Archive pour octobre, 2010

Les conseils du grand Jacot (1)

31 octobre, 2010

 J’ai envie de ne rien faire. Mais lors rien de rien. De me mettre dans un coin et de me contenter de respirer. A la rigueur de regarder autour de moi. Pas trop, pour ne pas être obligé de constater que mon appartement est en désordre et qu’il faudrait que je range. Je pourrais simplement écouter le silence. 

Selon le grand Jacot, ça s’appelle de la paresse et c’est très mal vu par les temps qui courent. Il faut absolument faire quelque chose. Selon le grand Jacot, qui revient miraculeusement d’un trekking en Afghanistan, il faut se bouger, se remuer, ne pas rester planter comme une courge. Il y a toujours quelque chose à faire : 

-Ch’ais pas moi ! Fais du sport ! Voyage ! 

Si je comprends bien, il faut être en mouvement. Moi, c’est pas mon truc. Je voudrais faire quelque chose où on est assis ou couché. 

Non, selon Jacot, je ne comprends pas. Il faut s’occuper l’esprit avec quelque chose de constructif, si possible. 

Le problème, selon lui, c’est que l’esprit s’occupe tout seul. L’esprit ne supporte pas le néant. Quand on réfléchit, on voit bien que l’on ne peut pas réfléchir à rien. Quand on dort, l’esprit s’agite : on rêve. Quand on ne réfléchit à rien, c’est qu’on est mort ! 

Et encore ! Certains prétendent qu’on peut communiquer avec les morts ! Ou que les morts essaient de rentrer en communication avec les vivants !

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Tirets

30 octobre, 2010

Henri est chef de rayon chez Uniprix : il passe sa vie au milieu des codes-barres.

Dans son métier, il a de l’expérience : ce n’est pas un jeune blanc-bec.

Sur sa vie personnelle, il entretient le black-out.

Mais nos reporters free-lance ont obtenu des révélations exclusives.

Henri est un self-made-man.

Il fait la cuisine lui-même.

Sa spécialité est un méli-mélo de salades variées.

Suivi d’un rôti de porc aux pruneaux préparé à  la cocotte-minute.

A part ça, il poursuit sa petite vie de salarié cahin-caha.

Son ami Mathieu, représentant en coton-tige,   n’est pas avare de ses conseils en gastronomie.

Mathieu n’est pas un fesse-mathieu !

Partir, partir…

29 octobre, 2010

Marcel, le vagabond, boucle son baluchon et part à l’aventure.

En chemin il rencontre Gérard le pêcheur qui plie ses gaules et le suit.

Plus loin, ils croisent la mariée qui a mis ses voiles, mais qui, tout compte fait, préfère s’en aller avec eux.

Dans la forêt, le trio avise Lulu, le marginal qui a élevé son camp de fortune : il s’associe à la troupe.

Sur la nationale, Marcel l’ouvrier taille la route trop large : il laisse tomber son marteau-piqueur et s’invite dans cet étrange cortège.

Plus loin, Georges les aperçoit. C’est lui le vendeur de bougies, qui met les bouts de chandelles en vente dans sa vitrine : il part aussi.

Devant le château, Mauricette les attend après avoir rendu son tablier à sa patronne.

Sur le port, Jeannot le marin a déjà relevé l’ancre.

Il se met à la barre.

Osons le jeu de mots : ils vont tous se barrer sur son bateau.

 

Conflit social

28 octobre, 2010

Louis finit de bâillonner un homme ligoté sur une chaise dans un bureau administratif. L’homme se débat et gémit pendant que Louis s’assied en face de lui, tout en s’abreuvant goulument à une canette de bière. 

-          Vous m’êtes particulièrement antipathique Dumortier. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne vous aime pas. Peut-être à cause de vos lèvres minces. Et de ce demi-sourire supérieur. Ce sourire en coin. Je ne sais pas comment vous faites pour sourire d’un seul coté. Ce doit être très gênant. J’espère que vous changez d’axe de temps à autre, sinon vous allez finir par avoir des joues dissymétriques. C’est très gênant !  Il faut faire attention, mon vieux ! Quand les copains du syndicat ont décidé que chacun devait séquestrer un membre de la direction dans son bureau, j’étais sûr qu’avec ma malchance coutumière, j’allais encore tomber sur vous ! 

L’homme entravé gigote fortement pour toute réponse. 

-          Et votre regard ? Vous avez-vu votre regard ? 

-          …. 

-          Comment ça : c’est difficile pour un regard de s’observer lui-même ?  Prenez un miroir, mon vieux ! Un peu d’initiative, que diable ! Vous n’y verrez … rien ! Vous avez le regard vide, mon pauvre ! Vide de chez vide ! Certains ont un peu de malice au coin des yeux. Si on avait au moins le reflet votre arrogance habituelle dans le fond de vos globes oculaires, ce serait déjà un progrès. Mais non ! Rien ! Et puis alors, votre front ! On n’a pas idée ! 

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A notre rayon « textile »

27 octobre, 2010

Jean-Christophe est un prince d l’élégance.

C’est un homme qui a de l’étoffe !

Dans les bals, il n’entend pas faire tapisserie.

Sa femme doit rester à la maison pour tricoter ses vêtements.

Selon lui, on  ne doit pas mélanger les torchons et les serviettes.

Mais Maria n’entend pas se laisser manger la laine sur le dos.

De fil en aiguille, elle débarque ce soir chez la Marquise.

Celle-ci prévient Jean-Christophe qu’il file du mauvais coton.

Il va falloir qu’il lave son linge sale en famille.

S’il ne veut pas se retrouver dans de vilains draps.

Un rencontre surnaturelle

26 octobre, 2010

Vers dix sept heures, les travées de la bibliothèque sont désertées. Seuls restent quelques érudits barbichus à la recherche d’histoires secrètes ou de manuscrits mystérieux. 

Jean est déçu. Pendant, une semaine, elle était là. Jusqu’à la fermeture. Profondément absorbée dans une pile impressionnante d’ouvrages anciens. Son visage pâle entouré d’une magnifique chevelure auburn qui cascadait jusque sur ses épaules, ne s‘est jamais levé des pages parcheminées des ouvrages qu’elle consultait. Sa robe blanche s’épanouissait en plis harmonieux sur le fauteuil qu’elle avait choisi. On aurait dit qu’elle était vêtue de voiles immaculés comme une jeune mariée. 

Jean l’a observée tous les jours sans jamais croiser son regard et encore moins oser l’importuner tant sa présence paraissait auréolée de magie ou d’irréalité. Il aurait eu peur qu’une question incongrue fasse fuir une telle apparition. 

Frappé au cœur, il n’en dort plus, Jean. Il s’est ouvert de cette vision à Marcel. Son ami l’a encouragé avec bienveillance à aborder la jeune femme : 

« Eh bien, parle-lui ! Ne reste pas comme ça, la bouche béante ! » 

Ce lundi soir, Jean s’est précipité à la bibliothèque municipale. Le cœur battant. Après avoir parcouru toutes les rangées au pas de charge, il a du se rendre à l’évidence. Elle n’est plus là.

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Zone commerciale

25 octobre, 2010

Maurice n’a pas pris le chemin de la facilité.

Il a emprunté les sentiers les plus escarpés.

Il n’est pas du genre à acheter des complicités.

Il a payé toutes ses erreurs.

Il n’a pas vendu son âme au diable pour réussir.

Il vole désormais de ses propres ailes.

Son ami Lucien loue son courage et sa détermination.

Il échange fréquemment avec Maurice.

Il lui prête toutes les qualités d’un homme avisé.

Lucien a décidé de régler ses pas sur ceux de Maurice.

 

Un travailleur social et sociable

24 octobre, 2010

Ce matin là, Martial part au travail d’une humeur maussade. La nuit a été agitée de cauchemars : il était devenu incapable d’accomplir sa tâche quotidienne par suite d’une cécité inopinée et inexplicable.

Vers neuf heures, il se poste dans l’un de ses endroits favoris auprès de la fontaine du jardin public qui glougloute de plaisir dans ces premiers jours de printemps.

Les premières passantes ne lui inspirent aucune réflexion. C’est le défilé habituel des ménagères du quartier, fichus serrés sur chignons approximatifs, cabas en main, qui vont aux courses quotidiennes ou reviennent du marché. Décidemment, les affaires de Martial ne marchent pas très fort depuis quelques jours. D’ordinaire les premiers beaux jours font éclore les belles plantes de l’année et son activité repart pour atteindre son paroxysme à l’approche des vacances d’été.

Martial est contempleur de belles femmes. Le mot n’existait pas, il a du prendre sur lui de le créer. C’était un métier qui ne sert strictement à rien si ce n’est à énerver les conseillers professionnels du bureau des « sans emploi » qu’une réglementation tatillonne l’oblige encore à rencontrer régulièrement pour toucher quelques subsides de l’Etat.

Martial a eu beaucoup de peine à faire reconnaître sa vocation dans les nomenclatures officielles des métiers recherchés. Devant un parterre de fonctionnaires médusés, il a du démontrer que, grâce au boulot dont il était le génial inventeur, des pans entiers de l’économie nationale se développent. Pour être admirées, les femmes se ruent sur les produits de l’industrie pharmaceutique, dans les salles de sport, dans les boutiques d’esthétique. Martial, par son obstination persévérante à les admirer entretient donc cette poursuite obsessionnelle de la Beauté Eternelle.

Depuis trois ans, il sillonne les rues en se faisant un devoir d’observer longuement les silhouettes les plus sensuelles. Martial dit souvent que si l’on croit qu’il s’agit là d’un métier de tout repos, eh bien, on se trompe lourdement ! Il faut avoir l’œil constamment aux aguets pour ne laisser échapper aucun sujet digne d’attention et d’encouragement. Et puis, les vicissitudes de la vie de chacun étant ce qu’elles sont, on n’a pas forcément le cœur à un tel ouvrage tous les jours. Martial sait se forcer avec sérieux et professionnalisme comme ce matin d’avril dont nous parlons. Son apostolat lui tient à cœur.

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Le terroir

23 octobre, 2010

Marius cultive une superficie de 50 hectares.

Sans compter l’étendue d’eau dans laquelle patauge son canard Germain.

Il est le roi dans ses champs de blé.

Sur ses terres, il se sent vivre.

Il plaint les vacanciers qui se bousculent sur les aires d’autoroutes.

Ou alors les supporters qui se battent autour d’un terrain de foot.

Il bénéficie, lui, d’un véritable espace de liberté.

Marius n’est pas un homme superficiel ; il n’aime pas rester à la surface des évènements.

L’agriculture est son territoire, la philosophie est son domaine.

Des hommes!

22 octobre, 2010

C’est la jungle : le droit du plus fort.

Il faut être un homme de robuste constitution.

Un baraqué du nombril, si l’on voit ce que je veux dire.

Henri ira loin : c’est une forteresse inébranlable.

Il a réussi des examens trapus.

Lucien  est un homme puissant,

Capable de mener à bien  les douze travaux d’Hercule.

Il sait tenir des discours musclés et virils.

Il est doté de solides convictions, lui au moins.

Ce n’est pas comme Julien qui passe son temps à écrire des vers à l’ombre d’un chêne vigoureux !

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