Une petite fille bien embarrassée
31 mai, 2011Quand on a huit ans, il faut avoir une boîte secrète où l’on enferme tout ce que les autres voudraient bien connaître. Mais comme c’est secret, les autres ne sauront jamais ce qu’elle contient. C’est une astuce que je recommandais parce j’estimais qu’elle permettait d’attirer l’attention sur soi quand on ne savait plus quoi faire comme bêtise. Jusqu’à qu’une suite d’incidents regrettables me conduisent à changer radicalement d’avis.
Grand-mère Martinaud avait, comme ça, un petit coffret qui trônait sur sa cheminée. Par moment, elle l’ouvrait avec une clé dorée qui pendait autour de son cou et admirait son contenu pendant un long moment. Personne ne savait ce qu’elle conservait. Mon cousin Luc qui prétend tout connaître – mais Luc estime être au courant de tout, surtout des choses que les adultes ne veulent pas dire- mon cousin Luc disais-je, affirme que le coffret de la mémé contenait les restes de son grand-père dont le corps avait été volatilisé par un obus allemand dans les tranchées de 1914. Seul, un orteil avait été ramassé et rapporté à sa veuve. Le doigt de pied était ainsi légué d’une génération à l’autre, chacune étant invité à se recueillir pieusement devant cette relique.
Bref, j’ai pris une boîte à chaussures de ma mère et j’ai décidé d’en faire mon coffret personnel. Le seul problème, c’est que je ne savais pas quoi mettre dedans. L’éventualité de ne rien avoir à cacher me terrorisait. Luc aurait tôt fait de démasquer mon manque d’imagination et de s’en moquer cruellement. A quoi bon faire des cachotteries si l’on n’a rien de confidentiel dans sa vie ? Luc dirait sûrement que c’est encore une idiotie de fille !