Archive pour septembre, 2011

Un inventeur original

30 septembre, 2011

Il a découvert le fil à couper le beurre.

Juste après avoir tenté de découper le brouillard au couteau.

Il n’avait pourtant pas inventé l’eau chaude.

Pas plus que la pince-sans-rire.

Ni résolu la quadrature du cercle.

Encore moins élevé le mouton à cinq pattes.

Avec Gertrude, il avait trouvé chaussure à son pied.

Elle lui faisait des gâteaux surmontés d’une cerise.

En le priant de ne plus jeter des pavés dans sa mare

Parce que ça pouvait casser trois pattes à son canard.

Préoccupations

29 septembre, 2011

« Je vous la fais courte : il fut réinventer le plaisir ! » 

« Ah ! Bin là, vous avez raison ! » 

« On se fait trop de soucis pour pas grand-chose. Par exemple la forme de Zidane ! On s’en fout, il ne joue plus ! » 

« Ah bon ? » 

« Ou alors la semaine de 4 ou 5 jours pour les gamins ! » 

« De toute façon, le mien est toujours fatigué. » 

« Ou bien encore les soldes. Est-ce que c’est aussi important que ça, les soldes ? » 

« Vous avez raison. Moi quand je vais aux soldes, je repars toujours avec des choses qui ne sont pas soldées ! » 

« Vous n’auriez pas d’autres soucis, mais en plus sérieux ? » 

« Si, par exemple, j’hésite pour mes vacances entre une petite location au Lavandou et l’hôtel de la plage au Grau-du-Roi. » 

« C’est  tout ? » 

« Et vous qui êtes si malin, j’aimerais bien savoir quelles sont vos préoccupations ? » 

« Moi, je réfléchis à la fragilité de la condition humaine. Surtout si on ne sait pas réinventer le plaisir ! Qu’est ce qu’on va devenir ? Vous vous rendez compte nous ne sommes qu’un petit point dans l’espace et dans le temps ! » 

« Ce n’est pas avec ça que je vais réserver mes vacances, mais enfin si ça vous fait plaisir je veux bien être un point. Une fois qu’on a dit ça, qu’est-ce qu’on fait ? Je vous le demande un peu, hein ? Soyons concret ! » 

« Hé bien, mon cher, on commence par être modeste. Vous comprenez bien que l’infinité de l’univers se fiche complètement de l’endroit où vous allez tremper vos orteils ! » 

« Oui, mais Hélène et les enfants, pas tellement ! Bon, allez ! Va pour l’infinité de l’univers… je vous l’accorde, c’est impressionnant ! Mais vous pourriez avoir les soucis de tout le monde ! Ch’sais pas moi ! Votre directeur vous casse sûrement  les pieds et vous vous demandez chaque matin s’il ne va  pas bientôt partir ! Par exemple ! » 

« Bin.. non, le problème c’est que personne n’en veut ! » 

« Ah ! Vous voyez, ça c’est une question ! C’est autre chose que de réfléchir à la raison de notre présence sur Terre !  Vous devriez vous détendre, mon vieux ! Partez en vacances ! » 

« Oui, mais alors où ? Vous ne pourriez pas me prêter vos catalogues pour que je m’y retrouve un peu ? » 

Considération distinguée

28 septembre, 2011

Avec mes plus exquises tendresses.

Mes inclinations les plus obliques.

Mon penchant le plus droit.

Mon attirance la moins rance.

Mon affection qui n’est pas affectée.

La prédilection que j’avais prédite.

Avec vachement d’attachement.

Mes faveurs accompagnées de saveurs.

Ma considération sidérée.

Mon estime intime.

Péché capital

27 septembre, 2011

Le cardinal Dumayet regarde les longs doigts de sa main velue pianoter sur la table de chêne. Il a l’impression que son index s’agite tout seul en se dispensant de son commandement. Il faudrait qu’il fasse attention à ses gestes incontrôlés de nervosité. Dans des négociations difficiles, ce genre de détails peut le mettre en difficultés. 

Son regard balaye encore une fois les reproductions accrochées au mur de la salle de lecture. La bataille de Guernica ! Quelle faute de goût dans un séminaire ! Le Père Supérieur est un vieil original, mais le cardinal pense qu’il devra lui dire deux mots à propos de ses fantasmes artistiques. Son Eminence n’apprécie pas et quand son Eminence n’aime pas, le mieux est d’en tenir compte. 

Les yeux du cardinal Dumayet s’abaissent sur le jeune séminariste qui a pris place en face de lui. Le futur prêtre a le rouge aux joues et au front. La carnation du reste de sa peau se décline dans toutes les teintes de rose. Louis Dumayet pense à une glace à la fraise en le détaillant. Il en sourit. Intérieurement. Car le cardinal n’exprime jamais ses états d’âme. Surtout aujourd’hui. Son regard distant et sévère est redouté dans toutes les paroisses de son ressort. Ses colères donnent à ses ouailles une idée de l’enfer.

(suite…)

Bling-bling

26 septembre, 2011

Elle en restait baba.

Il  l’avait appelée mon coco.

Après lui avoir dit qu’elle était mimi avec son bibi.

Et  qu’il voudrait aller dans son dodo.

Il s’appelait Riri.

C’était un titi parisien.

Il avait des dadas.

Mais n’était pas cucul.

Elle le présentera à sa sœur Sissi

Et à sa Mama et son Papa.

Qui n’étaient pas encore gagas.

La fin d’un rêve

25 septembre, 2011

Ce matin-là, Jenna ne se maquilla pas. Elle se contenta d’une queue de cheval, brossée à la hâte pour ordonner sa belle chevelure blonde. L’heure n’était pas aux démonstrations de coquetterie. Elle sauta dans un de ces nouveaux taxis sans chauffeur qui obéissaient à la seule voix du client. D’une voix embrumée, la jeune femme jeta l’ordre à la machine de la conduire à la gare de Lyon. La journée était grave. Comment avait-on pu en venir là ? 

Nous étions au milieu de l’été. Habituellement désertes dans cette période de l’année, les rues et les avenues étaient envahies de véhicules en tous genres : tramway sur pneus, voiture sur coussin d’air, vélos électriques. Quelques originaux marchaient à pied. Parfois un sifflement d’air obligeait à lever la tête. Les hélicoptères de l’armée sillonnaient le ciel à une vitesse effarante. 

Pendant son trajet, Jenna passa en revue tout ce qui s’était passé pendant ces dernières années en espérant découvrir les racines profondes des évènements récents. 

La croissance économique était revenue. L’espérance de vie avait dépassé cent ans. Dans les magasins l’argent coulait à flots, les coffres des banques ne désemplissaient pas. Il n’y avait plus beaucoup de travail, mais il était équitablement partagé. De toute façon, ceux qui n’avaient pas d’emploi disposaient de rentes confortables distribuées par l’Etat. Lorsque des conflits surgissaient dans la société, des assemblées populaires se réunissaient. Chacun pouvait s’exprimer. Le parlement tranchait et l’exécutif exécutait sous le contrôle des élus du peuple. Jenna avait œuvré pour cette société idéale et en éprouvait une grande fierté.

(suite…)

Baaaaaaaaaaah!

24 septembre, 2011

L’espionne sentait mauvais, elle donnait la nausée à Bond.

Malgré son mal au dos,  rentrant dans son appartement malodorant,  Bond  l’arrêta.

Dans sa masure, la femme était une peste qui empestait.

Depuis sa fenêtre, elle  lançait des boules puantes.

Dans une atmosphère fétide,

Elle se tenait accroupie, les pieds dans de l’eau croupissante.

Elle élevait des insectes infects.

Elle ramassait tout, sans dégout, dans les égouts.

Les autres

24 septembre, 2011

Si tout le monde faisait son boulot, on n’en serait pas là !

Il faudrait quand même qu’ils apprennent à vivre ensemble !

On se demande ce qu’ils ont appris à l’école !

Leur attitude manque de respect vis-à-vis des autres !

Ils pourraient faire preuve d’un peu plus de considération !

C’est toujours sur les mêmes que ça tombe !

Les gens sont d’un sans gêne !

On se demande comment ça se passe chez eux !

Ça  doit être du joli !

Des vendanges interrompues

22 septembre, 2011

Le minibus de l’oncle Iqbal avait remonté une fois de plus la vallée du Rhône en s’arrêtant tous les cinquante kilomètres sur une aire d’autoroute. D’abord parce que, selon l’oncle, le moteur chauffait rapidement et ensuite parce que la tante Hannah avait le mal de mer. 

Il est vrai qu’à neuf dans cet atmosphère confinée, nous n’étions pas particulièrement à l’aise et que les cent cinq kilos de la tante peinaient à trouver leur place. J’ai dit à l’oncle Iqbal que son véhicule ne nous transporterait pas une année de plus. Je n’aurais pas du. Pour lui, tout allait bien. En m’écoutant, il a gratté sa panse ventrue à travers son maillot de corps maculé, il a reniflé rudement, il a lissé sa moustache humide, puis il a fait le tour de son minibus. L’examen terminé, il a déclaré qu’il ne voyait aucun problème, l’engin était comme neuf malgré ses deux cent cinquante mille kilomètres. 

Bref, j’étais arrivé là avec l’oncle, la tante et une ribambelle de cousins dont j’oubliais le nom lorsque l’été revenait. Il me semblait reconnaitre Mouslim qui s’appelait peut-être Raouf les années précédentes. Mais à quinze ans, les corps changent vite et l’oncle n’avait jamais été très fixé sur les prénoms de ses gamins, ni très attentif à ne pas mélanger les papiers d’état-civil. A vrai dire, il entretenait de nombreuses relations dans les milieux « d’affaires » au pays ce qui nécessitait d’après lui de manipuler un grand nombre de cartes d’identité ou de passeports. 

Toujours selon l’oncle Iqbal, il fallait que nous les jeunes, nous apprenions à gagner honnêtement notre vie d’une part, et que nous nous familiarisons avec les voyages d’autre part. Ce qu’il nommait « les affaires » étaient réservées aux grandes personnes.

(suite…)

Message de la direction

21 septembre, 2011

Dans un certain sens, il a raison.

La direction manque de fermeté.

Il faut aller de l’avant.

Avant le dimanche de l’Avent.

Pour ne pas perdre le nord,

Tout en surveillant ses arrières.

La ligne droite est le plus court chemin.

Laissons les détails derrière nous,

Pour ne pas aller au devant d’ennuis,

Et pour ne pas être à coté de la plaque.

123