L’as des as et le moyen des moyens
3 janvier, 2013« J’ai toujours été premier en classe. »
« C’est une situation qui devait être difficile à gérer. »
« Oui, d’autant plus que j’ai décroché facilement de nombreux diplômes. Au boulot, je suis considéré comme un as. A la maison, je suis un mari et un père modèle. Je ne dois pas décevoir. »
« Je comprends. Moi, j’ai toujours été dans le milieu du peloton. Je n’avais ni les moyens ni l’envie de faire mieux. Juste ce qu’il faut pour s’en sortir. Telle était ma ligne de conduite. C’est beaucoup plus confortable. Comment vivez-vous votre situation ? »
« J’essaie d’être modeste. Je suis excellent en tout mais je ne le montre pas trop pour ne pas me couper du reste du monde. J’espère cependant que les autres s’aperçoivent de temps à autres de mes qualités exceptionnelles. J’aime bien qu’on me le dise. Pas tous les jours, mais quelquefois quand même. »
« Cela doit être dur de crouler sous les compliments. J’ai du mal à imaginer ma réaction dans un tel cas qui ne risque pas de me concerner. »
« Il faut savoir accepter les louanges avec réserve. Je dis que beaucoup peuvent faire aussi bien que moi en étant sûr du contraire. Ou bien, je déclare que mon succès est celui de l’équipe qui m’entoure. Mais, il ne faut pas trop en faire non plus. Sinon, on louera ma modestie en plus de mes qualités intrinsèques. Je ne m’en sortirai plus. »
« Je compatis. Personnellement, je ne risque pas d’être complimenté. Je suis moyen en tout. On ne me remarque pas. Ma modestie est intacte, personne ne cherche à l’éprouver. »
« Vous manquez peut-être un peu d’ambition ? »
« Euh… complètement, oui. Mais vous, comment pouvez-vous en avoir encore puisque vous êtes premier partout ? »
« C’est vrai. J’ai du mal. Quand on est tout en haut de l’échelle, c’est difficile de se maintenir. Parfois certains se hissent à ma hauteur. Il faudrait que je les frappe pour qu’ils redescendent, mais je préfère les applaudir. Comme ça, s’ils montent plus haut que moi, ils hésiteront à me mépriser. On a tous besoin de laudateurs. D’ailleurs, je vous félicite pour l’excellente analyse de votre situation. Il est rare de rencontrer un médiocre qui ait une conscience aussi aiguisée de sa situation. »
« Euh… pas trop de compliments, s’il vous plait. Je n’ai pas l’habitude. Ce n’est pas digne de mon rang dans la société. Je ne sais pas briller aussi bien que vous. »
« Vous avez raison. Je devrais faire attention. Je ne sais pas rentrer dans le rang et m’en contenter sereinement. Il ne faut pas forcer sa nature. Je suis fait pour être admiré. »
« Oui, allez. Bon courage ! Si vous avez besoin d’en parler, n’hésitez pas… »