positif. Par exemple, si vous formulez des vœux pour ma réussite à mon examen, ça veut dire que vous vous intéressez à mon sort, que ma réussite vous tient à cœur et je vous en remercie. Par contre, lorsque vous formez des vœux pour une bonne nouvelle année, on sent tout de suite que vous vous en fichez complètement. De toute façon, vous employez la même phrase pour tout le monde. »

« Bien ! Donc j’essaierai de formuler quelque chose d’original au prochain jour de l’an. Vous en avez beaucoup d’autres comme ça ? »

« Oui. Le dimanche matin, vous vous éveillez après une bonne nuit de sommeil tandis que, la semaine, vous êtes réveillé par la musique de la radio que vous avez programmée. Vous saisissez la nuance ? »

« Euh… non, pas trop ! »

« Quand vous vous éveillez, vous sortez du sommeil par vous-même. Lorsque vous êtes réveillé, vous êtes vidé de votre lit par un élément extérieur. Vous ne pourrez jamais dire que vous êtes éveillé par le passage des éboueurs sous votre fenêtre. »

« Donc, il faut faire attention à la manière dont on s’éveille ou réveille. »

« Et puis, à la façon dont vous vous exprimez à table. Si vous vous contentez de couper le poulet, c’est que vous faites ça n’importe comment, alors que si vous le découpez, c’est que vous vous y prenez comme un pro en respectant les formes de l’animal. »

« C’est tout ? Je peux retourner à mon atelier. J’aime bien le bricolage. »

« Justement, il faut faire attention, même dans votre atelier de bricolage. Quand vous cloutez une planche, ça veut dire que vous la fixez avec des clous. Lorsque vous clouez une chaise, vous avez intérêt à choisir de jolis clous, parce que c’est une garniture. C’est pour faire joli. Vous comprenez ? »

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