Un vieux copain d’école
« Tu me reconnais ? »
« Bin… non ! »
« On était ensemble à l’école de la rue Lumière. En CM2. Chez la mère Michu. Moi, j’étais au deuxième rang à gauche. On t’appelait Gros Lard. Ou alors Dugenou. Ou même Pif le chien ! Il faut dire que tu avais un gros nez ! »
« Bin… non ! »
« Si, rappelle-toi : un jour je t’ai cassé la figure à la récré pour une histoire de Malabar ! Qu’est-ce qu’on s’est marré ! Tu te souviens quand on jouait à se lancer ton béret pendant que tu courrais après en pleurant ? Et lorsqu’on te dénonçait chaque fois qu’il y avait un problème dans la classe ? Tu étais puni à tous les coups ! Et le jour où on t’a soufflé tout faux pendant que tu récitais ta leçon au tableau ? Tu as pris cent lignes ! Alors qu’est-ce que tu deviens depuis tout ce temps ?»
« Oh, pas grand-chose ! J’ai fait Polytechnique et l’ENA. Je vais sûrement prendre la direction d’un grand groupe international. Je gagne de l’argent à ne plus savoir qu’en faire. Je vais de palais présidentiels en ambassades. Parfois la tête me tourne. Je vis dans un luxe inouï, entouré de fastes et de femmes. »
« Eh bin dis-donc ! On n’aurait pas cru ça quand on te faisait des croche-pattes dans la cour pour te faire tomber devant les filles ou alors quand on envoyait une lettre anonyme à la maîtresse pour lui dire que tu étais amoureux d’elle. Quelle honte on t’a mis ! Et les raclées qu’on t’administrait dans les toilettes, tu t’en souviens ? Ou alors les réglisses qu’on volait dans ton bureau : c’était moi ! Quels galopins nous étions ! Il est vrai que tu n’as jamais été de taille à te défendre. On faisait à peu près ce qu’on voulait de toi. Tu n’avais plus qu’à aller pleurnicher dans les jupes de la maîtresse et nous on rigolait comme des imbéciles. T’as pas revu Fernand ? C’était le meneur de la bande. Qu’est-ce qu’il t’en a fait voir, hein ? Il faut dire qu’à 14 ans encore en CM2, il dominait tout le monde de deux têtes ! J’espère que tu ne nous en veux pas trop !
A propos tu n’aurais pas une petite place pour moi dans ton grand groupe international ? Hein ? En souvenir du bon vieux temps…»
« Non ! Et je viens justement de voir Fernand pour lui faire la même réponse à la même question. »
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