Archive pour mars, 2012

Valses et hésitations

31 mars, 2012

A l’horizon, un marin flotte sur l’océan.

Je regarde les vagues osciller sur la plage.

Je tourne autour d’un pot de géraniums.

Je balance un galet dans les flots.

Le train plein de touristes se tortille le long des rails.

Je trébuche sur une pierre.

Je me tâte : rien de casser.

Un étranger me demande son chemin : il cherche ses mots.

Il faudrait quand même que je me décide !

Faire du lien

30 mars, 2012

L’oiseau chante sur la branche.

Tandis que je me connecte sur internet.

Après avoir fumé un joint,

Pendant l’assemblée générale.

De l’association des locataires.

Il faudrait que je fasse un raccord de peinture sur mon mur.

Et que je rattache mes rideaux.

Il faudrait aussi que je relie les feuilles de mon roman.

Et que je prenne l’attache de mon éditeur.

Mais il est parti en réunion.

Aux Etats-Unis.

Les conseils de plus en plus ignobles du grand Jacot

29 mars, 2012

« Comment vous faites pour être si beau ? »

« Je prends soin de mon corps. Il n’y a pas d’autres secrets. Il faut faire beaucoup d’exercices physiques. Souffrir. Souffrir encore. Savoir s’accrocher au-delà de ce qu’on croit pouvoir supporter. C’est une discipline de l’esprit, vous savez. Il faut être très fort mentalement. Evidemment si vous arrêtez dès que vous êtes légèrement essoufflé, vous n’êtes pas prêt d’être aussi affuté que moi. Après l’exercice physique, il faut utiliser des produits de beauté. J’ai un dentifrice qui rend les dents blanches, c’est ce qui explique mon sourire étincelant. Je dirais même ensorcelant. »

« Ça existe ? Avec moi, les dentifrices qui promettent une blancheur des dents éternelles, ça ne marche jamais. »

« Vous êtes un peu lourd. Essayez au moins les shampooings qui font les cheveux soyeux. »

« C’est-à-dire que je n’ai plus beaucoup de cheveux. »

« C’est embêtant. Mais enfin… vous avez bien quelque chose à mettre en valeur ? »

« Le nez peut-être. Le reste est assez commun. »

« Qu’est-ce que vous voulez que je fasse avec un nez ? Essayez de marcher pour voir. »

« … »

« Vous avez une démarche en canard. C’est catastrophique… Bon, chantez-moi quelque chose. »

« … »

« Vous appelez ça chantez ? Avez-vous de l’esprit ? Faites moi un mot d’esprit.. »

« L’homme éclata de rire et il fallut ramasser les morceaux ! »

« C’est complètement nul. Votre cas est difficile. Après tout, avez-vous vraiment besoin de vous valoriser ? Le monde est plein de gens transparents. Ce n’est pas aussi grave que ça. D’ailleurs, il en faut des gens sans intérêt, c’est justement eux qui permettent aux autres de briller. Allez, c’est dit ; vous êtes un être définitivement inintéressant. Vous êtes content ? »

« Alors, je peux ne pas me laver les dents et ne pas me brosser les cheveux ? Ou alors dire n’importe quoi ? »

« Je ne vous ai pas dit d’être sale et débile. J’ai dit inintéressant. Ne commençons pas à jouer sur les mots. On peut être propre et complètement nul. Je ne peux pas vous aider plus : je n’ai jamais été capable d’être inintéressant, mais je connais plein de gens dans ce cas qui pourraient vous conseiller pour être parfaitement médiocre. »

A la porte, à la fenêtre

28 mars, 2012

Il a pris le battant de la porte dans le nez, ce n’est pas un battant.

D’ailleurs, il a des poignées d’amour.

Et puis, il ne sort jamais de ces gonds.

Il est marié à une petite espagnole : une espagnolette.

Elle a l’esprit d’ouverture.

Elle le fait grimper au rideau.

Il n’est pas près de prendre la porte.

Ni la clé des champs.

Il souffre tellement de jalousie !

Ce sera le dernier volet de son existence.

Les conseils électoraux du grand Jacot

27 mars, 2012

«Persuadez-moi de voter pour vous. A priori vous n’avez pas beaucoup de charisme. Dans votre œil gauche,  on lit l’impression que vous doutez de votre propre discours. On se demande toujours si vous êtes convaincu de ce que vous dites. On a même l’impression que vous vous demandez si vous connaissez le sujet dont vous parlez.

Donnez-moi un peu d’espoir dans des lendemains enchanteurs. Votre réforme fiscale ne me fait pas rêver. Votre conception de l’éducation et de la culture m’endort. Parlez-moi de moi. Autrement qu’en me rappelant que j’ai des dettes, c’est assez enquiquinant comme ça. Trouvez quelque chose qui me donne confiance en moi-même. Donnez un élan à ma créativité. Ayez l’air au-dessus des contingences matérielles.

Ne faites pas de grands moulinets avec vos bras, c’est agaçant. Ne vous pincez pas le nez en parlant, vous donnez l’impression de mentir comme Pinocchio. Ayez la voix rauque et puissante, pas ce petit filet que l’on n’entend pas. Parlez devant le micro comme vous parleriez sur le zinc d’un bistrot. Faites des confidences, même si tout le monde les connait. Ou alors dites des blagues, mais des bonnes. Pas celles qui ne font rire que vous.

Le mieux ce serait un mot d’esprit. Ayez le sens de la formule. Celui de la synthèse aussi.

Donnez l’impression de vous adresser à chacune et à chacun.  Donnez-vous de l’élan comme si vous alliez passer par-dessus l’estrade. Transpirez du front, vous aurez l’air de vous donner à fond. Ne citez pas le nom de vos adversaires ce serait leur faire trop d’honneur.  Ils ne le méritent pas.  Moquez-vous d’eux sans en parler. Raillez-les.

Mettez vous à la place de celui qui vous écoute. Que va-t-il raconter autour de lui, le soir à la veillée ?

Citez des hommes célèbres. Ne vous mélangez pas les pinceaux en citant leurs phrases.

Parlez de vous. Ne dites pas que vous sortez d’un milieu modeste et que vous vous êtes fait à la force du poignet. Tout le monde s’en fout. Chantez la Marseillaise, un peu faux, pour avoir l’air ému. Laisser le temps aux gens d’applaudir entre les paragraphes. Déchainez-vous de temps à autre pour faire passer un vent d’émotion.

Ne répondez pas aux questions. Ne donnez la parole à personne.

Dites-moi quelque chose.

Des gens importants

26 mars, 2012

Maria vends des légumes, de grosses légumes au marché.

Ainsi que des bouteilles d’huile.

Elle a de la personnalité, Maria.

C’est notable !

Et elle n’est pas du genre à prendre de l’héroïne.

Comme Paulo qui chante à ses cotés de sa voix de ténor.

Mais Paulo n’est pas une célébrité comme Maria.

Même si c’est une ancienne gloire du cyclisme.

Et qu’il se promène en vedette sur le lac.

Devoir de français

25 mars, 2012

« Votre devoir est bourré de fautes d’orthographe. Et je ne parle pas des fautes de grammaire ou de la faiblesse de votre vocabulaire. »

« J’ai pourtant fait bien attention. »

« C’est encore pire. Qu’est-ce que ça doit être quand vous ne vous appliquez pas ! Je préfère ne pas y penser. »

« J’avoue que je n’ai pas toujours le temps. La vie est tellement trépidante maintenant. Vous savez ce que c’est : on est toujours en train de courir après le temps. »

« Il y  a des règles. Il faut les apprendre et les appliquer. »

« Les règles, c’est très ennuyeux. Moi, je suis plutôt pour la liberté. »

« Y-a-t’il une liberté individuelle possible sans respect des règles collectives ?  Vous pourriez réfléchir à cette question au lieu de jouer au foot à la prochaine récréation. »

« Alors là, c’est très philosophique, ça vole trop haut pour moi. »

« Comprenez au moins que c’est le langage qui nous unit. Donc si vous écrivez n’importe comment vous vous excluez vous-même de la société. Vous allez finir comme un marginal ».

« Tout ça parce que je n’ai rien compris à l’accord avec le verbe avoir. C’est cher payé. Si je comprends bien l’orthographe est compliquée pour que les gens compétents puissent rester entre eux. C’est l’oligarchie de la conjugaison ! »

« C’est une interprétation audacieuse. L’orthographe est le produit de l’histoire du langage. Elle évolue dons dans le temps. Vous devez adopter les règles en vigueur à votre époque. »

« Ah ! J’en déduis donc que lorsque j’écris n’importe comment, je fais moi aussi évoluer l’histoire du langage ! Vous avez devant vous quelqu’un qui est en avance sur son temps. Je ne m’en étais pas aperçu, mais maintenant que vous le dites… »

« Ça m’étonnerait. Il faudrait que beaucoup de gens écrivent aussi mal que vous pour que ça devienne bien. Il faut que l’usage se manifeste avant d’admettre une évolution dans la langue. Vous comprenez ? »

« Bin… pas trop. Ce qui est mal devient bien si tout le monde le fait. En gros, c’est ça ? »

« Euh… bin… en attendant, vous avez zéro à votre devoir. »

« Je trouve que c’est un peu sévère, il vaudra peut-être vingt dans cinquante ans. Méfiez-vous des jugements à l’emporte-pièce. Je vous propose de surseoir à la notation car vous pourriez commettre une grave erreur. Vous pourriez anéantir ma carrière scolaire. Vous vous rendez compte de la responsabilité que vous prenez ? »

« Hé bien, on en reparlera. Passez me voir dans cinquante ans, je vous promets de relire votre copie avec attention  »

Grosse fatigue

24 mars, 2012

La mère de famille prépare le repas. Elle est très fatiguée.

Elle a moulu le café.

Elle a fait une tarte avec une pâte brisée.

Maintenant elle est sur le flan.

Bientôt, elle sera sur les rotules de son mari.

Les enfants se chamaillent : elle leur fait le coup de la barre de chocolat pour qu’ils se calment.

Il faut aussi qu’ils renouent leurs lacets.

Le père de famille s’est mis à table. Il a rompu le pain.

Puis, il a  vite épuisé les sujets de conversation.

Peur sur la campagne

23 mars, 2012

Dans la nuit noire, le pneu de Jules s’est dégonflé en pleine campagne.

Il positionne son triangle pour avertir les autres usagers de la route: il balise leur trajectoire.

Il sort de sa voiture en chemisette. Il a froid dans le dos.

Jules  n’aurait pas du manger du veau à midi, mais il n’avait plus que les foies dans son frigo.

Il sort du coiffeur qui lui a fait une jolie brosse : il a les cheveux dressés sur la tête.

Il aperçoit une cabine téléphonique : heureusement il a les jetons nécessaires pour appeler.

Il réveille sa copine Phobie.

Elle part à son secours sans peur, bleue de froid néanmoins.

Jeux de mots compliqués à comprendre

22 mars, 2012

Louis est un mari infidèle.

Jean n’est pas de sa famille : c’est un faux frère.

Louis ne comprend pas un traître mot de ce qu’il dit.

Mais il sait que Jean a vendu la mèche.

Louis va confesser son péché au Père Fide.

Puis il retourne travailler dans son champ avec sa faux.

Avec son ami René, gars de la Marine avant d’être paysan.

En chemin, il s’achète un tapis noir pour l’offrir à sa femme.

Il se dit que la situation  redevient normale : ainsi Dieu l’a voulu.

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