Archive pour le 23 février, 2014

Espérances

23 février, 2014

« C’est bientôt Noël. L’attente de Noël a toujours été un moment délicieux. La fébrilité et l’adrénaline monte. Vais-je avoir le cadeau de mes rêves ? »

« Moi, Noël, ça m’énerve. Le jour de l’An aussi. Il faut se réjouir sur commande parce qu’on change d’année. Je me demande s’il y a bien de quoi se mettre en joie. »

« Vous ne comprenez rien. C’est un rite. Il faut que l’être humain attende des dates avec espérance. Après Noël, l’homme normal va avoir son attention tendue vers ses vacances de ski en février. Puis vers l’arrivée du printemps. L’homme doit toujours vivre en espérant, c’est comme ça que ça marche. »

« Si c’est pour être déçu après chaque rendez-vous, avouez que ce n’est guère motivant. Depuis le temps qu’il est déçu l’homme, il devrait commencer à comprendre. Il pourrait se contenter d’exister. »

« Oui, alors là, on se rapproche du règne animal. L’antilope n’a aucune faculté à se projeter dans l’avenir. Vous me direz qu’elle ne s’en porte pas plus mal. »

« Elle ne sera jamais déçue, en effet. Finalement le choix est d’aller de déception en déception ou de rien à rien. »

« Il faut des rythmes à l’homme. Imaginez un peu qu’on ait numéroté des jours de 1 à N depuis la nuit des temps, qu’il n’y ait plus de fêtes nationales, plus de saisons… et bien, nous serions une société de déprimés ! »

« Bon d’accord, mais on pourrait améliorer les choses en enlevant les déceptions. Par exemple, tous les enfants qui n’ont pas eu un beau jouet à Noël pourraient voir leurs déceptions rachetées par l’Etat. »

« Euh… par ces temps de disettes budgétaire, vous croyez que… »

« Ou alors si le printemps n’est pas à l’heure, il faudrait déposer une plainte au Vatican pour que le Pape intervienne auprès de Qui-vous-savez. »

« Euh… ce n’est guère possible, c’est une affaire de climatologues. »

« Bon autrement dit, vous êtes en train de me dire qu’il vaut mieux être gruger à chaque fois. Espérer et puis après se débrouiller avec sa déception. »

« Non, on peut aussi espérer et voir son espoir se concrétiser. Par exemple, vous voulez une promotion et hop ! Vous finissez par l’avoir ! »

« Le problème c’est que je vais vouloir autre chose après ! On n’en finit plus. Autrement dit quand ça marche une fois, on continue jusqu’à ce que ça ne marche plus. Et là, on tombe d’autant plus haut que ça a marché les fois précédentes. Vous comprenez ? »

« Oui, et alors ? »

« Mieux vaut encore vivre une déception tout de suite, comme ça on a l’habitude. »