Un visage connu
20 février, 2011En ouvrant la porte d’entrée de mon appartement, je suis resté sidéré une fraction de seconde. Il a profité de ma stupéfaction pour pénétrer dans le hall de l’appartement.
Il vend des aspirateurs. A la vue de l’engin qu’il vient de déposer à mes pieds j’aurais pu m’en douter.
Moi qui croyais ne ressembler à personne, j’ai l’impression d’avoir devant moi l’homme que j’étais voilà trente ans. Je l’examine pendant qu’il m’explique qu’il est étudiant, qu’il doit faire des démonstrations pour gagner sa vie et que, par conséquent, je serais bien aimable de l’écouter pendant dix minutes. Je ne peux pas décemment me mettre à la porte, même à trente ans de distance.
Ce regard noir, immobile, inquiet ! Et cette coiffure sagement peignée sur le coté ! Aucune fantaisie ! Et puis cet air de se demander ce qu’il fait là, je l’ai déjà vu tellement de fois dans un miroir ! A cet âge, je me croyais bon, moi aussi, de contrefaire l’air sérieux que je pensais nécessaire pour entrer dans le monde des adultes. J’ai envie de lui dire que son apparence est profondément ennuyeuse.
J’ai forci. Je ne me souviens plus à quel moment j’ai pu prendre des kilos et de l’estomac. Lui se meut avec aisance. Il faudrait que je le mette en garde. S’il veut conserver cette taille, il faut faire beaucoup de sport.
Il est vêtu d’un jean et d’un blouson de tissu bon marché ouvert sur une chemise à carreaux. En matière d’élégance vestimentaire, je ne faisais pas beaucoup mieux.
« Vous allez avoir une surprise ! »