Comment allez-vous ?
10 novembre, 2013« Je ne pense qu’à moi et pas tellement à vous. »
« Moi aussi, je ne pense qu’à moi. »
« Je n’avais pas envie de vous rencontrer ce matin. Je suis obligé de prendre de vos nouvelles alors que ça ne m’intéresse pas tellement. »
« Moi, je n’ai pas forcément envie de vous en donner. C’est assez difficile, sachant que vous vous en fichez complètement. »
« Je dois dire que votre petite santé m’indiffère alors que je n’arrive pas à me défaire d’une laryngite chronique. Vous voyez comme je souffre. »
« Oui, mais je ne vous ai pas demandé comment vous allez. »
« Heureusement parce que j’aurai été obligé de me préoccuper de vos soucis qui sont bien peu de choses à côté des frasques de ma gamine qui s’est encore distinguée en organisant une grève au lycée. »
« Ç’est pour ça que je ne m’inquiète de personne. S’il faut faire semblant de se désoler chaque fois que quelqu’un a un souci, je ne m’en sors plus. Je n’ai pas beaucoup d’appétence pour l’hypocrisie. »
« Il y a des soucis qui méritent plus de compassion que d’autres. Par exemple, le décès du lapin préféré de votre fils, tout le monde s’en fiche. Vous ne voulez tout de même pas qu’on se cotise pour acheter une couronne ? »
« Je comprends… donc je fais bien de ne pas vous dire bonjour aujourd’hui sinon j’aurais encore droit au récit de votre week-end chez votre belle-mère. Ce n’est tout de même pas de la faute de votre interlocuteur si elle ne sait pas faire la cuisine. »
« Le mieux serait de ne pas se demander des nouvelles réciproquement. »
« Euh… oui, mais certains vont dire que ça déshumanise les relations humaines. »
« Bon, alors, il faudrait coter les nouvelles que l’on détient. Par exemple, les talents de cuisinière de ma belle-mère sont de niveau 3 sur 5. Au moment de vous saluer, je pourrais vous dire : bonjour, 3 sur 5. Comme ça vous sauriez tout de suite si j’ai quelque chose d’intéressant à vous dire auquel cas vous pourriez pousser l’entretien. »
« Je suis d’accord, sauf que l’histoire de votre belle-mère vaut un niveau 1 sur 5, grand maximum. Il faut trouver une instance indépendante pour donner une cote aux nouvelles de chacun. Par exemple, Josiane la standardiste pourrait recueillir chaque matin les nouvelles de chacun et les noter sur 5. Elle s’y connait en ragots complètement nuls. Comme ça, il suffirait d’aller consulter son palmarès pour savoir à qui on peut aller dire : bonjour, comment ça va ? »
« C’est peut-être pas la peine, Josiane sait tout avant tout le monde. Il suffirait de lui demander les nouvelles de chacun. »