Le vieux lion
« Je suis un vieux lion, assis sous son baobab préféré qui regarde le crépuscule mauve tomber sur la savane africain grouillante de vies enfiévrées. »
« C’est une métaphore bien entendu ? »
« Si on veut. J’observe avec bienveillance mes jeunes lionceaux jouer auprès de leur mère avant l’heure de la tétée. »
« Vous avez donc des enfants. »
« Oui, je ne me suis pas privé. Les jeunes adultes sont déjà partis au loin pour se frotter aux lois de la jungle. Parfois l’un d’entre eux fourbu et surpris par la dureté des épreuves, revient auprès de moi pour une aide ou un conseil. »
« Alors, vous lui dites quoi, en langage lion ? »
« Je lui dis que la vie est ainsi faite que rien n’est facile. Il faut savoir s’endurcir pour durer. Je lui tape sur l’échine de ma grosse patte et il repart plein de vaillance au combat. »
« Vous ne vous ennuyez pas sous votre baobab ? »
« Pas trop, je repasse les différents moments de ma carrière, les épisodes glorieux de ma jeunesse. J’étais un chasseur intrépide, un glorieux combattant, respecté et craint dans la moitié de l’Afrique. Au moment de ma retraite, j’ai reçu mille marques de déférence de tout le continent. Même les zèbres étaient émus. »
« Bon et maintenant ? »
« Je converse avec le vieux tigre qui est également retiré des affaires, non loin d’ici. A nous deux, nous faisons encore peur. Nous sommes les pépés flingueurs. Et puis juste avant la sieste du matin, je vais boire un petit coup à la rivière. Ainsi, le temps passe vite avant le grand départ vers les mânes de nos ancêtres. »
« Et pour tous les chasseurs que vous avez massacrés, pas de regret ? »
« Euh… qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? Quand on arrive avec un fusil entre les mains dans votre jardin, je suppose que vous n’attendez pas d’être tiré comme un pigeon. Et puis je n’en ai pas déchiqueté tellement. Le plus souvent, je leur flanquais la frousse d’un gros rugissement, et ils fichaient le camp. »
« Si je comprends bien Altesse, vous régniez par la force ou au mieux par la crainte qu’elle inspire. »
« Bin…oui, je ne suis pas assez intelligent pour faire autrement. Et puis, la force, c’est la seule chose que tout le monde respecte dans ce bas monde. »
« Et c’est ça que vous apprenez aux jeunes ? »
« Non, il faut un peu de ruse aussi. Tenir compte du sens du vent lorsqu’on passe à l’attaque, par exemple. »
« On est toujours dans la métaphore ? »
« Euh… je ne sais pas… »
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