Archive pour juillet, 2010

Une terreur

22 juillet, 2010

John était un assassin ans scrupule.

Il pensait s’en tirer : il avait toujours une veine de pendu.

Lorsque le juge l’appela à la barre, il étouffa un bâillement.

Quand on lui parla de ses crimes, il eut un rire étranglé.

Dans le Tribunal, l’atmosphère était empoisonnée.

Devant l’impudence de l’homme, le juge se torturait l’esprit.

Il était écartelé entre plusieurs sentiments.

Il renvoya John en cellule pour réfléchir.

C’est là que John tomba amoureux de la directrice de la prison.

 Il connut  enfin le supplice de Tantale

Combat de rues

20 juillet, 2010

Au début du mois de septembre, Monsieur Leblanc s’installa au 19 de la rue Murat dans un modeste appartement de deux pièces.

Dès les premiers jours, Monsieur Leblanc fut remarqué pour son amabilité envers les gens qui vivaient près de son logis. Il s’empressa de lier connaissance avec sa voisine, Madame Dumortier qui jugea cette attention du meilleur effet. Monsieur Leblanc la félicita de la beauté des géraniums dont il avait remarqué la couleur pourpre à son balcon. Madame Dumortier fut particulièrement touchée par le sens de l’observation et la compétence florale du nouveau venu. Elle pensa que cet homme était d’une politesse délicate et d’un abord courtois, ce qui laissait envisager une coexistence plus agréable qu’avec son prédécesseur, l’infâme Monsieur Boursicot, dont le départ précipité au mois de mai vers l’autre monde n’avait pas chagriné Madame Dumortier ni d’ailleurs ses commères habituelles.

Madame Dumortier s’empressa de faire part de ses impressions favorables dans les boutiques commerçantes qu’elle fréquentait assidument. Selon les critères de Madame Dumortier, Gérald Boursicot avait des manières frustes qui dénotaient une éducation approximative et une connaissance très vague des convenances de rigueur dans une vie en société paisible et raffinée. Le comble du sans gêne était atteint chaque samedi, lorsque Gérald Boursicot cuisinait des sardines grillées dont l’odeur infestait pendant tout le week-end la cage d’escalier de son immeuble, voire même selon les dires de la femme du boucher, toute la longueur de la rue ! La puanteur lancinante qui se dégageait alors de son antre ne prédisposait pas à entretenir de bonnes relations avec Monsieur Boursicot qui d’ailleurs s’en fichait totalement.

Personne ne fut étonné quand la rumeur publique révéla le passé anarcho-trotskyste de Monsieur Boursicot. Selon les principales têtes pensantes du quartier qui se rencontraient devant les étals du marché chaque semaine, une telle pensée philosophique portant un nom aussi compliqué à prononcer, confirmait indiscutablement le comportement  asocial et le goût pour la friture de Monsieur Boursicot.

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Remue-ménage dans le ménage de pépé et mémé

19 juillet, 2010

Grand-père avait l’habitude de terminer ses phrases par « et tout le tremblement ».

Il aimait les œufs. Le jour où grand-mère Berthe quitta la maison, il balança son coquetier et dit « …et tout le tremblement ».

Dans sa tête, il agita beaucoup de questions.

Il avait interdit à Grand-Mère de taper le carton au bistrot.

Celle-ci avait fini par claquer la porte.

Grand-père était balloté entre plusieurs sentiments.

Finalement, il se secoua et partit à sa recherche.

Il finit par la retrouver dans un fossé et, en la relevant,  fit une déclaration amusante :

« Il ne faut pas pousser mémé dans les orties ! »

Qu’est-ce que tu veux faire quand tu seras grand? (18)

18 juillet, 2010

Moi, je voudrais être lèche-botte. Et j’aimerais profiter de la parole qui m’est offerte dans ces lignes pour réhabiliter cette profession tellement décriée de flagorneur.

Certes, le flatteur se préoccupe d’abord de lui-même. C’est un être qui a besoin de reconnaissance, je dirais même que le flatteur a besoin d’amour. Mesure-t-on vraiment le désarroi affectif de celui qui anticipe tous les désirs de celle ou de celui dont il quémande les faveurs ? Imagine-t-on l’abnégation dont il est capable lorsqu’il cherche désespérément ce qui procurera du plaisir à la personne qu’il adule ?

J’ai déjà expérimenté dans ma chair les affres de celui qui a décidé d’assurer sa carrière par tous les moyens. Quel courage m’a-t-il fallu pour dénoncer Morissot lorsqu’il a triché honteusement lors de dernier devoir de maths. Morissot, un frère, un ami de six mois !

Mais, contrairement à l’opinion répandue, le lèche-botte est aussi et surtout un être plein d’altruisme. Au-delà du traumatisme passager qu’a provoqué ma dénonciation, j’ai servi fondamentalement les intérêts de Morissot. Il faudra qu’il se souvienne que, finalement, je lui ai rendu service ainsi qu’à d’autres élèves. Après le savon que lui a passé le prof, ça m’étonnerait que ses camarades aient encore envie de frauder !

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Arbres de vie

17 juillet, 2010

Louis de la Poulardière se promenait avec son arbre généalogique sous le bras.

Il descendait d’un La Poulardière qui se distingua à Marignan en faisant du bon boulot.

Louis de la Poulardière était un peu dur de la feuille.

Mais il était encore solide comme un chêne.

La nuit, il dormait comme une souche.

Le jour, il déclamait du Racine par cœur.

Il était du bois dont on fait les centenaires.

Il avait repris ses études de droit en suivant le tronc commun du 1er cycle.

Louis y avait rencontré Théo qui avait le même âge.

Désormais, ils se saluaient en s’écriant : « Comment vas-tu, vielle branche ? »

Cyclisme et gastronomie

17 juillet, 2010

En matière de gastronomie, Jules en connaissait un rayon.

Il cuisinait à merveille la selle d’agneau.

C’était aussi un spécialiste du couscous : on disait qu’il était capable de pédaler dans la semoule.

Lorsqu’il préparait un repas, il ne déraillait jamais.

Parfois, il invitait une célèbre danseuse et sa troupe.

Il accrochait alors une lanterne rouge à sa porte pour interdire l’accès à ses fourneaux.

Les convives devaient ronger leur frein.

En attendant qu’il revête sa célèbre tunique jaune.

Et qu’il les serve en faisant le Tour de la Table.

Les affamés pouvaient alors changer de braquet.

La véritable histoire du berger et de la bergère

15 juillet, 2010

Jean et Adeline sont le berger et la bergère du village. Le jeune homme est secrètement amoureux de la jeune fille. Son visage, à la peau déjà tannée par les longues heures passées en plein air dans les durs travaux des champs, est animé d’un regard bleu ciel qui plait à Adeline, même si la jeune fille tarde à se l’avouer. Avec sa casquette, toujours de guingois, posée sur le sommet de son crâne échevelé, il la fait beaucoup rire. Jean porte toujours la même chemise de toile grossière dont il a remonté les manches sur ses avant-bras blancs d’adolescent. Il a passé de longues heures à sculpter son bâton de berger qui l’accompagne au pré, dont il se sert parfois pour monter un détail lointain à Adeline. Les tresses blondes qui dansent autour du cou gracile d’Adeline subjuguent le regard du jeune homme. Dès qu’ils sont ensemble, il cherche ses yeux clairs et son rire enfantin qui chante comme le ruisseau au printemps. Adeline, fille d’un modeste fermier ne portera jamais de jolis habits, mais Jean trouve que ses robes de coton et son châle multicolore lui dessinent une silhouette souple et gracieuse. Les autres filles de son village, ils les trouvent aguichantes et même vulgaires, la simplicité du maintien de la petite bergère l’émeut. Adeline, elle, a les yeux qui pétillent, et puis elle rit souvent en portant sa main au visage comme pour étouffer son hilarité dans un geste enfantin et charmant. 

Les voici justement, tous deux sont assis sur le bord de la rivière. Leurs moutons paissent paisiblement au loin, surveillés par Pataud leur vieux compagnon, épagneul fidèle et attelé à son travail de gardien de l’ordre du troupeau. Ce matin, mains croisées sous la tête, Jean est étendu sur la berge qui descend en pente douce vers l’onde fraîche. Il regarde pensivement le ciel qui s’éveille au soleil d’avril et la cime des arbres qui bordent le lit de l’eau glougloutant à leurs pieds. Les coucous et les tourterelles se répondent gaiement tandis qu’on entend Pataud qui rappelle à l’ordre une brebis imprudente. 

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Notre bulletin météorologique

14 juillet, 2010

L’équipe avait atteint la finale contre vents et marées.

Les joueurs avaient été ensevelis sous une avalanche de compliments.

Mais ils savaient qu’en cas de défaite, ils s’attireraient la foudre des supporters.

La partie se déroulait sous un soleil de plomb.

A la mi-temps, ils sentaient le vent de la défaite.

Ils avaient pourtant manifesté  un déluge de bons sentiments.

Mais ils ne voulurent pas être la risée du stade.

Aussi mirent-ils un grain de folie dans leur jeu.

Et sortirent de la pelouse sous un tonnerre d’applaudissements.

La lamentable histoire du cabinet M.B.P.

13 juillet, 2010

Maria, Berthe et Phyllis étaient trois sorcières qui tenaient un cabinet spécialisé en maléfices, très courtisé par la haute société de la capitale. Elles étaient toutes trois vilaines à faire peur. Dans les soirées mondaines, on redoutait de voir apparaitre leurs mâchoires édentées et les pustules écœurantes de leurs visages déformés. Leurs ricanements grinçants et leurs regards pleins de méchanceté glaçaient d’effroi ceux qui avaient la malchance de les croiser. 

Maria était la plus âgée. En plus de sa laideur insupportable, son corps vouté et sa démarche de guingois donnaient l’impression d’un être immonde, prêt à tous les coups tordus. Pourtant son carnet d’adresses lui permettait d’accéder facilement aux grands noms de la société. Elle avait porté au pouvoir plusieurs dictateurs locaux dans des contrées lointaines pour des millions de dollars et s’était souvent offert le plaisir de les renverser huit jours plus tard après s’être fait graisser une patte décharnée par le parti adverse, le tout dans une allégresse haineuse et  rancunière. Même Berthe et Phyllis qui n’étaient pas sans reproche avait peur de Maria. 

Berthe, que les deux autres appelaient la grosse Bertha, en hommage à son obésité adipeuse, se cantonnait plutôt dans les affaires financières frauduleuses. Par la seule force de ses incantations, elle avait réussi à provoquer quelques jolies crises boursières et économiques ce qui permettait à ses commanditaires de décréter que la population devait se serrer la ceinture à leur seul profit pour remonter une pente que Berthe s’emploierait aussitôt à leur faire redescendre. Même les analystes financiers les plus expérimentés n’avaient jamais réussi à contrer les agissements de la grosse Bertha d’autant plus que celle-ci n’avait jamais mis les pieds dans une salle de cotations. A Wall Street, son nom terrorisait les goldens boys. Lorsqu’il était cité dans une affaire, il valait mieux abandonner la partie tout de suite et s’occuper d’autre chose si l’on tenait à son bonus faramineux de fin d’année. 

Phyllis était la plus jeune mais pas la moins horrible. Son nez d’une longueur démesurée se trouvait fourré dans toutes les rumeurs les plus basses qu’elle se plaisait à faire circuler sur des personnalités complètement innocentes moyennant une rétribution pharaonique de la part de leurs adversaires du moment. Phyllis, boiteuse et ricanante, hantait les nuits de la capitale à la recherche de ses proies du moment. Son sourire jaunasse découvrant sa bouche baveuse semait la terreur sur son passage.

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Drôle de cuisine…

12 juillet, 2010

Dans la rue, le petit Jean aimait trainer derrière lui, une casserole attachée à une ficelle.

Cet attelage était très bruyant. Madame Dugoujon, la concierge en faisait tout un plat.

Bien qu’elle soit sourde comme un pot.

Thérèse, la mère de Jean avait du mal à faire bouillir la marmite.

Car son conjoint, Max avait un « poêle » dans la main.

En matière de consommation alcoolique, il n’y allait pas avec le dos de la cuillère.

Quand Thérèse lui demandait de l’aide, il répondait « Cocotte ! Minute !… »

Max la bassinait avec ses soirées foot à la télé.

Elle trouvait ses relations très louches.

Pauvre Jean : le couvercle n’allait-il pas sauter ? Le vase n’allait-il pas déborder ?

Hmmm … ??

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