Archive pour septembre, 2010

Nos controverses philosophiques (3)

30 septembre, 2010

Aujourd’hui, Monsieur Leblanc est déchainé. Il dit que la vie est trop courte pour qu’on s’égare dans des détails sans importance, il faut savoir aller à l’essentiel.

Par exemple, le leader du championnat de foot, on s’en fiche complètement.

Le chiffre d’affaires de Monsieur Lenoir lui est totalement égal.

La nouvelle chanteuse à la mode l’indiffère. De toute façon, il y en aura une autre demain.

Non, ce n’est pas ça la vraie vie ! Qu’en pense son voisin ? Hmmm ?

Monsieur Lenoir, comme toujours, s’amuse des emportements de Monsieur Leblanc qui a de la peine à prendre du recul sur les affres de l’existence en dépit de son aide affectueuse.

« Tout beau l’ami ! Voilà beaucoup de certitudes ! D’abord une question : faut-il toujours avoir des réponses à tout ? Ne faut-il pas se contenter de croire ? »

Monsieur Leblanc est interloqué. Il n’avait jamais imaginé qu’il faille distinguer certitude et croyance. Que veut donc dire Monsieur Lenoir ? Ce dernier s’explique :

« Par exemple, je ne crois pas que vous soyez intelligent. Attention ! Ce n’est pas une certitude, c’est une simple croyance.  Selon moi, vous avez une forme d’intelligence qui relève plus d’une espèce d’intuition. Vous voyez ce que je veux dire ? » .

Monsieur Leblanc a de la peine à suivre Monsieur Lenoir. Aussi celui-ci va-t-il développer par un exemple astucieusement choisi.

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La piste aux étoiles

29 septembre, 2010

George s’est retiré : il est désormais sur la voie de la sagesse.

Il s’est interdit à lui-même la route du rhum.

Il n’empruntera plus non plus l’autoroute du soleil pour s’entasser avec les autres sur la plage.

Il  n’entendra plus non plus Solange, la secrétaire, lui dire que la direction l’attend dans ses bureaux.

Il ne rêvera plus de hanter les allées du pouvoir.

Il ne s’endormira plus devant la télé, chaussé de ses meilleures charentaises.

Désormais, il empruntera plutôt les sentiers de randonnée.

Il suivra la piste des troupeaux dans les alpages de haute montagne.

George est sur le chemin de la vérité.

Un conseilleur

26 septembre, 2010

Dis-toi bien que le monde se partage en deux. Il y a les gagnants et les perdants. Il n’y a pas de milieu. Ça te dit d’être dans les gagnants ? Parce que là, je te vois mal barré avec ta petite vie médiocre ! Tu me connais, je ne suis pas du genre à donner des conseils ! Ce que j’en dis, c’est pour toi. Moi, il y a longtemps que je suis bien dans mes baskets. J’ai donné un sens à mon existence et j’assume mes choix ! 

Quoi ? Tu es encore directeur commercial à 6000 euros par mois. C’est bien ce que je disais. Autrement dit, tu passes ta vie à vendre des trucs à des gens qui n’en ont pas besoin ! Bonjour, la société de consommation ! Bonjour aussi les déchets ! En plus, je suis sûr que tu obéis à un patron ! Bonjour l’aliénation ! Et puis, je suis certain que tu as une femme charmante qui est une maîtresse de maison attentive et deux enfants adorables qui te donnent les plus vives satisfactions. Il s’intéressent à ton job en plus, c’est le bouquet ! Ils pourraient quand même se droguer un peu comme tout le monde. Ou alors une petite fugue de temps en temps, ça ne fait pas de mal ! Comment ça, tu n’as jamais été les chercher au commissariat après une manif ? Mon pauvre ! Quelle famille ! Moi à leur âge, j’avais déjà fait deux mois de prison pour outrage à agent de la force publique ! Ça, c’est une expérience qui te forge le caractère et qui permet de rencontrer plein de gens intéressants ! 

Bon, voyons ! Cet été, tu as surement prévu de faire du canyonning dans les gorges de l’Ardèche ou alors du deltaplane au-dessus de la Cordillère des Andes ! Comment ? Une petite location « pépère » directement sur la plage du Lavandou ! Les bras m’en tombent !. Pourquoi ne pas aller cueillir des haricots verts chez belle-maman pendant qu’on y est. De l’aventure, mon vieux, de l’aventure ! Moi, par exemple, je pars au Turkménistan, sac au dos pendant trois semaines, à la rencontre de nouvelles civilisations. C’est la seule manière de s’enrichir. Ils sont peut-être en guerre, ils n’ont peut-être pas que ça à faire de recevoir des touristes, mais ils ont un sens de l’hospitalité dont nous ferions bien de nous inspirer ! 

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Une page de pub!

25 septembre, 2010

Elsa avait l’habitude de parfums subtils.

Mais,  en entrant dans la boutique du père François, elle fut saisie par des odeurs repoussantes.

Le père François sentait particulièrement mauvais.

Elsa reçut l’haleine fétide du commerçant en pleine face.

Du fond de son échoppe montaient des effluves nauséabonds.

Son chien Gustave exhalait une puanteur écœurante.

Des émanations épouvantables s’échappaient de sa cuisine infecte.

Un relent de fosse septique parvenait par la fenêtre.

Mais voici que Jeannette entra à son tour.

Elle, elle avait pris soin d’emporter « Bouquets de roses ».

Une seule vaporisation suffit et hop ! Voici que surgit le Printemps !

En promo, à notre rayon boulangerie!

24 septembre, 2010

John tartine tranquillement sa biscotte.

Le commerce  des coton-tiges  avait été un four.

Mais avec les pinces à épiler, il avait fait du blé.

Il avait roulé tout le monde dans la farine. 

Maryse est l’amie de John. Il l’appelle d’ailleurs : « Ma mie ».

Elle le mène à la baguette.

Elle lui dit qu’il y a encore du pain sur la planche.

Une affaire est en cours, mais c’est du pain béni.

John qui aime la plaisanterie lui répond : « Laisse-moi casser la croûte ! ».

Dans l’ombre d’un roi (partie 2)

23 septembre, 2010

La bataille aux portes de Paris fut longue, indécise et terrible. Jean y participa aux cotés du Roi qui se montra d’un courage exemplaire mais aussi d’une imprudence folle si bien que Jean dut s’employer à sauver sa vie tout en protégeant celle de son souverain. Rapidement, la plaine fut jonchée de morts par centaines sans que l’on puisse déterminer le vainqueur. Cependant la pression exercée par les assaillants fut telle que Louis XI du consentir de nombreuses concessions par des traités de paix qu’il signa sous le regard arrogant de ses adversaires à Saint-Maur et Conflans.

Dans une attitude de feinte soumission, sa Majesté promit pratiquement n’importe quoi : un morceau de Normandie à l’un, un petit bout de Picardie à l’autre.

Mais Louis le Onzième était un trop fin politique pour ne pas s’entourer des apparences de la légitimité. Aussi, résolut-il de faire avaliser ses décisions en réunissant les Etats Généraux à Tours. La démocratie étant un exercice périlleux dans ces temps si incertains, Jean de Sèvres fut chargé de composer l’Assemblée de telle sorte que le résultat de ses travaux coïncide avec les projets royaux. La mission de Jean de Sèvres ne se déroula pas sans peine, mais le jeune homme avait pris de son maître toutes les mauvaises habitudes qui faisaient les bons politiciens. Il promit à son tour un avenir radieux aux futurs membres de l’assemblée si bien que celle-ci, dans son auguste sagesse, valida sans restriction les décisions de sa Majesté.

Plus tard, Louis ne tiendra, comme d’habitude, aucune des promesses qui la gênaient. Il n’avait jamais été question, dans son esprit tortueux, d’accepter que la Normandie soit séparée du royaume.

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Et hop!

22 septembre, 2010

Il n’est jamais bon de passer par dessus un repas.

Il est de mon ressort de nutritionniste de le proclamer.

Ne vous cuisinez pas des pommes sautées.

C’est sérieux : je ne lance jamais de mots en l’air.

Pour rebondir sur ce que je viens de dire,

Vos erreurs rejailliront sur votre tour de taille.

Je ne vous jetterai pas la pierre pour autant.

Mais lancez-vous un défi.

Franchissez le Rubicon d’une enjambée allègre.

Catapultez-vous à ma consultation !

 

Dans l’ombre d’un Roi (partie 1)

21 septembre, 2010

Dans la brume matinale qui couvrait le pays d’Artois, Jean de Sèvres regardait avec nostalgie l’armée se préparer à son départ pour Liège. Le hurlement des ordres, le cliquetis des armes et le hennissement nerveux des chevaux s’entremêlaient dans le brouhaha et l’agitation qui précédent les grandes batailles. Les quelques années qu’il venait de passer auprès du Roi s’achevaient. 

Le jour où son oncle, promu ministre de sa Majesté après avoir été son barbier, le présenta à Louis le Onzième lui paraissait lointain. Peut-être même avait-il connu cet instant dans un autre monde. Pourtant cette rencontre avait eu lieu à l’été 1464 : quatre années seulement le séparaient de ce moment où Louis fut séduit d’emblée par le jeune homme.

Le Roi fut rassuré par la haute stature de Jean. Le regard bleu, perçant et malin sous la crinière blonde du jeune nobliau plut également à sa Majesté. Son discours et son maintien modeste achevèrent de conquérir Louis. Son allure souple et féline l’intrigua : mentalement, le souverain le compara à son chat. Jean de Sèvres entra immédiatement à son service rapproché. Il n’eut aucune précision sur les missions qui lui seraient confiées, mais il allait apprendre à les connaître rapidement.

Dans les premiers temps, Jean fut prié d’assister aux séances du Conseil du Roi. Non pas pour y participer, bien entendu. Il devait simplement se tenir dans l’ombre du mur, en retrait du trône royal et écouter. De cet endroit, il assistait à toutes les réunions. Louis XI s’était violemment débarrassé des conseillers de son père Charles qu’il exécrait. Les nouveaux venus dans son entourage étaient des hommes de basse extraction. Mais l’appétit de pouvoir étant une maladie qui s’attrape facilement, chacun, lors des séances du Conseil de sa Majesté, essayait d’y briller soit par la flagornerie soit par une obéissance servile.

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Un moment qui n’est pas pour les personnes sensibles

20 septembre, 2010

Un hurlement de terreur déchira la nuit noire.

Quelqu’un appelait à l’aide. Désespérément.

Au fond de la forêt, on entendit un  autre cri d’angoisse.

Le chaperon rouge qui passait par là, était au bord de la crise de nerfs.

Le Diable ricanant surgit, explosant de colère.

Il lança des corbeaux noirs criaillant de faim dans le ciel.

Des loups sanguinaires et  menaçants hululaient dans la plaine.

Soudain  un silence effrayant envahit l’espace.

Suivi de nouveau par une clameur affreuse qui se propagea entre le ciel et la terre.

Lucifer partit d’un rire stupide lorsqu’ il sentit une montée d’adrénaline le submerger.

Désolé ! Il fallait que ce texte inspire de l’effroi. On n’est pas entre gamins !

 

G1, G2 et H

19 septembre, 2010

« Le premier qui bouge un cil, je le bute ! » 

La phrase est un peu conventionnelle dans ce genre de situation, mais elle produit toujours son effet. Les deux malfrats nous ont jetés dans la salle de réunion sans ménagement. 

Berthier,  le directeur d’agence, tente encore de plastronner : 

« Je m’élève… » 

« Ta gueule !… » 

Berthier ne s’élèvera plus pour un petit moment. Il préfère essuyer ses lunettes aux montures dorées avec son ineffable pochette rouge assortie à sa cravate bordeaux. 

En face de lui Ballandreau, le caissier a assis ses cent douze kilos dégoulinant de sueur dans un siège qui grince furieusement sous le poids de son occupant. Il passe un mouchoir d’une propreté douteuse sur son font dégarni, tout en torturant convulsivement sa moustache grise de l’autre main. Ballandreau en est à son troisième hold-up. 

Mademoiselle Louise, la chef-comptable, est prostrée, comme repliée sur elle-même. Son visage austère disparait sous sa tignasse échevelée. Elle pleure probablement. On la sent au bord de la crise de nerfs. Si elle craque la situation va devenir compliquée. Je devrais peut-être lui parler, mais je crains d’aggraver son angoisse. 

La situation, on la doit à la diligence de Ludovic qui tente encore de faire bonne figure en face de moi. Ses yeux écarquillés lui donnent toujours un air étonné. Mais cette fois-ci, il est surpris pour de bon. Il ne cesse de redresser la mèche blonde qui lui tombe sur le nez. 

Ludovic était au guichet au moment où les trois énergumènes sont entrés dans la banque en brandissant leurs Kalachnikov. Je dis Kalachnikov car je ne connais pas d’autre nom pour ces armes de guerre à l’aspect meurtrier comme on en voit qu’au cinéma. Toujours est-il que si Ludovic les avait laissés nous dévaliser et s’en aller paisiblement avec leur butin, nous serions tranquilles. Peut-être même déjà rentrés à la maison. Mais il a cru bon d’activer du pied le système d’alarme.

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