Notre rayon culturel
« Vous venez de faire un solécisme ! »
« Un quoi ? »
« Un solécisme ! »
« On ne comprend rien à ce que vous dites. Pourquoi faut-il que vous employiez toujours des mots compliqués ? Vous ne pouvez parler comme tout le monde ? C’est clair… t’as vu le match, hier soir… t’as eu mon mail… il fait beau aujourd’hui, hein ? ..Voilà des expressions que tout le monde comprend ! C’est simple !
Comment ça, c’est complètement creux comme conversation ? Ce n’est pas le problème ! Il faut comprendre que ce sont des codes. La vie est pleine de codes !
Par exemple, si je vous dis : on s’appelle ! Tout le monde sait que je ne vous appellerai pas ! C’est évident ! De toute façon, je n’ai pas votre numéro, et en plus, je m’en fiche totalement !
C’est comme lorsque je vous dis « Bonne année » ce n’est qu’une façon de vous dire que nous sommes le 1er janvier. J’en ai rien à cirer
de l’année que vous allez passer ! Vous comprenez ?
Bon, d’accord, ça ne devrait pas empêcher d’avoir des conversations un peu plus approfondies : d’où venons-nous ? Qu’est-ce que l’âme ? Que penser de l’œuvre de Jean-Jacques Rousseau sur le rôle de la nature ?
Je vais vous dire : je ne suis pas de ces brutes épaisses et incultes pour lesquelles seule compte la matérialité des faits. Mais prenez-y garde ! Tous ceux qui ont véhiculé des idées ont mal fini ! Prenez l’exemple de Jésus-Christ, Martin Luther King, Zinédine Zidane.
Euh… non ! Pour le dernier, je ne suis pas sûr !
Et puis vous ne croyez tout de même pas que vous allez améliorer le monde avec vos bouquins de philosophes !
Comment ça : ça apprend à réfléchir ? A se remettre en cause ? A ne pas accepter les évidences ?
Mais mon pauvre, la seule évidence que je connaisse c’est ce qui reste dans votre porte-monnaie à la fin du mois ! Un peu de réalisme, enfin ! Au train où vous allez, vous serez peut-être cultivé, mais SDF !
Regardez-moi, je gagne de l’argent, j’ai une belle maison, de l’avenir. Mais ça ne m’empêche pas de lire ! D’ailleurs si vous pouviez me rendre « La vie de Claude François » en douze volumes… »
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