Deux ethnologues très courtois
27 octobre, 2011C’était Julia qui les avait amenés dans notre groupe. Ils poursuivaient les mêmes études en informatique. Elle avait dit :
« Vous verrez, ils sont très sympas ! »
Effectivement, ils étaient d’un abord particulièrement engageant. Ils avaient tous les deux un sourire éclatant continuellement accroché aux lèvres. On avait l’impression que c’était la position naturelle et définitive de leurs bouches lippues. Mada était le plus petit, ses yeux brillaient entre des fentes qui prenaient souvent l’allure d’accents circonflexes. Ses cheveux en épis ne connaissaient pas le peigne ou avaient définitivement abandonné l’ambition d’être domestiqués. Romy, le plus grand ouvrait de grands yeux noirs, qui paraissaient maquillés parfois. Personne n’a jamais vérifié ce point. Il avait une silhouette plus sèche que son compère. Peut-être était-il plus âgé.
Les deux avaient un teint de bronze comme on n’en rencontre chez les personnes originaires de l’Océan Indien. Mais je n’ai jamais pu être sûr de leur provenance. Lorsqu’on leur demandait leur pays d’origine, ils souriaient de plus belle et répondaient invariablement :
« Les iles, les iles, très loin, très loin… »
Nous n’avons pas pu savoir de quelles contrée il s’agissait, ni même le nom de l’océan où flottait le bout de terre qui les avait vu naître.