Le complot (Partie 1)
20 mai, 2010Le supplicié venait de pousser ses derniers hurlements avant de rendre son âme à Dieu. Sur la roue de son châtiment, il ne restait qu’un amas de chair rouge et fumant. Le bourreau s’activait encore auprès des chevaux qui avaient atrocement écartelé l’homme. Sous sa cagoule pourpre, ses yeux luisaient. Sa puissante poitrine nue ruisselait de sueur. Son œuvre avait été compliquée pour lui et abominable pour le condamné. Il n’aurait pas souvent l’occasion d’exécuter un régicide : il lui tenait à cœur d’accomplir sa tâche à la perfection.
La foule qui s’était amassée sur la place de Grève dès les premiers rayons du soleil, exultait. Elle avait crié vengeance et extériorisé sa violence dès l’arrivée du dénommé Ravaillac sur les lieux de son supplice.
Les hommes et des femmes excités par le sang s’agitaient frénétiquement. Les poings et les fourches se levaient, les visages déformés par la haine vociféraient. Le rugissement du peuple assoiffé de représailles fracassait les tympans. Les dernières paroles du condamné n’avaient pas été entendues par d’autres personnes que le prêtre, le bourreau et son assistant.
Dans l’encoignure d’une porte deux silhouettes étaient adossées. Un des deux hommes, longiligne et athlétique, étaient tout de noir vêtu. En s’approchant de lui, on aurait pu voir néanmoins que son pourpoint était finement ourlé de fils d’or. En outre, il avait la mine elle-même particulièrement sombre, ornée d’un bouc couleur corbeau, tandis que son regard de jais furetait dans toutes les directions. Il était sans doute le seul à s’intéresser moins au spectacle qu’aux êtres humains qui y assistaient.