Un homme d’action
« J’ai eu la malchance de tomber dans un embouteillage. »
« Vous êtes tout le temps en retard. »
« C’est pour mieux me faire remarquer. J’ai envie qu’on m’attende avec impatience, je trouve que ça me donne de l’importance ».
« Vous pourriez essayer d’attendre les autres, ça vous donnerait l’air poli. »
« Non, ça ne va pas. Je n’ai pas envie de me plier à un horaire. Je suis bien au-dessus de ces préoccupations. Je dois être attendu, espéré. Si on pouvait s’inquiéter pendant que j’arrive ce serait encore mieux. »
« C’est très narcissique comme attitude. »
« Oui, peut-être, mais enfin c ‘est comme ça. Là, il va falloir m’excuser parce que j’ai un autre rendez-vous. Je n’ai pas beaucoup de temps à vous accorder. »
« Vous continuez à vous donner de l’importance à vos propres yeux. C’est très grave. Moi, j’ai tout mon temps. Je suis beaucoup plus décontracté. »
« Comment ça décontracté ? Vous n’êtes pas surbooké. Et vous êtes content comme ça ? Vous avez un problème, cher ami. «
« Mon seul problème, c’est de me coltiner des gens comme vous. Je parie que vous n’avez jamais le temps de lire, par exemple. »
« Si le lis le journal : « 5 minutes » tous les jours. C’est suffisant. Moi, je lis vite, je n’ai pas besoin de baratin. »
« Ça doit être du joli dans votre tête. Il ne doit y avoir que les gros titres de journaux et l’heure du prochain rendez-vous. »
« Vous ergotez. Je pers beaucoup de temps avec vous. Il faut aller à l’essentiel. Je suis un homme d’action qui ne se perd pas dans les détails. »
« Ce ne sont pas des détails, c’est un peu de réflexion. »
« Parce que vous vous lisez ? Des livres en plus ? Pourquoi pas de la philosophie, ce serait complet ! On voit bien que vous n’avez pas mon goût pour l’action. Vous devez être du genre à beaucoup parler sans agir. C’est mal. »
« Si Gutenberg ou Edison n’avaient pas pris le temps de réfléchir, on n’aurait jamais inventé l’imprimerie ou le téléphone. Remarquez, ça vous aurait évité d’être suspendu à votre portable toute la journée. Vous vous rendez compte de votre addiction ? »
« Euh, excusez-moi, j’ai un appel. Et puis, il faut que je m’en aille. De toute façon, vous ne m’intéressez pas beaucoup. Vous n’êtes pas très opérationnel. »
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