Archive pour avril, 2013

Partir un jour

9 avril, 2013

« Je n’aime pas les ambiances de gares ou d’aéroport. C’est plein de gens tristes : ceux qui partent et qui se séparent de ceux qui restent. Ou alors, il y a des gens louches qui ne rêvent que de vous dérober votre portefeuille. Et puis pour alourdir l’atmosphère, on rencontre aussi des militaires avec des fusils d’assaut en bandoulière. C’est gai ! »

« C’est tout ? »

« Non, car en plus, je suis stressé. J’ai toujours peur d’avoir oublié quelque chose. Ou bien d’avoir perdu mon billet. Ou encore de monter dans le mauvais train ou le mauvais avion. Dès que j’aperçois un uniforme officiel, je lui demande toujours si je suis bien dans le train ou l’avion où je dois prendre place. C’est assez énervant pour les autres voyageurs qui eux ont toujours l’air d’être sûrs de leur coup ! »

« Vous n’avez qu’à prendre le métro. »

« Bin…là, les gens ne sont pas très gais non plus. Ils vont au boulot ou alors ils en reviennent. Personne n’est très joyeux. Sans compter ceux qui vont à Pôle Emploi et qui sont en situation de fraude puisqu’ils n’ont pas de quoi se payer un billet de métro. »

« Il reste l’automobile. »

« Oui, c’est pas mal. Je me sens plus chez moi. J’arrive à faire mon malin en mettant le coude à la portière. Mais le problème, ce sont les embouteillages : de la promiscuité entre individus, on passe à la promiscuité entre voitures. Certains en profitent pour se montrer dans un véhicule plus puissant que le mien, ça me contrarie. Avec leurs grosses bagnoles, ils polluent beaucoup, ils devraient se dispenser. »

« Et le vélo, vous pratiquez le vélo ? »

« C’est très tendance à condition d’échapper aux automobilistes qui ne font pas très attention en tournant à chaque carrefour. Et puis, j’ai horreur d’arriver tout mouillé de chaud à mes rendez-vous. C’est un très bon moyen de locomotion pour les jeunes. »

« Il reste la marche à pied. »

« C’est pareil que dans les gares. Les gens n’ont pas l’air très heureux. Surtout s’il pleut ou s’il fait froid et qu’ils n’ont pas d’argent pour prendre le métro ou pour avoir une auto. Il y aussi les gens qui marchent plus vite que moi et qui me jette un coup d’œil de commisération en me dépassant. Tout ça, ça pèse sur mon moral. »

« Il faut rester chez vous. »

« Non plus, je m’ennuie. L’idéal serait que je puisse aller quelque part dans un moyen de transport collectif qui enchanterait tous les voyageurs. Ce ne serait pas cher. Tout le monde serait riche, il n’y aurait donc pas de pickpocket. Ça ne sentirait pas mauvais, ça ne polluerait pas. Je ne perdrais jamais mon ticket pour la bonne raison qu’il n’y aurait pas besoin d’en avoir. Je ne me tromperais jamais de wagon. Aucune valise ne me marcherait sur les pieds. Bref, on serait heureux ensemble et je pourrais enfin voyager tranquillement. »

Asseyons-nous

8 avril, 2013

Au début, Louis était un magistrat du siège

Qui avait mis au ban de la société tous les brigands de la région.

Puis il s’est fait élire député dans un fauteuil.

Il allait applaudir l’équipe locale sur les gradins du stade.

Dans tous les cocktails, il dégustait des canapés au saumon.

Il ne faisait jamais banquette.

Mais il avait épousé une pouf

Qui avait exercé le métier de bergère.

Comblé d’honneurs, il a du passé sur le divan d’un psychiatre.

Car il avait été mis sur la sellette dans une affaire de sombre trafic.

Maximes

7 avril, 2013

« On a toujours besoin d’un plus petit que soi. »

« Bin… non, pas moi. Je ne vois pas bien ce que vous pourriez m’apporter. Je vous surpasse dans tous les domaines. Vous ne servez qu’à me valoriser… »

« C’est déjà pas mal. Je valorise bien. Mais ne craignez vous pas la manipulation ? Car tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute. »

« C’est mon coté humanitaire. Je vous permets de bien vivre en me flattant. Par exemple, vous pouvez bénéficier de ma piscine, il vous suffit de dire qu’elle est plus belle que celle du voisin et qu’il est particulièrement agréable de s’y baigner. Ce n’est pas compliqué. »

« Bon, si je comprends bien, vous avez toujours raison, ou du moins, vous aimez bien qu’on vous le dise. On a l’impression que vous souffrez d’une grande fêlure psychologique. »

« Peut-être, mais enfin, l’important c’est que je sois le meilleur puisque la raison du plus fort est toujours la meilleure. Si vous me dites que je suis le plus fort, je suis automatiquement le meilleur alors, n’hésitez pas à me flatter ! »

« Méfiez-vous car, comme disait La Fontaine, il n’est pas mal aisé de tromper le trompeur. »

« Je ne trompe personne. D’ailleurs, La Fontaine disait aussi qu’à l’œuvre, on connait l’artisan. Il suffit d’examiner mon œuvre pour se rendre compte de la qualité humaine de son auteur. »

« Pourtant, vous devriez vous garder de trop vous gonfler d’orgueil. Souvenez-vous de la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf. Eh bien, elle a éclaté ! »

« Elle n’avait qu’à faire attention. L’ambition n’empêche pas l’intelligence. Ainsi le héron aurait du se contenter de ses premières prises au lieu d’espérer une pêche miraculeuse ! Je sais parfois limiter mes objectifs dans l’immédiat, pour mieux progresser dans un second temps. Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. »

« Finalement, vous êtes non seulement fort, mais très raisonnable. On pourrait même dire un homme sage. Je vous citerai en exemple. »

« Je suis comme ça, moi. Prétentieux, mais je ne vends pas la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Que dis-je prétentieux ? Je suis plutôt ambitieux. J’ai la prétention de mes ambitions. Il ne faut point juger l’homme sur ses apparences. Je suis très raisonnable. J’adapte mes objectifs à mes moyens qui –ce n’est pas de ma faute- sont considérables. »

« Vous avez raison, il faut faire avec ce qu’on a. Un Tien vaut mieux que deux Tu l’auras. Ainsi, moi je me débrouille avec mes petites capacités. Je ne vais pas très loin, mais enfin j’y vais tout seul. »

« En toute chose, il faut considérer la fin. L’important c’est que vous atteigniez vos buts, même s’ils sont moins nobles que les miens. »

« Bon, assez parler, j’ai à mener mes petites affaires. J’aime bien parler avec vous.  Faites attention à vous : on se voit d’un autre œil qu’on ne voit son prochain. »

Nos mauvais poèmes

6 avril, 2013

Martin est moche.

Parfois, il s’assoit sur une roche.

Et  regarde dans un miroir sa tète dont il hoche.

C’est vrai qu’il a une drôle de caboche !

En plus, il n’a pas un sou en poche

Pour faire réparer ses galoches.

Et acheter de la bidoche.

Il n’habitera jamais avenue Foch.

Il devrait jouer la mouche du coche.

Pour d’argent remplir sa sacoche.

Ou aller demander l’aumône à sa belle-doche.

 

Le beau toutou

5 avril, 2013

Il fait un temps de chien.

Le gouvernement fait la chasse aux niches fiscales.

Les taxes poussent comme du chiendent.

Il ne nous laisse que des os à ronger.

C’est un vrai cabot.

Pire, un bâtard !

Je suis obligé de reprendre le collier.

Pour payer mes impôts, je serai molosse à l’entrée du cabaret.

Car je suis aux abois.

Je me nourris de hot-dogs.

Secret défense

4 avril, 2013

« Moi, je n’ai qu’une parole ».

« Je n’en doute pas, Monsieur. Mais pourquoi, vous sentez vous toujours agressé ».

« J’en sais rien. Mais je préfère prendre les devants. Il ne faut pas se faire d’illusions, chacun essaie de se faire une place dans la société. Donc, moi j’installe mes lignes de défense avant de discuter, c’est plus prudent ».

« La confiance règne ! Et si vous commenciez par tendre la main avant de mettre en place vos batteries anti-aériennes ».

« On voit bien que vous n’avez pas vécu comme moi. Les gens ne respectent que les armes. Si vous y allez le bec enfariné, vous êtes sûr de vous faire avoir ».

« Non, je suis pas sûr. Peut-être que vous pouvez aussi les intéresser sans être armé jusqu’aux dents. Vous dégageriez un sentiment de sécurité. C’est important de se sentir en sécurité avec quelqu’un ».

« Parce que vous croyez que je me sens en sécurité avec vous ? Vous êtes en train de démolir mon système de défense et il faudrait que je me sente à l’aise ! Non mais où on va là ?»

« Bon, calmons-nous ! Vous voyez bien que je suis venu sans arme »

« Si ! Vous me parlez avec des mots qui sonnent juste, c’est extrêmement agressif. Heureusement que j’ai ma Kalachnikov. Il ne faudrait pas continuer à m’énerver avec vos analyses pertinentes, je me sens pilonné ! »

« Alors qu’est-ce que je dois faire ? Il faut que je me taise ? »

« Non, mais vous pourriez dire des banalités, ça au moins ça rassure. Ou alors avoir un peu peur de moi, suffisamment pour ne pas chercher à me mettre mal à l’aise. Dites-moi par exemple que vous admirez mon allure déterminée et mon assurance ».

« C’est qu’on ne vous sent pas vraiment déterminé ni sûr de vous ».

« Je ne vous demande pas de me sentir, mais de contribuer à la valorisation de ma personne. Vous n’y mettez pas beaucoup du vôtre ».

« Bon d’accord. Alors vous avez des qualités. Vous savez vous imposer en public. Vous parlez franchement. Avec vous, on n’y va pas par quatre chemins. Vous ne faites pas de grandes phrases qui ne veulent rien dire. Droit au but ! Allez hop ! »

« C’est pas mal, mais il manque un peu de compliments sur la profondeur de ma réflexion. Vous allez me faire passer pour un être primaire ».

« Vous exagérez… »

« Non. Et puis regardez-moi avec plus d’attention et de générosité. Moi, un mauvais regard  ça m’excite. Je me sens tout de suite agressé… »

Dansez maintenant

3 avril, 2013

Louise est une grande gigue

De nationalité polonaise.

Elle est d’une constitution gaillarde.

Elle fait tout valser dans la cuisine

Quand elle râpe le fromage.

Elle passe souvent le balai chez elle.

Son mari est souvent bourré.

Il parait qu’il court le cotillon.

Mais Louise ne s’arrête pas aux cancans du voisinage.

Elle a une sarabande d’enfants

Et une vieille guimbarde en guise de voiture

Pour partir en vacances à Java.

La vérité

2 avril, 2013

« J’espère ne pas vous contrarier en vous disant la Vérité. Moi, je dis les choses comme je les pense. Je dis la Vérité que ça plaise ou non. »

« C’est bien de l’arrogance que de se croire détenteur d’une Vérité quelconque ! Disons plutôt que vous dites ce qu’il vous arrange de dire à un moment donné ! Et puisque ça vous arrange vous décernez à votre discours le titre de Vérité pour donner plus de poids à votre argumentation. »

« Ah, bon ? »

« Soyons plus modeste. Disons que nous disons NOTRE vérité. »

« Donc, si je comprends bien, vous ne dites jamais LA Vérité. C’est du propre ! Je vais hésiter à vous fréquenter désormais ! ».

« Vous ne comprenez rien ! Je suis en train de vous dire qu’il n’y a pas UNE Vérité. Je ne vais pas vous dire que je ne dis que des mensonges. En fait, je suis comme vous : je dis ce que je pense bien de dire à un moment donné, mais j’évite de proclamer que c’est la Vérité Révélée. Vous comprenez la différence ? Ce n’est pas compliqué ! Vous vous prenez pour le Bon Dieu ou quoi ? »

« Je n’y ai pas vraiment réfléchi, mais pourquoi pas ? J’ai peut-être un petit bout de Divinité en moi. Chaque fois que j’ouvre la bouche, j’ai l’impression de dire des choses fondamentales. D’ailleurs, certains m’écoutent bouche bée. Il faut dire que je n’ai peur de rien. Je parle cash, sans détour. Je suis courageux. Je rentre dedans ! »

« En effet, vous n’avez peur de rien. Vu la hauteur ou vous vous situez, rencontrez-vous encore des interlocuteurs pour converser avec vous ? »

« Pas toujours. Je suis bien obligé de remarquer que mon goût pour la Vérité n’est pas partagé par tous mes semblables qui préfèrent se complaire dans de petites considérations mesquines et apeurées lorsqu’il s’agit d’affronter les vrais problèmes de la vie. Il faut des hommes de ma trempe pour relever le niveau. On me réclame à cor et à cris dans toutes les discussions.

Mais je ne  peux pas être partout à la fois. D’une certaine façon, vous avez raison : je devrais former des disciples au maniement de la Vérité. Je pourrais fonder une école. Les frais d’inscription seraient sans doute un peu élevés : j’ai de gros besoins. Et je serais très ferme sur la conduite morale de mes élèves »

« Ce ne serait pas une secte, votre truc, par hasard ? »

Dieu et Diable

1 avril, 2013

La vie de Martin a été un enfer

Il faut dire que ce n’était pas un petit saint.

Il a succombé à de nombreux démons.

Il  vit maintenant dans une île située au diable vauvert.

La nature y est encore vierge

Le paysage y est paradisiaque.

La nourriture est du tonnerre de Dieu.

Le vin, c’est le petit Jésus en culotte de velours.

Les gens sont sages comme des anges.

 

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