Le sens de l’existence
12 juillet, 2011J’entre souvent dans cette église. Une vieille habitude. J’aime la rumeur de la rue qui s’estompe, puis le silence de la prière qui s’installe, la pénombre qui m’engloutit et l’autel éclairé qui éblouit. Seul avec soi-même. Eventuellement avec Lui, au cas où il existe. Quelques bigotes sont là, courbées sur leurs prie-Dieu. Parfois une de leurs silhouettes sombres se détache et esquisse une génuflexion dans la nef centrale avant de s’enfuir à petits pas vers une vie de grisaille. Quelqu’un tousse, puis se racle la gorge.
Et puis, je la vois, mi-cachée par un pilier. Elle porte un fichu aux couleurs chamarrées, un imperméable clair qui tranche sur les tenues habituelles en ces lieux. Son regard noir et brillant fixe la croix qui étend ses bras au-dessus du tabernacle. Ses lèvres roses balbutient. Une prière sans doute. Je m’installe à ses cotés. Ce n’est pas le moment de penser à la bagatelle, mais j’éprouve le besoin irrépressible d’en savoir plus long à propos d’une présence qui ne me regarde sans doute pas. Ma phrase d’introduction est d’une banalité affligeante, je m’en rends compte au moment même où je la prononce.
« Vous venez souvent ici ? »
Elle tourne vers moi un visage inquiet qui se rembrunit encore un peu plus au moment où elle rencontre mon regard. Je ne suis pas sûr qu’elle m’ait entendu ou qu’elle ait envie de répondre à un importun. J’insiste :
« Qu’est-ce qui ne va pas ? Je peux vous aider ? »
« Je ne sais pas, mon père … »