De l’autorité
« J’ai peur de tout. »
« Ah bon ? »
« Oui, dès que je croise quelqu’un j’ai l’impression qu’il va abuser de son autorité sur moi : mon chef de service, un agent de police, une femme…. Toutes sortes d’autorités : institutionnelles ou naturelles. L’autorité peut s’exercer par le seul regard sur l’autre. C’est le pire des cas. »
« Ce n’est pas très courageux. »
« Je serais sûrement plus courageux si quelqu’un pouvait me concéder une parcelle d’autorité. Je pourrais alors vous impressionner par ma seule présence. Mais moi, je serais magnanime, je m’arrangerais pour ne pas vous faire subir mon pouvoir. Il y a quelque chose de grand à ne pas utiliser le pouvoir qu’on a sur quelqu’un en se mettant à sa portée. »
« Le seul problème, c’est que c’est moi qui ait une sorte d’autorité naturelle sur vous. Je n’ai pas trop envie d’inverser les rôles. Si vous tentez de prendre l’ascendant, ça va m’énerver. Vous savez bien que vous ne supportez la violence verbale. »
« Oui, vous faites bien de le dire. Mais on pourrait chercher un compromis. Par exemple, vous pourriez éviter de me regarder avec cette assurance tranquille comme si vous saviez à l’avance tout ce que je vais dire. Inquiétez-vous un peu de mes réactions. »
« C’est difficile. Vous êtes un peu primaire… »
« Bon, alors interrogez-moi sur ce que je pense de la situation. Généralement, c’est celui qui peut faire état de ses analyses qui domine l’autre. »
« Euh… bin, c’est que je me fiche un peu de votre avis. »
« Bien, je vais me taire et regarder ma montre d’un air impatient. Comme ça, j’aurais l’air de vous prendre pour une quantité négligeable à coté de mes nombreuses obligations. Vous comprendrez alors que vous me faites perdre un temps précieux et vous vous sentirez nettement inférieur à un homme aussi important. »
« Euh … si on pouvait faire vite, parce que j’ai des rendez-vous à l’autre bout de la ville. Je n’ai pas que ça à faire. »
« Bon… là, je me tais…………………….et hop, je regarde ma montre ! Mince, elle est arrêtée. Il va falloir que je change la pile ! Encore un souci ! »
« Mon pauvre, comment voulez-vous que j’ai peur de votre autorité avec votre histoire de pile ? Dites-moi au moins que vous n’avez pas le temps de vous en occuper ! »
« Vous ne comprenez pas. Je suis un homme plus demandé que vous, mais j’étais en train de me mettre à votre niveau en vous faisant partager un souci ménager. Je ne voulais pas vous mettre mal par mon allure déterminée d’homme d’affaires surbooké ! »
« Oui, mais le problème, c’est que je ne suis pas du tout mal à l’aise avec vous. Vous me rassurez.»
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