Archive pour avril, 2013

Liquidités

20 avril, 2013

Depuis que je m’occupe de ma soupe,

Je ne passe plus tout mon temps au café.

J’ai plus de liquide dans mon portefeuille.

Je suis heureux comme un poisson dans l’eau.

Je bois du petit-lait.

Les disputes avec les autres, ce n’est pas ma tasse de thé.

Je crois que j’ai décroché la timbale.

J’ai du bol

Car Louise me glisse des regards veloutés.

Les Gêneurs Professionnels

19 avril, 2013

« A la caisse du supermarché, je tombe toujours derrière la ménagère qui a oublié son code ou alors celle qui a acheté le seul produit du magasin qui n’a pas de prix. C’est usant pour les nerfs. »

« Moi, je suis dans la file de celle qui met trois heures à ranger ses marchandises dans son caddy. D’ailleurs, c’est la même qui a mis son chariot en travers de l’allée de façon à me barrer l’accès au rayon des conserves. »

« Le Gêneur Professionnel me piste partout. Il est encore devant moi au péage de l’autoroute. Il fait semblant de ne pas trouver sa carte bleue pour me retarder le plus possible. Ou alors sa carte bleue ne marche pas et il faut reculer pour passer devant une autre cabine. C’est encore plus stressant quand vous avez dix conducteurs derrière vous auxquels vous devez expliquer qu’il serait sympa de reculer de façon à ce que vous puissiez effectuer la manœuvre. En plein mois d’aout par 35 degré au niveau du bitume, la scène ne manque pas de sel. »

« Ne vous plaignez pas, moi, ils sont plusieurs à m’attendre chez le médecin. J’ai rendez-vous à quinze heures et c’est justement ce jour-là que l’association des Gêneurs a décidé d’envoyer ses hommes de mains pour raconter leur vie au toubib avant moi. J’ai encore en mémoire leur sourire sarcastique dans la salle d’attente au moment où ils se lèvent pour suivre le médecin dans son cabinet. »

« Je vois que vous les connaissez. Moi, ils m’attendent fréquemment dans le train avec de très nombreux bagages à la main pour me bloquer le passage dans l’allée centrale. Les grands jours, ils portent des skis sur l’épaule pour essayer de m’éborgner sans le faire exprès. »

« C’est normal. C’est leur job de se précipiter en masse là où vous êtes pour vous gâcher la vie. Au mois de juillet, sur la plage,  ils viennent étaler leurs serviettes sur la mienne alors que s’ils étaient de bonne foi, ils pourraient très bien le faire à six heures du matin et s’en aller avant que j’arrive. En plus, ils me jettent leur ballon de volley en pleine figure pendant que je lis mon journal pour que je remarque bien leur présence envahissante. C’est très intéressant. »

« Ne m’en parlez pas ! Après la plage, je vais au restaurant en espérant être tranquille. Eh bien, non ! Ils sont encore là pour exiger de la serveuse qu’elle leur explique le menu en détail de façon à retarder très longtemps le moment où je pourrais passer ma commande et celui où quelque chose arrivera dans mon assiette ! »

« Ce sont les mêmes qui se garent à cheval sur deux places de parking de façon à vous obliger à stopper votre véhicule le plus loin possible de votre objectif. »

« On les retrouve aussi à Pôle Emploi, ils essaient de prendre votre place dès qu’un poste de travail se libère quelque part. Ou alors à la CAF où ils font semblant d’avoir une situation personnelle extrêmement compliquée pendant que vous attendez votre tour comme un nigaud ! »

« Je vous arrête ! Il ne faut pas gêner les Gêneurs. Les Gêneurs sont chargés de vous faire perdre du temps et de vous énerver. Sans eux, vous auriez du temps de libre que vous pourriez occuper sereinement. Vous pourriez même devenir heureux de vivre. C’est ça que vous voulez ? Allons, allons, soyons sérieux ! »

Rencontre

18 avril, 2013

« Ce n’est pas la peine de faire des ronds de jambe avec moi, ça ne marche pas. »

« Ah bon ? Vous n’aimez pas l’hypocrisie ? »

«  Pas trop, non. Il faut se parler franchement. Vous vous minaudez un peu trop. Vous me trouvez moche, hein ? »

« Euh…non, ce n’est pas ce que j’ai dit… »

« Vous ne l’avez pas dit, c’est bien ça le problème. Mais je le vois dans le fond de votre œil gauche.  Ce n’est pas très correct de votre part. »

« Vous interprétez mon œil, mais vous pouvez vous tromper. Il faut plus de modestie quand on aborde les autres. Moi aussi, je pourrais vous dire que je lis dans votre œil droit que vous êtes un peu complexée, tout le temps sur la défensive. »

« Moi, sur la défensive ? Alors là, je ris ! Je dis les choses comme je les pense et tout de suite vous vous sentez agressé. C’est donc vous qui vous vous mettez en situation de conflit. »

« Pas du tout ! Et puis d’abord, dire ce qu’on pense ce n’est pas forcément une qualité. Cela peut s’appeler aussi manquer de délicatesse. C’est comme pousser un éléphant dans un magasin de porcelaine et s’étonner qu’il casse quelque chose. »

« Bon, voilà autre chose ! Je manque de délicatesse maintenant ! Vous voyez : j’étais sûre que vous ne pouviez pas me supporter. »

« J’essaie de vous expliquer que la vie collective est une succession de compromis et qu’on ne peut pas s’en sortir en posant des ultimatums à tout le monde tout en se parant de la douce hermine d’une prétendue franchise. »

« Qu’est-ce que c’est que ce charabia. Vous aggravez votre cas. Vous êtes de la race des beaux parleurs. C’est complet. Moi j’appelle un chat un chat. »

« Un chat peut se nommer siamois ou chat de gouttière. La vie est plus compliqué que ce que vous croyez percevoir avec votre philosophie à quatre sous. »

« Moi, philosophe ? Ah, ah ! Je ris. C’est vous qui me baratinez et c’est moi qui philosophe ! C’est la meilleure. Allez-y au lieu de tergiverser, dites ce que vous pensez ! »

« Mais je viens de vous le dire… »

« J’ai rien compris. Avec moi, c’est blanc ou c’est noir. »

« C’est trop manichéen pour moi. Pour moi, vous n’êtes pas moche, mais vous n’êtes pas terrible non plus. Il faudrait que je prenne le temps de m’habituer. »

« Bon, je vois ce que c’est, vous comptez sur le temps pour ne pas répondre aux vraies questions.  Je vous laisse payez les consommations, ça vous pouvez le faire tout de suite. »

A votre santé !

17 avril, 2013

Théo pousse trop loin le bouchon.

Il est d’un caractère bourru.

Il est rond comme une barrique.

Il perd son temps dans les embouteillages.

Il se trouve dans un goulot d’étranglement.

Il a vendangé toutes ses chances de bien tourner.

Si ça continue, il boira le calice jusqu’à la lie.

Il risque de rester en carafe.

Ce n’est pourtant pas une cruche

Ni un cave.

Dans le temps, il fut un beau jeune homme.

Un chef !

16 avril, 2013

«Ça ne peut plus continuer comme ça !  On n’est pas gouverné ! Il nous faut des chefs qui nous disent où l’on va.» 

« Bin … non. Moi, je trouve qu’on n’a pas besoin de chef. Je suis assez grand pour me débrouiller tout seul. C’est très embêtant un chef, ça veut toujours avoir raison même quand ça a tort. Et puis, ils vous disent toujours ce qu’il y a de mieux pour vous. »

« Il nous faut un grand projet collectif qui redonne un sens à la vie commune. Une espèce d’espoir vers une vie meilleure. Un peu de rêve quoi … »

« Ah bon, il y a besoin d’un chef pour ça ? Qu’est-ce qu’il sait de mes rêves votre chef ? Moi, j’ai un job, une famille, mes vacances au Lavandou, tranquille dans mes tongues. Rien que ça, ça me convient très bien. »

« C’est un peu fruste votre affaire. Vous n’avez donc jamais le besoin de savoir vers quel but tend votre pays ? Quel avenir préparons-nous à nos enfants ? »

« Les chefs savent tout ça ? On ne dirait pas. Ils ont déjà du mal à s’occuper du présent. Je propose que ce soit moi qui me soucie de mon avenir. Je les décharge de cette tâche. C’est méritoire, non ? Je prends ma part de boulot..  »

« Avec ce genre de principes, on ne va pas aller très loin. Chacun a des objectifs personnels soit, mais ils sont généralement contradictoires. On a toujours besoin d’un chef pour arbitrer les priorités. »

« L’ennui, c’est que je ne suis jamais dans les priorités du chef. Vous non plus d’ailleurs. En fait, vous voulez un chef qui fasse passer vos intérêts avent ceux des autres, sinon ce n’est pas un bon chef, et vous réclamez alors un ‘vrai’ chef ! »

« Euh… pas du tout ! Un bon chef est un chef qui assume des choix, même impopulaires. Par exemple, s’il augmente mes impôts, je paierai. Je prendrai l’avis de mon conseiller financier avant, et ensuite je paierai ! »

« Tout le monde ne peut pas se payer un conseiller financier. Je crois que vous êtes partisan d’un chef qui ait de l’autorité à condition qu’elle s’exerce sur les autres. »

« Oui, moi j’aime bien faire ce que je veux. Je fais mon boulot, j’élève correctement mes gosses, je donne aux quêtes des Restos du Cœur. Si tout le monde en faisait autant, on n’en serait pas là. C’est pour ça qu’il faut un chef ! Et pas un mou du genou ! »

« Donc, il nous faut un chef qui ait votre point de vue… C’est bien ça ? »

« Oui … et alors, qu’est-ce qu’il a mon point de vue ? « 

« Si tout le monde veut un chef qui ressemble à chacun, on ne va pas s’en sortir. La démocratie,  c’est la loi de la majorité… »

« Mais je suis la majorité. Regardez, dans le quartier… tous le voisins pensent comme moi : on bosse la semaine, on veille aux devoirs des enfants le soir, on tond la pelouse le samedi, on mange du gigot le dimanche, et on recommence. Ce n’est tout de même pas compliqué ! C’est pour ça qu’il faut un chef qui n’hésite pas à réprimer les conduites déviantes ! »

Nouvelle leçon de géographie

15 avril, 2013

Il faut faire un effort  pour voyager : ce n’est pas le Pérou.

J’en  recueillerai des fruits : ce sera Byzance.

Je connaitrai différentes réalités : vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà.

Je ne tiens pas à aller à Canossa.

Ni à subir une conduite de Grenoble.

Et encore moins à  voir Naples et à  mourir.

Je n’irai pas non plus me faire voir chez les grecs.

Par contre, je veux bien aller à Paris, même s’il faut assister à la messe.

Après ça, je me retrouverai à Rome puisque tous les chemins y mènent.

Il faut que je fasse attention à ne pas être suivi par l’œil de Moscou

Allez, c’est dit : je vais franchir le Rubicon.

Restons modeste néanmoins, je ne me prends pas pour le reine d’Angleterre.

 

Un casseur

14 avril, 2013

Il commence à me les briser menus

Avec sa fracture du tibia.

Il casse du sucre sur le dos des autres.

Il veut rompre des lances avec  tout le monde.

Il faut se séparer de lui.

La question est tranchée :

Nous allons dissoudre notre société

Qui fabrique des machines à pulvériser.

Sinon il va nous ruiner.

Drôles d’oiseaux !

12 avril, 2013

Elle est bavarde comme une pie.

Quand il fait froid, elle dit que ça caille.

Mais ce n’est pas une bécasse.

Ni une oie blanche.

Parfois, elle traite son mari Lucien de triple buse.

Surtout quand il trempe un canard dans son café

Et qu’il trouve ça très chouette.

Rien ne l’effraie.

Même pas de conduire sa grue.

Même pas cette lettre anonyme envoyée par un corbeau.

C’est qu’elle a été élevée à la dure, dans la crainte du martinet.

Avec Lucien, elle prendra sa retraite à Milan.

Ils seront comme deux tourtereaux.

Qui sème le vent…

11 avril, 2013

« Qui sème le vent récolte la tempête. Par exemple, si je vous dis que vous n’êtes pas très sympathique, vous allez vous énerver et c’est encore moi qui vais en prendre pour mon grade. »

« Euh… je peux très bien vous donner raison : je suis antipathique. Comme ça, vous ne saurez plus quoi dire et je reprends l’avantage. Pour combattre, on peut aussi accompagner le coup de l’adversaire, c’est une technique très répandue chez les fanatiques des arts martiaux. »

« Et ça ne vous dérangerait pas de reconnaître que vous n’êtes pas très avenant avec les autres. Cela manque de dignité. »

« Pas tant que ça, car ce n’est que votre avis. Et je suis légitime à ne pas en tenir compte, donc à ne pas me sentir atteint. »

« Donc vous refusez le combat. Je me donne la peine de vous défiez, ce qui est une marque d’intérêt. Et vous, vous vous contentez d’ironiser. »

« Je refuse de tomber dans votre provocation. C’est un piège grossier. Elle peut cacher autre chose qui n’a rien à voir avec moi. Par exemple, vous avez passé une mauvaise journée et hop ! Vous avez besoin de passer vos nerfs sur quelqu’un ! Merci bien ! Je n’ai pas une vocation de punching-ball. »

« N’ayez crainte, j’ai passé une très bonne journée et je vous dis que vous n’êtes pas très sympathique. C’est mon avis. Je ne vous juge pas. Mais tout le monde dit la même chose. »

« Je ne crois jamais les gens quand ils vous disent, la main sur le cœur, qu’ils ne vous jugent pas parce qu’ils sont en train de faire l’inverse. Et puis, vous vous faites le porte-parole de tout le monde, c’est un peu facile. Je ne sais pas qui c’est, moi, tout le monde. Je peux aussi vous dire que tout le monde me trouve charmant, c’est invérifiable. Il ne suffit pas d’affirmer qu’on parle au nom de tout le monde ! »

« Donc vous refusez de vous énerver, de déclencher la tempête. Vous faites mentir le proverbe, ce n’est pas très bien. »

« Je refuse surtout une discussion qui repose sur des arguments dérisoires, voire sur rien du tout. Je n’ai pas de temps à perdre comme vous. »

« Ah, on progresse, vous commencez à devenir arrogant. »

« Ce n’est pas ce que j’appelle une tempête. Et puis laissez-moi vous dire que vous êtes un irresponsable. Vous recherchez les tempêtes volontairement. On dirait que vous avez besoin de violence pour vous sentir exister. Il faudrait vous faire soigner. »

« Allez donc vous faire soigner, vous-même ! Eh, espèce de dégonflé ! »

« Quoi qu’est-ce que vous avez dit ? Venez-vous battre dehors ! »

« Oh ! on ne peut plus discuter, vous déclenchez tout de suite la tempête de la colère. Moi, ce que j’en dis, c’était pour votre bien… »

Une belle jambe

10 avril, 2013

Jules est en cheville avec Jean. Ils s’entendent bien.

Sauf quand Jules se lève du pied gauche.

Son mauvais caractère est son talon d’Achille.

Quand il crie, Jean va se mettre les doigts de pied  en éventail

Et admirer son gros orteil en attendant que ça se passe.

Il sait que Jules ne casse pas trois pattes à un canard.

Mais il n’aime pas être traité par-dessus la jambe.

Il se croit sorti de la cuisse de Jupiter.

Pour le calmer, Jean lui prépare des œufs cuits mollets.

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