Archive pour juillet, 2011

Coexistence pacifique

31 juillet, 2011

Il y a des jours où j’aimerais me lâcher. Si je me laissais aller, je ne vous dis pas… Je commencerais par casser la gueule à Bertrand. 

Vous allez me dire qu’il faut savoir se retenir. Ce n’est pas la loi de la jungle. Nous sommes entre êtres humains, tout de même ! 

Certes, il faut des règles pour vivre en communauté. Mais nos règles sont salement compliquées à respecter. 

Par exemple, si je m’autorise à dire que vous êtes moche, ça va faire des tas d’histoires, surtout si c’est vrai. Si j’évite ce genre de sujet, je suis tout de suite accusé de lâcheté. Si je vous dis que vous êtes beau, c’est de l’hypocrisie. Bref, j’ai tort dans tous les cas de figure. 

Autre exemple : vous m’invitez à diner parce que vous me trouvez sympathique. De fait, je suis obligé d’être sympathique puisque vous m’avez invité pour ça, même si je n’aime pas le menu ! 

Je propose d’autres règles de vie. Par exemple, invitez moi et faites moi un gigot au gratin dauphinois ! Ce serait tellement plus simple ! 

Ou alors dites-moi que j’ai du charme ! Ce n’est pas compliqué ! Je dégage quelque chose, tout de même ! 

Encore une situation pour bien monter comment je conçois la coexistence entre êtres humains. Vous savez que Duchmol sent des pieds. Hé bien,  au lieu de lui dire en face et afin d’éviter qu’il se sente mal à l’aise, je lui fais savoir de manière détournée et habile en glissant un déodorant sur son bureau ! 

Encore d’autres exemples. Soyons généreux avec nos voisins ! Un petit peu d’entraide ne nuit pas. Par exemple, monsieur Louis me prête sa scie électrique et moi je lui prête ma scie à mains. Nous nous complétons ainsi agréablement ! Point n’est besoin d’acheter tous les deux le même outil ! 

Imaginer les gains que nous ferions, si nous adoptions la même attitude à l’échelon planétaire ! Les américains achèteraient des avions de chasse, les chinois des sous-marins atomiques, les japonais des chars d’assaut et nous des stylos à bille pour nos militaires. 

Quelles économies sur les budgets militaires en temps de guerre ! 

Comment ça : contre qui ? 

 

Il avait toutes sortes de prédispositions

30 juillet, 2011

Il  avait une capacité de quinze litres par soirée.

Et un certain penchant pour la bière irlandaise.

Son goût pour la conversation l’entrainait tard le soir.

Il prenait ses dispositions pour rester au pub  jusqu’à  l’aube.

Son talent pour la musique était réputé.

Il rentrait chez lui en s’inclinant contre les murs.

Et avait une certaine tendance à se tromper d’adresse.

Des coups durs!

29 juillet, 2011

Une volée de moineaux s’enfuit devant lui.

Il en avait sa claque.

Il avait raclé ses dernières économies.

Pour payer la correction de son manuscrit.

Qui portait sa griffe.

Il aurait de la peine à boucler le mois.

Mais cela ne le frappait pas beaucoup.

Il lui restait un soufflé au fromage dans le frigo.

Il rentra chez lui tandis que le vent lui giflait le visage.

Problèmes familiaux

28 juillet, 2011

« Je ne m’en fais pas, je prends les choses comme elles viennent. Par exemple, je n’ai plus un rond, mais je m’en fous, je vais demander de l’argent à votre oncle. Il ne peut rien me refuser !» 

« Euh ! Laissez-moi peut-être commencer, je vous dirai comment ça se passe. » 

« Vous n’auriez pas plusieurs oncles riches au cas où le premier renâclerait un petit peu ? » 

« Non. Et vous dans votre famille ? » 

« Je ne peux rien demander à mon père. Il va encore me dire que je ferai mieux de trouver du travail. C’est pour ça que je préfère votre oncle. A votre avis, combien je peux lui demander ? » 

« Vous verrez bien. Moi, je vais commencer par lui demander mille euros. C’est à peu près le SMIC. De quoi vivre tranquillement pendant un mois. Je ne suis pas très exigeant ! » 

« Il ne faut pas s’autocensurer. Moi, je vais demander carrément mille cinq cent euros. J’ai des charges de remboursement, vous comprenez ? » 

« Vous allez demander quinze cent euros à mon oncle ? » 

« Ne me dites pas qu’il va refuser ce service à un ami de son neveu ! Je n’ai jamais vu ça ! » 

« Vous comptez le lui rendre ? » 

« Je préférerais un don. C’est plus simple, ça entraine moins de paperasse ! » 

« Et une fois que vous aurez tout dépensé ? » 

« D’abord, je ne vais pas tout dépenser. J’en mettrai une partie sur mon livret. Je suis raisonnable. Et puis après, je retournerai voir votre oncle, il appréciera sûrement mon sens de l’économie et il me confiera une nouvelle somme. » 

« Euh !… » 

« Vous ne pensez tout de même pas qu’il va émettre des réserves ? » 

« Euh !… » 

« Ah ! Parce qu’il y a une tante maintenant? C’est nouveau ! Ça m’aurait étonné, il faut toujours qu’il y ait des complications ! Je m’entendais si bien avec votre oncle ! Bon, ça ne fait rien ! Je vais séduire votre tante ! » 

« A quatre vingt cinq ans, ça risque d’être compliqué ! » 

« C’est de votre faute aussi ! Vous pourriez tout de même avoir une cousine jeune, belle et riche. Ce n’est pourtant pas la mer à boire ! » 

Univers carcéral

27 juillet, 2011

En allant à l’opéra Bastille.

Il se sentait fort.

Il fabriquait des écrous qui se vendaient bien.

Il ne craignait pas pour sa santé.

Les cellules de son cerveau fonctionnaient.

Il n’avait pas des tensions alarmantes comme certains.

Bien qu’il fumait des barreaux de chaise.

Il se disait souvent : « Prisons l’instant présent ! »

Et puis aussi « Mâtons l’avenir avec optimisme ! »

Tournée d’adieu

26 juillet, 2011

Demain, une petite cérémonie est prévue à la mairie. Jean n’aime pas beaucoup les honneurs, mais le chef a dit que le maire y tenait. On lui remettra une médaille, on ne sait pas encore laquelle, mais on trouvera bien quelque chose qui fasse l’affaire. Trente-cinq ans passés à nettoyer les rues, ça mérite quand même le respect. 

Cet après-midi, encore une fois, il passe au peigne fin le jardin municipal, armé de son balai et de son râteau qu’il rangera ce soir. Définitivement. 

Jusqu’à la dernière minute, il faudra être précis et consciencieux. Jean ne tolérera aucun papier gras à terre. Il ne ressent pas d’amertume, Jean. C’est un luxe, l’amertume. Mais il se souviendra, jusqu’à son dernier souffle de tous ces petits moments qui ont animé sa vie sur le trottoir de la ville où il est né. 

Jean a toujours conservé cette silhouette de jeune homme, connue de tous les habitués du quartier. Demain, ils ne verront plus ses longs bras agrippés aux manches de ses outils et ni sa façon d’allonger constamment le cou comme un oiseau de proie qui scruterait avec attention tous les recoins de la voie publique pour y détecter le moindre accroc à la salubrité. 

Jean s’accorde un moment de détente alors que le soleil décline lentement en rougeoyant le clocher de l’église. Sa célèbre touffe de cheveux blancs indisciplinés et son regard malin perdu dans les rides de l’âge font le tour des bancs. Quand il a commencé, les mères de familles étaient là, tricots à la main, bavardes comme des pies en attendant que les enfants aient fini de jouer à leurs pieds et que les maris rentrent de l’usine. Jean les connaissait toutes par leurs prénoms. On prenait le temps de parler, de s’inquiéter de la santé des familles, du travail des époux, des prochaines maternités.

(suite…)

Un horizon bouché

25 juillet, 2011

C’est idiot, elle oubliait tout.

Il lui fallait absolument un pense-bête.

Sinon son horizon serait borné.

Et son champ d’action limité.

Elle ne se souvenait plus de la définition de l’angle obtus.

Ni  du jeu à somme nulle.

Ses pulls devenaient trop étroits.

Son géranium était rabougri.

Elle niait pourtant les évidences. 

C’était une godiche.

Ah! Ces jeunes…

24 juillet, 2011

Quand le vin est tiré, il faut le boire. Il faut savoir aller au bout des choses, je ne suis pas du genre à m’arrêter en route quand je commence un travail ! Je ne lâche rien ! Par exemple lorsque je me mets à faire le ménage ! Ce n’est pas souvent, certes, mais lorsque je commence, je suis impressionnant ! 

Vous, par contre ça ne va pas du tout. Vous commencez trente six choses à la fois et n’en finissez aucune ! Je reconnais bien là le caractère précaire de l’attention des jeunes générations. On a l’impression que vous zappez continuellement. A mon avis, vous n’avez pas le goût de l’effort que nous possédons, nous les anciens. Le goût du travail bien fait, jusqu’au bout ! Avec vous, il faudrait que tout soit fini avant d’avoir commencé ! 

Vous avez inventé cette horreur qu’est le fast-food ! Bientôt, il faudra que le déjeuner soit avalé avant qu’on ait le temps de prendre l’apéro ! Prenez l’exemple de nos grands-pères, il savait prendre le temps de labourer le champ, puis de l’ensemencer avant de récolter ! Ils savaient respecter le cycle des saisons ! Et le soir des moissons, on faisait la fête pour remercier Dieu ou Dame Nature d’avoir récompensé une si longue attente et tant d’efforts ! 

Vous vous voulez tout, tout de suite et sans effort en plus ! Il faut commencer au bas de l’échelle sociale et gravir les échelons un par un à la force du poignet ! Comment ça ? Quand on est au premier barreau on y reste, maintenant ? Je n’étais pas au courant ! Comment ça se fait ? 

Bon, tant pis ! N’oubliez pas que l’effort et le travail sont les seules valeurs récompensées ! Le seul problème, c’est pour les enfants de riches qui démarrent en haut de l’échelle sociale ! Mettez vous à la place de ces pauvres gamins : ils ne peuvent même plus faire preuve de leur vaillance en grimpant les barreaux un a un ! Ils ne se sentiront jamais progresser ! Alors si vous êtes dans la mouise, profitez-en ! 

Ne faites pas la tête!

23 juillet, 2011

Ne prenez pas cet air outré !

Ma femme a trouvé une mine d’or.

Elle a le visage rayonnant.

Mon perroquet, celui au bec enfariné, n’en revenait pas.

Nous allons crier la nouvelle à la face du monde.

On ne se moquera plus de notre figure.

On ne me dira plus que je suis une grande gueule.

Nous marcherons la tête haute.

Nous pourrons crâner comme les autres.

Et ne serons plus accusés du délit de faciès.

Dans le grand bain

22 juillet, 2011

Je vais prendre mon bain de soleil, si ça ne dérange personne.

Puis, je passerai aux toilettes.

Avant d’aller chez Gaston pour me rincer le gosier.

Il faut aussi que je m’occupe de mes asperges.

Je suis mouillé dans un trafic de légumes.

Et dans un blanchiment de faux billets.

Les flics peuvent se brosser.

Ils vont se faire passer un savon.

Je ne suis pas prêt pour le grand lavage de cerveau.

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