Archive pour janvier, 2013

Les défaites de Maurice

21 janvier, 2013

Maurice avait horreur des fêtes.

Cette perspective lui faisait mal au bide.

Le 24 décembre, il prenait sa veste,

Epoussetait son chapeau d’un revers de main.

Et allait acheter des confitures

Et des gelées de fruits.

Puis, il se mettait à table en se versant un verre de sa piquette préféré.

Le 25 était un jour de repos, il ne l’avait pas volé.

Parfois il faisait une partie d’échecs avec lui-même.

 

 

Parlons !

20 janvier, 2013

« Vos chroniques ne sont guère intéressantes. Vous parlez toujours de la même chose. La communication entre les êtres, la vanité humaine, le mal-être… Vous êtes malade ? Un vrai psychopathe ! On a l’impression que la vie vous a rendu très amer ! »

« Bin… oui, peut-être. J’écris à propos de ce qui me travaille. Et de ce qui peut peut-être intéresser les autres. Si je parle de foot ou de tricot, je vais perdre les trois-quarts de mes lecteurs. Finalement le sujet qui nous réunit, c’est la nature humaine. »

« C’est pas sûr. Moi, si je vous dis qu’il fait beau pour la saison, c’est peut-être nul comme remarque, mais je n’ai aucune envie de savoir que c’est nul, ni que vous vous demandiez pourquoi je passe mon temps à faire des réflexions sans intérêt. Je  n’ai pas besoin de vos leçons. »

« J’essaie d’aller au-delà des évidences. Si on ne s’intéresse qu’à la superficialité des choses, nous n’irons pas plus loin que le dodo-métro-boulot. Nous ne sommes pas des mécaniques ! Nous avons un cerveau ! » 

« C’est ça qui est gênant. Il ne faut pas que je réfléchisse à ma condition, ça me dérègle. Mon médecin préfère que je reste dans mon confort intellectuel. Vous comprenez bien que si je commence à me poser des questions sur le sens de mon existence, je vais sûrement être malheureux. Et recourir à des tranquillisants, aggraver le trou de la Sécu etc… etc… »

« Bon, vous avez raison. Excusez-moi de vous déstabiliser. Qu’est-ce que vous pensez de la météo aujourd’hui ? On dirait que le temps se radoucit. »

« Je ne saurais pas le dire. Pour affirmer qu’il radoucit, il va falloir que nous nous mettions d’accord sur un point de comparaison dans le temps : hier, la semaine dernière, le même jour de l’année dernière ? Vous voyez : votre façon de poser la question devient vite compliquée. Vous ne pourriez pas faire plus simple ? »

« Par exemple ? »

« Dites : tiens, il fait chaud aujourd’hui ! J’ai enlevé une couverture cette nuit ! Des faits, rien que des faits ! »

« Oui, mais le fait que j’ai enlevé une couverture pour dormir ne peut pas vous intéresser ! »

« Oui, je m’en fous complètement. Pour me venger, je vous répondrai que j’ai pour ma part dormi la fenêtre ouverte, ce qui ne nous fera pas avancer non plus. Heureusement. »

« Je comprends. Le problème n’est pas d’avancer. Du surplace, rien que du surplace. Je vais essayer de pratiquer la vacuité du propos. C’est tout un art. »

« Vous voilà enfin raisonnable. On va peut-être pouvoir discuter de choses qui ne servent à rien. Je commence… Il y a du couscous à la cantine aujourd’hui. Mais personne ne le réussit aussi bien que ma belle-sœur, originaire de là-bas… »

« Moi, je n’ai pas de belle-sœur, mais je peux parler des paupiettes de ma tante… »

« Vous recommencez à dévier. Vous apportez une information précise sur votre famille… c’est intéressant, ça ne convient donc pas du tout. Il suffirait d’approuver ce que je dis. Si je vous parle du couscous de la cantine, il suffit de répondre : ah ! oui ! c’est vrai qu’on est vendredi ! Ça, au moins, c’est sans intérêt ! 

Repos !

19 janvier, 2013

Je suis partisan du moindre effort.

Prêt à la détente dans tous les cas.

Capable de prendre toutes sortes de pauses .

Spécialiste des aires de repos.

Amateur de bulles.

Prompt à ne pas gaspiller l’énergie surtout la mienne.

Pointu dans le domaine du calcul de l’inertie des corps, surtout du mien.

Très intéressé par la civilisation des loisirs.

Mordu de la réglementation sur les congés.

Notre rubrique cyclisme

18 janvier, 2013

Dans la ville d’Hyères

Julien ne gagne pas l’étape du jour.

Son « moi » ne va pas en souffrir.

Il veille économiser ses forces.

Il sera moins lent, demain.

Il gère sa course à la petite semaine.

Mais son heure viendra.

Cette année, il doit gagner le Tour.

On dira de lui : Mâtin ! Quel coureur !

Vous êtes au parfum

17 janvier, 2013

« Votre parfum est suave et capiteux. »

« C’est quoi la différence ? »

« Suave c’est quand c’est agréable aux sens, capiteux c’est quand ça monte à la tête en provoquant une sorte d’ivresse. »

« Dites tout de suite que j’aguiche !»

« Bin… peut-être ! Vous comprenez mon odorat est agressé toute la journée. Le matin, ça sent le café, le midi, des odeurs de cuisine, le soir la transpiration des corps. Sans compter les odeurs de pétrole dans la rue, de désodorisant dans les toilettes ou de cuir mouillé quand il pleut… »

« Alors, évidemment dès que vous sniffez un parfum de femme, vous êtes complètement affolé. Il ne vous en faut pas beaucoup ! »

« Peut-être. Ce qui me contrarie, c’est qu’aucune femme n’est bouleversée par mon eau de toilette dont je m’asperge abondamment. Je me suis toujours demandé si une femme parfumée sent le parfum des autres. Peut-être qu’elle se parfume pour ne pas sentir les autres ! Comme une armure odorante»

« Votre eau de toilette ne m’intéresse pas particulièrement…. Il faut que je me sente bien dans mon parfum. C’est tout.»

« Oui, mais on vous suit à la trace. Si c’était plus discret vous pourriez peut-être vous laisser subjuguer par mon eau de toilette.  Vous ne savez pas ce que vous perdez. »

« Je me fais remarquer comme je peux. Vous, vous auriez intérêt à miser sur autre chose que votre eau de toilette pour que je vous observe favorablement. »

 « Finalement, c’est très injuste, vous avez l’autorisation de vous envelopper d’effluves sensuelles et nous, les hommes, il faut qu’on se contente d’une misérable odeur de violette ou alors de sentir mauvais. Si on se parfume, on est pris pour des femmelettes. »

« Euh… non, vous  n’êtes pas obligé d’infester l’atmosphère, c’est très désagréable et ça m’obligerait d’être encore plus capiteuse pour résister. Vous risqueriez de succomber à mon charme aromatique et là on ne s’en sort plus. »

« Bon, alors je sens quoi ? »

« J’en sais rien. De toute façon, je ne vous sens pas. »

« Alors c’est pas la peine que je me ruine en eau de toilette. »

« Euh… oui, ce n’est pas la peine. Mais quand je disais que je ne vous sens pas, je voulais dire que je ne vous aime pas beaucoup. A la violette ou à la rose, c’est pareil, je vous trouve un peu trop bizarre à mon goût. »

Enchevêtrements

16 janvier, 2013

Maurice était un mélange d’homme d’action et de réflexion.

C’était un grand brasseur de bière.

En affaires, il savait entortiller ses clients et fournisseurs.

Il écumait les cocktails.

Très attiré par les buffets, il se servait en salades composés.

Et en méli-mélo de charcuterie.

Puis il se mêlait aux conversations.

Toujours à la recherche d’une bonne combinaison de chiffres, il jouait au casino.

Il aimait aussi le rugby, surtout les mêlées.

Mais il ne supportait pas les embrouilles.

Rouspéter, c’est bon pour la santé

15 janvier, 2013

« J’aime bien discuter avec vous. »

« Moi pas tellement. Vous êtes toujours en train de rouspéter contre tout. Le temps, le gouvernement, les femmes, les enfants… »

« Bin… justement, comme vous êtes content, moi ça me donne la possibilité de faire part de mes problèmes et de rouspéter tranquillement. Avec Marcel, c’est compliqué, il rouspète mieux que moi, je ne peux placer un sujet de mécontentement, il a toujours une raison supérieure à la mienne de ne pas être satisfait. Il arrive à être déçu par lui-même ! »

« En effet, c’est contrariant. Vous n’avez jamais essayé de vous féliciter de quelque chose ? Par exemple d’un bon repas chez la mère Guillaume ? »

« Si pour ce qui est de la bouffe, il n’y a rien à dire. La mère Guillaume sait tenir un bistrot. On peut s’attabler avec les copains, on est bien traité. Et puis, on peut rouspéter pendant des heures contre tout, personne ne viendra nous interrompre. »

« Pourtant l’autre jour, vous sembliez content de partir en congé ? »

« Oui, mais c’était pour mieux protester contre le boulot. »

« Vous n’êtes plus au chômage ? »

« Si, mais ce n’est pas une raison pour ne pas protester contre le boulot, en général. S’il n’y avait plus de boulot, il n’y aurait plus de chômage. Ce qui nous rend malheureux, c’est le manque. Le manque de quelque chose. Si vous supprimez le quelque chose, il n’y a plus de manque. Et s’il n’y a plus de manque, vous n’êtes plus malheureux. »

« J’avoue que je n’y avais pas réfléchi. » 

« Heureusement, on est loin d’en être là. Comme je manque de tout, je ne suis pas près de manquer de sujets de rouspétance. »

« Allons, allons … vous avez une petite famille, un petit logis, un petit… »

« Oui, justement… tout est petit. Même ma taille, je manque de grandeurs. Vous voyez : encore un sujet ! On ne s’en sort pas ! Comment faites-vous pour vous féliciter de tout ce qui vous passe à portée de mains ? »

« N’exagérons pas. Je sais faire la part des choses et ne retenir que le côté positif des choses. Par exemple, quand il neige, je suis content parce que c’est joli… »

« Oui, mais alors pour sortir de chez soi, c’est galère. Moi, je veux bien qu’il neige mais pas devant chez moi. Sur le trottoir d’en face ce serait parfait… mais Jules qui y habite n’est pas d’accord, il n’aime pas prendre la pelle pour déblayer la neige. Quelle paresse ! »

« Bon, finalement je me suis trompé : vous avez une conversation intéressante, je vous en remercie… »

« Vous voyez comme vous êtes. Vous trouvez encore le moyen d’être content et béat de ce que je vous raconte. Pourtant, je ne dis rien de positif. Je n’arrive pas à être aussi négatif que Marcel, mais enfin vous ne devriez pas être enchanté de ma conversation. Moi, quand Marcel me parle de tous ses soucis, je suis ulcéré ! »

Nos mauvais poèmes

14 janvier, 2013

Octave n’a pas de pot.

Il est né dans la ville de Pau

Et aurait aimé naviguer sur le Pô.

Mais il vend des pots

Tout en fabriquant des chapeaux.                  

Très travailleur, il ne connait pas le repos.

Il paie régulièrement ses impôts.

Il ne va pas jouer au tripot

Et ne risque jamais sa peau.

Il n’écoute pas les discours : c’est du pipeau.

Conseils pour dire des choses pas forcément intelligentes

13 janvier, 2013

« Pourquoi vous riez toujours à la fin de vos phrases ? C’est assez agaçant. Et puis on ne comprend pas toujours ce que vous dites. »

« C’est une tactique d’auto-défense que j’ai mise au point depuis longtemps. Comme ça, si je dis une bêtise, tout le monde croit que je me moque de moi-même et que je sais manier l’autodérision. Je passe pour un type qui a de l’humour. L’honneur est sauf. C’est important l’honneur ! Vous comprenez ? »

« Euh… Non, il y a d’autres méthodes si vous craignez de dire des âneries. Vous pouvez, par exemple annoncer : je vais peut-être dire une ânerie mais je pense que…. C’est assez couramment employé. Comme ça, vous prévenez tout le monde et vos interlocuteurs ont le temps de s’attendre au pire. Vous vous en tirez honorablement puisque, si ça tourne mal, vous pourrez dire que vous aviez prévenu votre auditoire de l’indigence de votre remarque. Vous bénéficierez des circonstances atténuantes.»

« Il y a un risque, c’est qu’un esprit fort me fasse remarquer que je ne dis toujours que des bêtises et que, par voie de conséquence, ce n’est pas la peine de le rappeler à tout le monde. L’assistance pourrait s’esclaffer à mes dépens.»

« Alors là, le mieux est de proférer vos stupidités d’un air très sérieux, ça leur donnera beaucoup de poids. Vous ne seriez pas le premier à pratiquer de la sorte. La plupart de vos vis-à-vis ne penseront pas forcément à une gaucherie. Certains vous loueront même pour l’originalité de votre point de vue et la clarté avec laquelle vous l’énoncez. »

« C’est intéressant. Mais si un malin me démontre de manière de manière rigoureuse que j’ai tort, j’ai l’air d’un nigaud puisque je n’aurais pas annoncé que j’allais dire une bêtise. Je resterai bouche bée et bien embarrassé. »

« Il vous reste la possibilité de dire que ce que vous venez de déclarer ne représente que votre point de vue et que vous comprenez très bien que d’autres opinions puissent s’exprimer. Comme ça vous passerez pour un homme qui sait rester solide sur ses convictions et en plus pour un être ouvert qui sait reconnaître la pluralité des avis. Il y a toujours une manière de s’en tirer. »

« Oui, mais enfin, globalement je préfère ne pas être contrarié quand je dis quelque chose, ça me déstabilise. Et puis, je n’ai pas toujours d’arguments suffisants pour dire quelque chose de cohérent sur tous les sujets. On devrait avoir le droit de dire n’importe quoi. »

« En toute dernière extrémité, si vous vous sentez débordé par l’adversité, vous pouvez aussi révéler d’un air satisfait que vous avez dit n’importe quoi pour piquer au vif votre contradicteur, le pousser à réagir et ainsi animer plaisamment le débat. On vous prendra pour un homme très fin qui sait valoriser les autres sans craindre de se mettre lui-même en porte-à-faux ! »

« Oui, c’est pas mal pensé votre truc. Vous avez encore d’autres conseils ? »

« Oui, un dernier tout de même. Le mieux serait de ne pas dire de bêtises. Pour ça, il faudrait vous contenter d’intervenir sur les seuls sujets de votre compétence ! »

Nouvelle leçon d’anatomie

12 janvier, 2013

Il se cassait le nez sur les problèmes de boulot.

Il en avait plein les oreilles.

Et le dos.

Il avait envie de prendre ses jambes à son cou.

Et de partir ventre à terre.

Il n’était pas du genre à se mettre à genoux

Même s’il doit être mis à pied.

Et même si ça doit lui couter un bras.

Il avait les épaules pour supporter la situation.

Et assez d’estomac pour rebondir.

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